On sait maintenant que la crise ne sera pas que boursière. Elle accompagne ou amplifie un mouvement de récession dont il n’est pas certain qu’elle soit la cause, car il n’est pas interdit de supposer que le mouvement de récession se soit amorcé de façon indépendante. Mais, au jour d’aujourd’hui, l’effet boule de neige est là. Et cet effet est encore amplifié par la couardise des milieux boursiers qui, au lieu de faire la part des choses et ne réajuster que ce qui mérite de l’être, réagissent de manière infantile et irréfléchie. A moins que, hypothèse d’un machiavélisme plus grand encore, l’ordre du jour ne soit à la spéculation frénétique à la baisse en espérant « se refaire » en achetant à vil prix et en espérant aussi n’être pas le dindon.
Mais, en tout cas, et au final, tout ceci se traduit par une perte de revenus, voire d’une perte d’emploi, pour des millions de gens à qui l’on présente la crise comme on le ferait des mouvements de la marée, comme si c’était inexorable et non modifiable, comme si c’était volonté divine d’un dieu malveillant ou comme si c’était « la faute à personne ».
Or, la faute est bien à un groupe de gens qui ne sont guère plus d’une poignée à l’échelle de l’humanité et qui se sont emparé du pouvoir économique sur le monde pour s’enfler du phallus et des comptes offshore dans ce qu’on nomme « paradis » fiscaux. Et même si ceux-ci, de méprisante façon, ne reconnaissent pas leur faute, on n’entend pas dire qu’ils soient le moins du monde inquiétés par les puissances d’état. Leurs ennuis se limitent, au maximum, à la perte d’un parachute doré et même pas à la perte de valeur de leurs stock-options, car ils ont vendu fort à propos, ce qui n’aurait jamais été que la nième couche de leur tas d’or.
En d’autres temps, on était moins indulgent envers les profiteurs. Au Far West, on les eut couverts de goudron et de plumes. Et ceux qui furent poursuivis, en France, pour marché noir, en 1945, n’avaient pas touché le millième de ce que ces arrogants parrains ont engrangé.
Il semblerait quand même légitime que la justice passe. Au moins qu’on les dépouille de la plus grande part de leurs biens pour secourir ceux que leur impéritie a conduit et va conduire au désespoir. Il y a tous ceux, dans le monde occidental qui vont se retrouver au chômage. Il y a tous ceux dans le Tiers Monde, pire encore, qui ne pourront manger à leur faim. Il y a tous ceux qui y perdront la vie de désespoir ou de disette. Car même ceux qui ont souscrits à des emprunts irréalistes ne sont jamais coupables que de s’être fait embobiner par des intermédiaires incompétents et avides de profit
Il est pas impossible que le nombre de victimes soit plus élevé que ne le furent celles de la Yougoslavie. Alors, qu’attend-on pour constituer un Tribunal Pénal International pour juger des crimes économiques qui ont conduit les citoyens de la planète à un tel désastre ?
Dans une société « normale », où subsisterait un peu de morale, il faut reconnaître ses fautes, mais aussi les réparer. On attend…
Notes d’économie politique 36 – 28 octobre 2008