Tout à coup cette phrase, prononcée par un journaliste de France-Info, à propos du mode de désignation du Président de France Télévision : « Parce que Nicolas Sarkozy l’a voulu ainsi » .
Et c’est bien vrai. Comme de tant d’autres décisions, dans nombre de domaines. Le pouvoir est à l’Elysée, entre les mains du Président et de ses conseillers qui, pour nombre d’entre eux, ne sont pas des élus. La piétaille UMP n’est là que pour voter dans le bon sens. Et s’il arrive que, pour des raisons diverses, elle ne le fait pas, on fait revoter.
C’était dans les années soixante. Nous avions un mot d’ordre : « Non au pouvoir personnel ! ». Ce pouvoir personnel était incarné par de Gaulle et nous avions le sentiment que le Général décidait de tout. Ce qui, des années plus tard, est loin d’être vérifié. De Gaulle s’intéressait essentiellement à la politique étrangère (d’où la tradition du « domaine réservé ») et les Premiers Ministres (Jean Louis Debré et Georges Pompidou) conduisaient la politique intérieure (en relation, bien sûr, avec le chef de l’état. Par contre, les députés UNR(1) étaient des « godillots » (2) qui votaient ce qu’on leur demandait de voter.
Quand on examine l’organisation actuelle de l’exécutif et ses rapports avec le légistatif, on trouve de grandes similitudes : les décisions sont prises par Nicolas Sarkozy avec ses conseillers, notamment le Secrétaire Général de la Présidence, Claude Guéant, qui remplit le rôle d’un Premier Ministre, ou un certain Alain Minc dont la seule légitimité est de conseiller, voire manipuler Nicolas Sarkozy.
Tous les ministres, y compris le premier, sont réduits à un état de quasi carpette et rendent compte de tout au Calife. C’est pire que sous de Gaulle quand la parole de Jean Louis Debré ou de Georges Pompidou était écoutée
C’est ainsi que le Président a un plan pour tout. Chaque jour ou presque, il fait un déplacement pour parler, devant un auditoire sélectionné, du métier d’infirmière comme du pêcheur de tourteau. Et il a fait voter ou entériner diverses pratiques, comme la nomination du Président de France Télévision : les députés, les sénateurs et le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel pourraient donner un avis consultatif défavorable que le Président pourrait, de toute façon, ne pas suivre. Et comme tout ce monde est à la botte… Aucun risque.
Il en est de même pour tous les sujets : c’est Sarkozy qui a rendu les derniers arbitrages sur la question des retraites, ce qui est du domaine du législatif. Les élus sont tenus à l’écart, non seulement de la politique étrangère, mais aussi de la politique économique et de la politique sociale.
Après quelques décennies de fonctionnement à peu près démocratiques des institutions, le temps du pouvoir personnel est revenu.
1- Union pour la Nouvelle République.
2- J’ignore comment est venu ce terme de « godillot ». J’ai trouvé une bonne définition (« Un godillot est ainsi un représentant élu du peuple qui va se présenter aux débats en séance parlementaire mais ne va participer que de façon mineure dans le seul objectif de voir voter par le législatif exactement ce que l’exécutif souhaite, au mépris de la séparation des pouvoirs établie par la Constitution. », jegpol.blogspot.com ).