Archive dans 31 mars 2008

Arche de Zoé: le scandale de la grâce

enfantaffame.1206979009.jpgQuand je lis les réactions sur lemonde.fr à propos de la grâce des protagonistes de l’affaire de l’Arche de Zoé, je suis réconforté. Presque tous les commentaires sont défavorables à cette mesure. Car voilà des gens qui ont quand même contrevenu à des lois aussi bien françaises que tchadiennes. En seul droit français, ils ont procédé à des enlèvements ! Sans compter ce qu’ils doivent à toutes les familles auxquelles on avait fait miroiter des adoptions. L’excuse de naïveté a quand même ses limites.

J’ajouterai même que le fait de vouloir s’affranchir de toutes les règles qu’observent, par ailleurs, avec une légitime prudence, les O.N.G. implantées localement, témoigne quand même d’un certains mépris y compris envers les peuples africains. Sans compter ce qu’aura coûté leur délirante expédition, tant en euros, qu’en dollars, qu’en réputation des organisations qui travaillent sur place. Il se sont comportés vis à vis de l’Afrique rien moins que comme de vils et stupides colonisateurs.

On espère que le Président de la république Française n’ajoutera pas sa grâce à celle du Président Tchadien. De toute façon, ces personnages sont, en France, sous le coup d’une inculpation d’enlèvement ou d’exfiltration de mineurs dont on peut légitimement espérer qu’ils en rendront compte.

On craint, par ailleurs, que dans son enthousiasme libérateur, Nicolas Sarkozy n’ait commis quelques bévues diplomatiques dont les conséquences sont perceptibles, mais non point toutes révélées. Ces énergumènes se sont crûs beaucoup plus forts que les lois. Sarkozy, en se disant à l’époque prêt à aller les chercher lui même, s’est aussi imaginé plus fort. Tout cela n’est vraiment pas malin !

Crise: faire payer les salariés… toujours

peyrelevade.1206873271.jpgJ’entends à l’instant les propos de Jean Peyrelevade sur France Info. Hormis le fait que ce digne « spécialiste » a coûté une fortune au contribuable français dans l’affaire du Crédit Lyonnais, voici qu’on l’interroge sur les « solutions pour sortir de la crise ». Et voici que cet homme ne trouve rien de mieux à imaginer que d’éteindre les déficits de l’assurance maladie et de l’assurance vieillesse par une augmentation des cotisations sociales. Pas un instant ne l’effleure l’idée qu’on pourrait taxer bien d’autre profits, notamment les profits boursiers ou les profits nés de la vente des stock-options. La seule chose qu’il imagine, c’est de prélever, une fois de plus sur les salaires.

C’est comme la « journée de solidarité », feu lundi de Pentecôte travaillé. Personne n’a imaginé faire porter la charge sur les bénéfices industriels et commerciaux.

Mai 1968 : 15 – les politiques et Charlety

[Mai 1968: commencer au début]

Les négociations de Grenelle prennent fin. Dans beaucoup d’entreprises comme Renault ou Citroën, ces accords seront rejetés par les ouvriers. Mais c’est quand même habile de la part de Georges Pompidou d’offrir des augmentations substantielles des rémunérations, ce qui ne sera pas sans effet sur la mobilisation.

Viendra le meeting du 27 mai, organisé au Stade Charléty, par l’U.N.E.F., je crois. Il y aura une grande foule et nombre de manifestants devront rester à l’extérieur. Mais surtout, il y aura des intervenants célèbres, notamment Michel Rocard et surtout Pierre Mendès-France. C’est à ce moment que je ressens, enfin, une confluence entre les points de vue et les déclarations des hommes politiques, d’une part, et le mouvement étudiant, d’autre part.

Nous nourrissons une grande réserve vis à vis des politiques. Jusqu’alors nous nous en sommes tenus très à l’écart, y compris de ceux de gauche, qui semblent surtout préoccupés de prendre le bon train. Sur ce point, Mitterrand a fait des déclarations choquantes, comme pour dire, si je me souviens bien, qu’il est prêt à hériter du pouvoir. Mais, pour nous, le pouvoir est dans la rue. Ou, du moins, nous le croyons. En fait, je crois bien que les politiques, même ceux de gauche, ne comprennent pas vraiment ce qui se passe. Les hommes politiques ont une vision bien rigide et, somme toute légaliste, des évènements. Or, ce qui se passe n’est pas légaliste du tout. C’est bien le contraire avec des mouvements populaires qui échappent aux structures politiques et syndicales traditionnelles. Le Parti Communiste est très choqué et très hostile, même si… Il fait la fine bouche devant les dégâts des manifestations. Mais, en réalité, il craint plus que tout ces mouvements non structurés, incontrôlés et, à son plus grand effroi, incontrôlables. C’est pourquoi la position des étudiants communistes sera très difficile entre les consignes qu’ils reçoivent de leur hiérarchie et la sympathie qu’ils éprouvent spontanément pour le côté libertaire du mouvement. C’est tout le paradoxe d’un parti qui a cessé depuis bien longtemps d’être révolutionnaire.

