Les états européens se repassent l’euro comme un bâton merdeux. Mais on ne voit pas poindre la solution. Malgré toute l’austérité imaginable, la dette grecque augmente toujours simplement par la baisse des recettes fiscales provoquée par la baisse d’activité, le chômage et la baisse de la consommation. Tous les gouvernants s’acharnent à maintenir la monnaie unique et la pseudo solidarité entre les membres de la zone, mais on ne voit pas l’ombre du début d’une inversion du processus. Après l’Italie, l’Espagne et le Portugal, d’aucun prédisent l’entrée de la France dans le jeu à condition d’admettre que cette entrée n’ait pas déjà eu lieu. Les taux d’emprunt modérés sont le miroir aux alouettes qui cache les montants pharamineux qu’il faut emprunter pour le service de la dette elle-même.
Nos gouvernants viennent de découvrir le problème de la compétitivité et des coûts salariaux. Il est certain qu’une baisse des coûts de production améliorerait les exportations, avec cette limite qu’il y a aussi des pays avec lesquels il est impossible d’être compétitif. Accroître cette compétitivité, c’est aussi ramener certaines productions sur le sol national. Les avis divergent sur le taux de la différence entre la production chinoise et ce que serait la production française. Mais même si les chinois ou d’autres sont payés trois sous, il n’en reste pas moins que s’ajoutent des coûts de transport, de distribution, etc., qui font au passage l’objet de marges. Ce n’est donc pas tant que ça.
Contrairement à ce que croient les dirigeants français et leurs nouveaux copains du MEDEF, il est peu probable qu’il soit possible d’agir sérieusement sur les coûts salariaux. Le risque de conflit social est important, malgré la menace de la répression par le chômage. Et, risque plus grand encore qui atteint les pays du Sud de l’Europe, on devrait faire face à des baisses considérables de la consommation et des ressources fiscales au moment où l’on devrait secourir des chômeurs de plus en plus nombreux. Et le serpent se mordrait la queue de plus en plus fortement.
Si l’on peut imaginer qu’on puisse, à la marge, gratter un point de TVA –encore qu’une baisse de la consommation de 1% ne soit pas sans risques, on ne pourra guère aller beaucoup plus loin sans risque majeur.
Il existe une manière, sournoise mais supportable, d’améliorer la compétitivité. Il suffit simplement de dévaluer. Dévaluer n’aura qu’un effet modéré sur le prix des produits français, agricoles notamment. Le coût de l’énergie fossile augmentera, le coût de l’énergie nucléaire, non, et surtout certaines énergies nouvelles risquent de devenir compétitives. Le coût des produits importés augmentera (le beurre sera compétitif devant l’huile de palme), et fera baisser les prix de nos produits à l’exportation. Essentiel, les salaires ne baisseront pas, en valeur nominale, c’est là que c’est sournois, et l’on augmentera la possibilité de redémarrage donc de création d’emplois. On entrera, évidemment, dans une phase de revendications pour une augmentation du pouvoir d’achat, mais ceci laisse un peu de temps.
Quand on parcourt les contributions sur ce sujet, il est intéressant de constater que nombre d’économistes, et non des moindres, avancent ce point de vue. On explique aussi que la sortie de la Suède de ses difficultés serait en grande partie fondée sur une dévaluation significative.
Mais la Suède, n’appartenant pas à la zone euro, elle a pu faire ce qu’elle a voulu.
Il apparaît donc que l’euro est un obstacle majeur à la sortie de la situation économique actuelle dite « crise ». On pourrait dévaluer l’euro. Mais l’Allemagne ne l’acceptera jamais.
Il faut donc, nécessairement et de façon urgente, quitter l’euro.
Notes d’économie politique 79
1018 – 15/11/2012