Quant aux socialistes, il sont sur le grill. Pas révolutionnaires pour deux sous et déjà bien empêtrés comme ils le seront toujours par des luttes intestines d’influence, ce qui est encore la S.F.I.O (Section Française de l’Internationaloe Ouvrière – il y a vraiment de quoi sourire) espère, espère. Ils attendent, comme le chat attend sa proie, tout en se fendant de déclarations plus chaleureuses pour les mouvements sociaux des travailleurs que pour ceux des étudiants. Le pouvoir gaulliste est tellement bien ancré qu’ils n’espèrent pas vraiment grand chose. Mais on ne sait jamais. Un 13 mai à fait venir de Gaulle. Ce serait inespéré qu’un autre 13 mai, 10 ans plus tard, le chasse.

Quant au M.R.P. alors, n’en parlons pas ! Ils n’ont jamais eu d’amour propre. Prêts à tout pour une élection ou un ministère. Les pires. Ils sont fangeux. Au moins, les gaullistes se présentent clairement. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a point d’opportunistes parmi eux. L’avenir prouvera que la majorité d’entre eux ne valent pas plus chers que les autres. Mais tant que de Gaulle est là, ils sont tenus en laisse. Et ceux là ne cherchent pas à tendre le petit doigt au mouvement. C’est le désordre qu’il convient de faire cesser au plus vite, voire par une répression sévère, voire sanglante.

Nous sommes donc très isolés. Et faisant l’objet de tentatives de manipulation, on s’en doute bien, d’où l’extrême sensibilité des groupuscules à ce qui pourrait y ressembler, même à peine. Situation paradoxale, parce qu’il nous aurait fallu compter sur ces mêmes politiques pour avoir des chances d’accéder au pouvoir. La plupart d’entre nous était bien incapable de le prendre par les armes. Parce que nous étions dans une position de contestation par l’argumentaire, mais aussi parce que la plupart d’entre nous étions bien incapables de nous servir d’un fusil, conséquence de notre anti-militarisme forcené issu des évènements d’Algérie. Et cette position s’est maintenue. Lorsque que j’ai effectué mon service militaire en 1970, dans un groupe de sursitaires, nous étions très peu nombreux à vouloir nous initier au maniement des armes « au cas où ».

Il faut ajouter, cependant que, pour un assez grand nombre, l’expérience de mai 1968 n’a pas été aussi marquante qu’on le croît souvent et les « héritiers » ne sont pas si nombreux. Nous sommes restés dans cette position ambivalente vis à vis des acteurs et des structures politiques. Peu y ont fait carrière . Ils se sont distingués qui dans l’enseignement, qui dans le journalisme ou l’architecture, ou bien d’autres secteurs, voire même le secteur productif. Seul Daniel Cohn-Bendit fait exception, mais on n’ a pas le sentiment que sa carrière ait été animée par une une frénétique recherche du pouvoir.

Pour moi, le vote a toujours été une confiscation du pouvoir du peuple. En 1969, j’y suis allé, mais l’offre était vraiment peu excitante. Puis j’ai voté P.S.U.. Puis quand le P.S.U. s’est dilué, je n’ai plus voté du tout, jusqu’à ce que des arguments finissent par me convaincre que je ne pouvais pas être critique sans aller au moins voter. Avec le succès qu’on imagine. Quant à l’appartenance à des groupes politiques ou syndicaux, je l’ai fuie comme on le ferait d’une secte, faisant mienne deux citations. La première est de Brassens: « Quand on est plus de quatre, on est une bande de cons ». L’autre est d’Henri Tachan: « Dans mon parti y’a que moi et c’est déjà le merdier ». Pour être sincère, j’ai été syndiqué pendant un an de ma vie, à l’issue de quoi, ayant constaté que tout cela n’avait d’autre but que la promotion personnelle, j’ai déchiré ma carte en petits morceaux que j’ai jetés dans la cuvette des W.C., sa place légitime.

C’est ainsi que, dans le cours naissant de cette ambivalence politique, le meeting de Charléty du 27 mai 1968 m’est apparu comme quelque chose de créatif. Probablement parce que l’initiative en revenait au mouvement étudiant. Aussi parce que, depuis la grande manifestation « unitaire » du 13 mai, rien n’était venu significativement rapprocher les étudiants des travailleurs. Et cela manquait fortement. Dans toutes les assemblées ou les commissions auxquelles je participais, aussi bien avec les étudiants à la Faculté qu’avec les salariés de l’I.P.N., il était évident que ce que nous tentions de construire ne pouvait que s’insérer dans une dimension sociale plus large dans laquelle toutes les formes d’organisation étaient fortement autogestionnaires.

Mendès-France et Rocard étaient venus apporter cela. La caution de Mendès était très importante. Je n’ai jamais vraiment su si la réputation de cet homme était méritée ou usurpée, tant je me méfie des hommes qui nous gouvernent, mais il apportait probablement ce qu’il y avait de moins compromis dans le monde politique. Je ne me souviens naturellement pas de ce qu’il a pu dire, je n’en garde que l’ambiance. On dit aussi qu’il y avait une offre de service, mais je ne m’en souviens point.

Charléty fut un grand moment. Un grand moment de ferveur populaire. Ce n’était pas comme dans une manifestation où chacun, en fin de compte, ne participe qu’à un petit morceau de l’acte collectif. Dans le stade, des dizaines de milliers de personnes savaient qu’elles avaient beaucoup à partager, simplement parce qu’elle étaient ensemble. C’était comme la cour de la Sorbonne un jour de meeting effervescent, sauf que c’était beaucoup plus grand.

Dans une allocution, deux ou trois jours auparavant, de Gaulle avait annoncé un référendum et déclaré que si la réponse était négative, il partirait. Nous avions nos chances.

[Suite ]

Monsieur Sarkozy avait promis…

Monsieur Sarkozy,

Pendant la campagne présidentielle, vous nous avez annoncé bien des choses heureuses. Ce n’est pas comme l’autre, la Ségolène, qui ne voulait s’engager sur rien, toujours à se méfier des contingences économiques. Vous, au contraire, vous nous avez bien fait comprendre que tout ce baratin sur l’économie auquel je ne comprends rien n’était là que pour justifier que ma vie soit ennuyeuse. Vous nous avez bien dit que l’on pourrait se passer de la Banque de Monsieur Trichet (quel nom prédestiné !) et autres Cassandres qui promettaient mille tourments.

Et voilà que votre Premier Ministre vient dire qu’il faudra renoncer à la baisse des impôts.

Je ne veux pas avoir l’air rancunière, mais votre prédécesseur nous avait déjà fait le coup. Mais vous aviez parlé de la « rupture ». La rupture ça veut dire pas comme avant. Sur ce plan, j’ai déjà été baisée par Chirac et je commence à ne pas trouver très drôle ce type de sodomie, parce que ce genre de baise c’est toujours des coups par derrière. Surtout que vous aviez dit aussi qu’ensemble tout deviendrait possible, qu’en d’autres termes, ce serait plutôt moi qui baiserait. Mais j’ai beau chercher, je ne trouve personne à baiser et mon éréthysme sexuel commence à battre l’aile.

Vous me dites que, de toute façon, je ne paye pas d’impôt sur le revenu. C’est vrai. Mais mes parents qui sont retraités, avec une retraite pas si élevée que cela, en payent. J’ai bien le droit de m’intéresser à mes parents ! Surtout qu’eux ne me laissent pas tomber quand je suis dans la merde. Même mon ex, qui n’a pas un trop mauvais fond se laisserait bien aller à me donner un petit billet, mais lui, comme célibataire, il en prend plein le… Vous voyez par où que je veux dire.

Je dirai même que le nombre de ceux qui me sont passés dessus a plutôt augmenté : voyez, vous avez commencé par donner un paquet fiscal à des gens qui ne sont pas moi et qui m’on regardé en me faisant la nique. Je ne dirai rien des heures supplémentaires. Car pour l’instant, à mon corps défendant (contre me faire baiser), les heures supplémentaires de caissière chez Auchan, y’en a point. Même que c’est 25 heures par semaine. Et pas plus. Quand on ouvrira le dimanche, je pourrai peut-être, comme cela, mes deux enfants seront débarrassés de leur mère. Autant les mettre à l’orphelinat.

Puis après, je me suis fait mettre de quelques centimes sur chaque boîte de médicament. Cinquante centimes par ci, cinquante centimes par là. Et comme, dans le même temps, je me faisais aussi baiser par la grande distribution, c’est devenue une vraie partouze dans laquelle je faisais la pute sans toucher un euro. On m’en retirait même. C’est la nouvelle loi du genre: plus je te baise et moins tu gagnes. Même plus moyen de faire la péripatéticienne.

On me dit aussi que je vais devoir cotiser 41 ans pour toucher ma retraite à taux plein. C’est bien cela. Avec mon emloi pas plein, je n’ose imaginer ce qui va me rester. Surtout qu’à cet âge, je serai trop vielle et trop moche pour faire la pute, la vraie, même à tarif senior, pour arrondir mes fins de mois.

Peut-être que si vous étiez gentil, Monsieur Sarkozy, vous pourriez juste me donner votre montre. Vu son prix, je pourrai la revendre et avoir un peu d’air pendant un bon moment. Je dois bien pouvoir avoir un camion de patates pour ce prix. Et puis, si vous et vos ministres preniez un peu moins les avions très chers, peut-être pourriez-vous dépanner des centaines de gens comme moi. Je n’ose vous suggérer de demander à vos copains, vous savez les Bouygues, les Lagardère, tous ceux qui étaient avec vous au Fouquet’s le soir du 6 mai, de se contenter d’un peu moins de fric, cela ferait peut-être exemple que d’autres suivraient. La vraie solidarité. Celle des gros riches envers les petits pauvres. Et pas des pauvres entre eux.

C’est vous qui l’avez dit, Monsieur Sarkozy: « Ensemble tout devient possible ». Ensemble c’est donc bien avec tout le monde y compris tous vos copains du kake 40 et aussi Johnny comme le Clavier et le Reno. Votre petite femme qui n’a pas l’air désargentée non plus pourrait aussi faire un don.

Tant qu’à faire, vous pourriez faire une loi. Une loi qui interdirait de s’enrichir en baisant les travailleurs. Oh, je comprends qu’il faut bien donner un bon salaire à ceux qui donnent beaucoup d’eux-mêmes pour faire marcher les entreprises. Mais il y a des limites. Même si on s’arrêtait à 20 fois le SMIC, on trouverait encore de quoi. Vous allez me dire qu’ils vont tous se barrer à l’étranger. Est-ce vraiment grave ? On confisquera tout ce qu’ils ne pourront pas emporter. En même temps on pourra piquer les résidences des tyrans africains et on pourra même secourir d’autres peuples.

Vous ne pouvez pas imaginer, Monsieur Sarkozy, ce qui m’arrive. Je vous aimais bien pourtant. Mais quand je réfléchis, et plus je réfléchis, même s’il y a des choses dans ma réflexion qui ne sont pas tout à fait claire, j’ai l’impression de devenir une autre personne. J’ai raconté cela à mon ex, qui est plus cultivé que moi. Et savez-vous ce qu’il m’a dit ? Il m’a dit, je répète parce que je ne suis pas sûre d’avoir tout compris, il m’a donc dit que mes analyses étaient superficielles, mais qu’en continuant un peu, je deviendrai marxiste… ou gauchiste. Je ne sais pas ce qui est mieux ou pire. Qu’en pensez-vous ?

Trombinoscope des hommes dangereux (catégorie adversaire des libertés): Hu Jintao

hu_jintao.1206648786.jpg« Depuis décembre 2005, trois des journaux les plus libres ont connu des purges au sein de leur direction tandis qu’une dizaine de journalistes et cyberdissidents ont été arrêtés par la police politique. Le Président, également chef du Parti communiste et de l’armée, a personnellement exigé l’arrestation de Zhao Yan, collaborateur du New York Times, et Ching Cheong, journaliste d’investigation hongkongais. L’Association « Reporters sans frontières » signale qu’en 2004 Hu Jintao avait déclaré publiquement son admiration pour le modèle cubain de contrôle de la presse : propagande, Internet filtré et journalistes étrangers surveillés. »

(Extrait de Wikipedia ). No comment

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Mai 1968: 14 – Le 24 mai

[Mai 1968: commencer au début]

Le soir du 24 mai, j’y serai. En fait, comme je l’ai indiqué, mes obligations familiales de nouveau père m’invitaient à rentrer chez moi le soir, ce que faisais évidemment à contrecoeur. Le 24 mai, ma femme se trouva assez reposée pour pouvoir sortir le soir, ce qu’elle avait envie de faire depuis bien longtemps. Vite fait, on s’organise. On confie le petit aux grands parents. On retraverse Paris pour aller ranger la voiture hors de portée des probables incidents, en fait, aux pieds de notre appartement près de la statue de Jeanne d’Arc du Boulevard St Marcel.

Il n’y a pas loin pour se rendre à pied au quartier latin. A mon grand étonnement, il n’y a pas autant de monde que ce que j’avais imaginé. L’ambiance est calme mais tendue. Cela ne ressemble à rien des manifestations de la journée. A rien, non plus, de ce que j’avais ressenti dans la nuit du 10 mai, mais là, j’étais tombé en pleine action. Nous savons cependant qu’il doit y avoir une manifestation. de toute façon, il y en a une tous les soirs, plus ou moins violente.

La rue Soufflot et la Place du Panthéon sont presque désertes. Je revois bien cette image des murs plongés dans une relative obscurité avec quelques très petits groupes de piétons qui semblent raser les murs. Là se trouve aussi le Commissariat de Police du 5ème arrondissement, réputé pour ses matraquages. Quelques têtes peu amènes dépassent du nid. Devant, il y a un certain nombre de cars de police.De nos jours, les cars de CRS sont blancs. A l’époque, ils étaient peint d’un bleu marine presque noir. Cela crée une impression forte et dissuasive.

Nous descendons le Boulevard St Michel. Il y a un peu plus de monde, mais pas beaucoup. Même dans la cour de la Sorbonne, parfois si animée dans la journée, c’est loin d’être l’affluence. Comme il est tard, il n’y a pas de débat enfiévré dans le Grand Amphithéâtre. En sortant rue des Ecoles, j’entends un bruit presque régulier et sec. Je découvre tout de suite qu’on est en train de dépaver la sue St Jacques. Et le bruit de tous ces pavés qui tombent de dizaines de mains sur le talus déjà dressé fait comme une succession très rapide de coups de pistolets. Ceux qui sont à l’ouvrage sont moins nombreux que ceux qui regardent.

Depuis quelques jours, il y a un peu moins de monde aux manifestations de la nuit. Il y en avait plus au début du mois, mais elles avaient lieu plutôt en fin d’après-midi. A cette époque, le partage entre les manifestants violents et les autres présentait une zone d’incertitude. Nombreux sont ceux qui même n’étant pas prédisposés s’étaient laissés aller à lancer quelque chose sur les forces de l’ordre pris par l’ambiance. D’autant que les jets de grenades lacrymogènes incitaient à la riposte.

Depuis, il s’est passé quelque chose. J’ai le sentiment que les journées que nous vivions, d’une certaine manière enthousiasmés par l’étonnante chaleur des rapports sociaux et l’inventivité des débats dans les assemblées générales et les commissions, consommaient une part de notre énergie revendicatrice. Nous étions en train de poser les pierres d’une reconstruction si phénoménalement solidaire et ouverte de notre société que nous n’avions pas besoin d’aller nous battre contre qui que ce soit.

D’un autre côté, nous déplorions les excès des « casseurs » en sachant bien qu’elles nuisaient à la réputation de notre mouvement. Et puis, nous avions appris que les casseurs étaient souvent des agents spéciaux des forces policières qui ont pour mission d’entraîner au désordre et au pillage. A cela s’ajoutait la brutalité des arrestations et des internements à Beaujon, ce qui faisait réfléchir. Sans compter, bien entendu, que la majorité d’entre nous était partisane de manifestations pacifiques.

Nous avons monté la rue St Jacques, de nouveau vers la rue Soufflot et le Panthéon. Arrivé en haut, nous avons entendu les premières explosions des grenades lacrymogènes vers le bas de la voie. Puis les CRS sont sortis du commissariat du cinquième pour prendre la barricade à revers. Ils étaient nombreux. Ils étaient tout noirs et menaçants. J’ai pensé tout de suite aux milices nazies.

Etait-ce manque de courage ? De toute façon, il n’était vraiment pas indispensable de rester pour se faire taper sur la tête. Nous avons pressé le pas pour quitter le quartier.

Nous avons appris par la suite que la soirée avait été bien sauvage. Dans tout Paris et si je m’en souviens bien, il y a eu des tentatives d’incendies, ici ou là, dont à la Bourse. Il y aurait eu un mort, sur une barricade. Il y a deux versions: tir de grenade ou coup de couteau.

 

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[Suite]

Carla dévêtue: désespérant !!!

Il y a quelques semaines, le 19 décembre pour être précis, j’ai publié un article sur ce blog même, intitulé « Carla Bruni nue ». Pour l’essentiel, je faisais essentiellement référence à cette nouveauté française, sachant que jusqu’à présent, « Claude nue », « Anne Aymone nue », « Danielle nue », « Bernadette nue » étaient des requêtes qui ne donnaient aucun résultat sur Google. Et cela vient de changer. A tout hasard, j’avais donné ce titre, pour créer un bruit, du « buzz », comme on dit. Soucieux, quand même d’un peu de dignité, j’avais juste donné l’adresse d’un site qui montrait diverses photos de Madame Bruni, lors des activités de sa profession de mannequin, dont certaines peu vêtues.

J’imaginais qu’on en sourirait un moment, comme d’une bonne plaisanterie de bistrot. C’était une curiosité. C’était aussi une manière de dire que, compte tenu des antécédents de la dame, il n’était peut-être pas indispensable qu’on expose trop la liaison avec son compagnon d’alors. Nous savons bien comment les prédécesseurs de Nicolas Sarkozy ont trouvé des arrangements avec cet ordre qu’on peut bien qualifier d’hypocrite et de bourgeois. Et même, si je pense sincèrement qu’on doit laisser tout un chacun bien libre de ses actes, je pense aussi qu’il n’est pas indispensable d’en faire forcément publicité.

Disons que je n’avais rien à dire de la bonne fortune de Monsieur Sarkozy, sauf l’exhibition d’une passion subite, après des va et vient publics à propos de sa conjointe légitime. Disons que tout cela aurait bien mérité de rester dans la sphère privée.

A la provocation de l’exhibition, je répondais donc par un article provoquant.

Curieusement, la chose passa inaperçue. Ma foi, tant mieux. Sauf que, vers le début du mois de février, je constatai une augmentation forte des consultations de cette page. Je retirai donc le lien et apposait ce commentaire, le 14 février:

« P.S.: Il y a sur ce blog plein d’autres choses intéressantes à lire ! »

Depuis les connexions à cette page étaient redevenues calmes, une centaine par jour, sauf qu’aujourd’hui, j’en suis à 624 connexions dont 556 sur cette page même. Ce qui au passage me désespère, car peu de lecteurs ont pris la peine de s’intéresser à la chronique sur mai 1968, que je suis en train de publier, chapitre par chapitre en d’autres points !

Me voici très attristé ! Oh, je suis bien persuadé qu’on ne changera pas la nature humaine. Mais je me sens troublé d’avoir manipulé de façon tout à fait involontaire, ce que je voyais comme une blague de potache et qui prend maintenant une ampleur… que je n’avais pas prévu. Je ne m’en sens pas coupable. Il y a bien d’autres sites où l’on est bien moins réservé. Il n’ y a lire le Daily Mail de ce soir !

Je me demande simplement si Nicolas Sarkozy qui se trouve être aussi le Président de la République Française a bien mesuré, dans sa relation amoureuse adolescente et publique, l’impact mondial de ces circonstances. Il va traîner tout cela pendant tout son quinquennat. Il ne pourra se rendre nulle part dans le monde sans être chassé par des dizaines de paparazzi qui ne s’intéresseront qu’à cela. Et je me prends à imaginer le pire. Que cette passion bien soudainement enflammées ne s’éteigne aussi vite, car on dit que Madame est un peu coutumière du fait.

Qu’adviendra-t-il ?

Mai 1968: 13 – Après le 13 mai

[Mai 1968: commencer au début]

C’est le 13 mai que le couvercle a vraiment sauté !

Cette manifestation était bien trop nombreuse pour qu’il n’ y ait que des étudiants. Il y avait aussi des travailleurs puisque les syndicats étaient là. Et le peuple de Paris. Au moins tous ceux qui souhaitaient que change cette société glacée.

La Sorbonne s’ouvrit. Dans le Grand Amphithéâtre s’installa un débat permanent où chacun put exprimer ce qu’il avait envie de dire. Et comme cela ne suffisait pas, deux jours plus tard, ce fut le Théâtre de l’Odéon. Mais il n’y avait pas que le Grand Amphi et le Théâtre. C’était partout.

Dans le laboratoire de la Sorbonne dont je faisais partie nous nous mîmes à réfléchir aux conditions de travail des chercheurs et de tous les collaborateurs. On s’intérrogea aussi sur le sens de la recherche et, pour ceux d’entre nous qui étaient enseignants au sens et à la manière de transmettre les connaissances. Et quelles connaissances ?

Quand nous nous rendions au Centre Universitaire Censier, nos étudiants en psychologie étaient là, dans telle ou telle salle à critiquer, il est vrai, mais aussi à proposer d’une façon originale et constructive.

Quand je me rendais à l’Institut Pédagogique National, l’ensemble du personnel était mobilisé. Le Service de la Documentation et de la Recherche dont je faisais partie avait créé diverses commissions pour étudier et échanger des points de vue sur nos missions et la manière de les accomplir.

Car on se mit aussi à écouter. Oh, cela ne fut pas facile. Il y avait tant à dire. Il fallut se discipliner et accepter d’attendre son tour de parole tout en piaffant du désir de dire. Et là nous apprîmes que la démocratie était un exercice long. Entendre chacun, avec respect, débattre contradictoirement, cela prend des heures.

Et nous sommes devenus heureux.
Nous sommes devenus heureux parce qu’on rencontrait des gens dans la rue et qu’on se parlait et qu’on se tutoyait.
Nous sommes devenus heureux parce que nous avons cru qu’on pourrait changer les conditions de vie et de travail. Que les patrons respecteraient leurs ouvriers, que les professeurs respecteraient les étudiants et les élèves. Ce que nous avons voulu dire, c’est que l’autorité, quelle qu’elle soit, ne disposait pas de la connaissance absolue pour décider de la vie des gens. Nous avons voulu exprimer que les élèves avaient une culture, que les paysans avaient une culture, que les ouvriers avaient une culture, que les immigrés avaient une culture, que tous nous avions, à des titres divers, une culture et qu’il fallait l’entendre. Et c’est pourquoi nous avons remis en cause toute autorité qui voulait décider pour et au nom des gens qui avaient leur culture et leur droit à la parole.
Nous avons rejeté l’autorité quand elle n’était pas légitime. Celle qui dit « faites ce que je dis, mais pas ce que je fais ». Et pourtant, nous avons continué à admirer les brillants professeurs… et à dénigrer les mauvais. Nous avons continué à admirer les grands hommes politiques. Nous avons continué à débattre de Marx et de Trotski comme de Freud et de Ferenczi, de l’existence de Dieu, de la société de consommation, et du rôle du pouvoir dans la vie politique et sociale.

Et puis nous avons clamé le droit de chacun à la création, à l’épanouissement, à l’innovation, à l’imagination, au rêve, à l’art. A la vie quoi ! A mieux que métro-boulot-dodo. Et nous avons découvert « sous les pavés, la plage ». C’était comme une vibration de l’été 1936. La plage…

Et puis nous n’avons pas oublié le spectacle du monde: le Viêt-Nam, les pays de l’est…

Alors quelqu’un a crié un jour, et nous avons repris en choeur: « Faites l’amour, pas la guerre ».
Oh, combien c’était beau !

C’est vrai que les manifs du soir ont continué après le 13 mai. Elles étaient alimentées naturellement par ceux pour qui ces confrontations avec le pouvoir étaient indispensables. S’y ajoutaient tous ceux qui y participaient, mais pas au premier rang, car ils auraient préféré un affrontement plus pacifique. Mais le pouvoir ne nous incitait pas à être pacifique. Toujours raide. Toujours incapable d’entendre la rumeur qui montait du peuple. La « chienlit » ! La sévérité des arrestations et des internements avec ses rituels de matraquage contribuait aussi fortement à l’entretien de ce climat. Et les « enragés » s’étaient durcis avec les négociations de « Grenelle ». Le pouvoir savait bien qu’en accordant du pouvoir d’achat aux ouvriers et aux employés, il allait contenter les syndicats et désolidariser le monde du travail de celui des étudiants. On sentait donc que la divine union de la manifestation du 13 mai allait se diluer dans une revalorisation du S.M.I.G. (c’était le nom de l’époque: Salaire Mininum Interprofessionnel Garanti).

Tous ceux qui n’ont pas vécu cette deuxième quinzaine de mai dans cette ambiance débridée de l »Imagination au pouvoir« , ne peuvent comprendre ce que nous avons ressenti. Nous avons cru (un peu) que la volonté populaire pouvait changer le monde. Nous avons cru (un peu) que les relations humaines et sociales pourraient être plus heureuses et plus harmonieuses. J’ai écrit un jour, tout en n’étant pas croyant, que je pensais que le Christ s’y serait trouvé bien. Simplement parce que nos valeurs humanistes et morales telles qu’elle découlent de notre tradition judéo-chrétienne trouvaient un monde où elles pourraient s’épanouir. Il ne faut pas oublier, ce que j’ai écrit au début de cette série, que nous avions été élevés dans la fraîche mémoire des horreurs du nazisme et que nous avions encore le spectacle des conflits sauvages qui incendiaient le monde. Et voici qu’une brèche, non pas une brèche, mais une toute petite fissure s’ouvrait. Enfin ! On pouvait imaginer, espérer !

Et notre culture politique s’est construite dans ce chaudron. Tout s’y mélangeait. Foin des cadres rigides des partis et des syndicats qui embrigadent le monde. Quelques uns, parmi nous, ont compris. C’était une immense séance de travaux pratiques libertaires. Et puis, ils étaient là. Les anarchistes sont souvent discrets. Avant 68, ils étaient presque invisibles. A ma connaissance, je ne me souviens pas avoir vu des drapeaux noirs dans les manifestations avant cette époque. En mai, ils étaient là. Je ne parle pas de ceux qui criaient fort et prônaient la destruction de la société. Non, les autres, ceux qui s’expliquaient patiemment et longuement s’il le fallait, qui ne prenaient pas pour des cons ceux qui ne pensaient pas comme eux pour autant qu’on ait aussi la patience de les écouter. Je les ai rencontrés et ils proposaient une organisation de la société presque inimaginable : pas de chefs, pas de maîtres (« Ni dieu, ni maître, ni état, ni patron). Ma culture, globalement marxiste ne s’y retrouvait qu’un peu. Je me souvenais avoir un peu lu des choses sur la Guerre d’Espagne.

Sur l’heure, ils ont simplement jeté le doute. Mais le ver était dans le fruit. Il m’a fallu au moins trente ans pour comprendre que « la plus haute expression de l’ordre, c’est l’anarchie « .

[Suite]

La nuit du Fouquet’s (6 mai 2007)

fouquets.1206234512.jpgJe viens de lire la moitié de La Nuit du Fouquet’s d’Ariane Chemin et Judith Perrignon, avant de m’endormir. A vrai dire, je me suis bien endormi, mais je me suis trouvé éveillé deux heures plus tard, la tête pleine de ce récit. J’ignorais que tout cela avait été prémédité et, comme on avait beaucoup fait état des invités « people » comme Johnny Halliday, Jean Reno et Christian Clavier, j’ignorais que se trouvait là aussi toute la clique de cette centaine de personnages qui, à eux seuls, possèdent la richesse de la France: les Bolloré, Arnault, Dassault, Lagardère, Bouygues, et tutti quanti. Ils étaient tous là pour faire allégeance à ce petit personnage qui saura bien le leur rendre.

En lisant l’histoire de cette nuit, je repensais à l’histoire de cette femme qu’on m’avait contée quelques heures auparavant. Accident de voiture en rentrant du travail. Soins et soins alternant avec des périodes de travail. Elle a neuf cents euros par mois, avec un peu d’allocations, bien sûr, et un peu d’A.P.L., bien sûr aussi. Trente euros par jour, même pas le prix d’une bouteille de Champagne au Fouquet’s. Peut-être le prix d’une flûte que les invités abandonnent à moitié bue sur le coin d’une table.

Combien de journées de travailleur ont été bues et mangées ce soir-là ? Comment qualifier une société dans laquelle existe une telle débauche d’argent ostentatoire? Et comment qualifier ceux qui en sont les gouvernants ?

Mai 1968: 12 – Enfin, l’appel à la grève et le 13 mai

[Mai 1968: commencer au début]

Les évènements de la nuit du 10 au 11 mai ont marqué les esprits. Les barricades ont été nombreuses et ont résisté longtemps. La répression policière a été d’une violence inouïe. Les poursuites, matraque à la main, des manifestants et, parfois, de personnes se trouvant là par hasard, ont été sauvages. Nombre d’habitants de la rue Gay-Lussac ont témoigné de ces poursuites dans le escaliers des immeubles, voire jusque dans les appartements.

medium_crs_ss.1206145736.gifDes centaines de manifestants ont été arrêtés. Ils ont été matraqués avant de monter dans les cars ou dans les locaux du commissariat du cinquième arrondissement qui s’est acquis une fort mauvaise réputation. Ils ont été matraqués à la descente des cars. Les conditions de détention à Beaujon sont vite connues et l’on peut dire qu’elles ne sont pas bonnes. Il y a des récits de très mauvais traitements. Comme la plupart des interpellés finissent par être relâchés, on sait comment cela se passe. Et la presse publie les récits. Certains gestes des forces de l’ordre ressemblent fort à des tortures. On dit qu’il y a eu des viols.

En réalité, quarante ans plus tard, contrairement à l’opinion répandue, je crains que tout ceci n’ait été vrai. Il est certain que la violence de certains émeutiers (les pavés ne sont pas des projectiles anodins) puisse expliquer la violence des réactions.Mais il y a aussi cette manière inhérente à toutes les forces de police… Et ce que nous avons connu ensuite, comme l’assasinat de Malik Oussékine, en dit assez sur les pratiques des forces de l’ordre.

Après la nuit du 10 au 11 mai, la population est plus avertie de ce qui se passe et l’indignation commence à venir. La C.G.T. et les syndicats enseignants lancent un appel à la grève pour le 13 mai. Ce n’est pas et ce ne sera jamais un authentique rapprochement ouvriers-étudiants, comme beaucoup l’ont espéré. mais ce n’est déjà pas si mal.

On attend toujours la réouverture de la Sorbonne, promise par les ministres.

Le 13 mai est une date spéciale. C’est exactement 10 ans auparavant, le 13 mai 1958 que débutèrent les manifestations d’Alger qui ont conduit au retour du Général de Gaulle au pouvoir. Et cette coïncidence fait aussi ressentir que cela fait dix ans que s’impose ce pouvoir triste et froid que toute la classe ouvrière et tous les jeunes ressentent comme pesant. Les motivations ne sont évidemment pas les mêmes. Les dirigeant de la C.G.T. ne s’occupent pas de libération sexuelle. Mais les deux mouvements vont, pendant un temps, cohabiter très sympathiquement. Les ouvriers de Renault recevront patiemment les étudiants venus pour exposer leurs théories politiques. Mais les préoccupations ne sont pas les mêmes. Mais, quand même, trouve-t-on ici ou là des minorités plus ou moins libertaires qui contribueront à la naissance de la revendication d’un « socialisme autogestionnaire » notamment à la C.F.D.T..

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La manifestation du 13 mai est historique. Je n’y suis pas et je le regrette bien. Mon temps est très occupé. J’hésite à m’absenter complètement de mon emploi à mi-temps. Certains l’ont fait quoique un préavis de grève formel n’a pas été déposé. Je passe aussi un peu de temps dans le laboratoire de la Sorbonne auquel j’appartiens (je ne me souviens plus comment nous faisions pour entrer par la rue Saint Jacques). Et puis il y a les nécessités paternelles. Le bébé a dix jours et la maman est encore sous le coup d’un accouchement qui fut un peu difficile et a besoin de quelques soins.

 

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Empêchée de participer aux évènements, elle piaffe d’impatience. Je raconte évidemment ce qui se passe, les rencontre que j’ai faites, et tout cela. J’ai l’impression d’augmenter encore son impatience. Là, vraiment je n’y peux rien…

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C’est donc la manifestation du 13 mai, de la Place de la République à Denfert Rochereau. Un fleuve humain qui se déplace dans la capitale. Caroline de Bendern devient célèbre et, raconte-t-on, fut déshéritée par son grand père. On pense qu’il y avait un million de personnes. Naturellement la police donnait un chiffre ridiculement bas. Personnellement, je dirais raisonnablement au moins 500000. C’est un superbe succès. Ouvriers, étudiants, employés, hommes et femmes, tous fraternellement unis. Cette manifestation portera en elle les germes du grand mouvement de solidarité et d’échange qui se développera aussitôt.

Le 13 mai, la Sorbonne est ouverte.

L’imagination prend le pouvoir.

 

Découvrant la photo de Caroline de Bendern (je n’ai su que récemment, grâce à Internet, qu’elle s’appelait ainsi) quelque temps plus tard dans je ne sais quel journal, j’eus une grande émotion. Il m’a semblé reconnaître une jeune femme que j’avais beaucop aimé pendant plus de deux ans et qui m’avait congédié. Même visage (presque) et surtout coupe de cheveux identique et, pour compléter l’identification, la même veste longue rayée verticalement. Ce n’est que récemment, en découvrant le vrai nom de cette jeune femme, que j’ai dû renoncer à cette pourtant belle erreur.

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