Il est une donnée de la chronobiologie qu’on ne souligne pas suffisamment, c’est que le «bon» rythme n’est pas une domination de la biologie du sujet sur l’environnement, mais une adaptation réciproque. L’exemple des spéléologues privés de l’alternance des jours et des nuits et qui dérivent leur propre rythme nycthéméral l’illustre bien.Le sujet s’adapte toujours. C’est donc le coût de cette adaptation qui doit être étudié. L’organisation de la journée de nombres de skieurs qui s’alimentent mal, commencent tôt et sont fatigués a midi est stupide. J’ai pu montrer personnellement (sur 720 préadolescents) qu’en adaptant alimentation et horaires, on réduisait à zéro les accidents de ski.(1).
Il faut considérer avec suspicion, les études «l’opinion» de ceux qui «pensent» que 4 jours et demi d’école valent mieux que quatre. Il ne s’agit pas de «penser», mais de prouver par des études scientifiques sérieuses. Et il y en a beaucoup. De très sérieuses.
Il y a plusieurs choses qu’on peut affirmer, d’autres qui relèvent davantage de «l’opinion».
Le premier principe est qu’en matière d’apprentissage il y a, au moins, deux règles. On apprend bien des questions auxquelles on s’intéresse et il n’y a pas de relation entre la durée d’un apprentissage et la qualité de celui-ci. Ce n’est donc pas parce qu’on réduit la durée de la journée scolaire qu’on doit forcément rallonger l’année scolaire.
On commencera donc par mettre en pièces, cette aberrante journée de sept, voire de huit heures, des collégiens et des lycéens, suivie d’une ou deux (ou trois) heures de travail personnel à la maison (et l’on voudrait que les sujets restent calmes derrière leur table ! Même les adultes les plus concentrés ne le peuvent pas, sauf de façon exceptionnelle).
On continuera par examiner les méthodes pédagogiques afin de faire disparaître l’ennui. Considérable chantier qui implique d’évaluer les contenus tant dans leur volume que dans la manière de les présenter. Et qu’on formera les professeurs pour qu’ils soient motivants (qu’on le veuille ou non, les instituteurs Freinet (2) n’ennuient jamais longtemps les élèves).
Voici donc avancé l’effroyable carcan des programmes. Mais fondamental, car toute l’organisation scolaire est construite pour les faire passer. Cette révision des contenus est préalable et enverra au diable la mesquine comptabilité du temps scolaire. On enverra aussi au diable cette aberration du travail à la maison. Une lycéenne de première me disait qu’après sept heures de cours, deux de travail à la maison, une pour le repas de midi, deux heures matin et soir pour toilette, repas et divers éléments de la vie quotidienne, les journées sont perçues comme un tunnel.
Donc, la journée scolaire, proprement dite, est trop longue.
Donc, cette journée doit comprendre plus de temps de loisirs éducatifs : encadrés, car si c’est pour ajouter deux ou trois heures de télévision, ce sera pire que tout.
Donc, l’éducation consiste à prendre en charge les élèves au moins aussi longtemps qu’actuellement. Cette prise en charge sera globale : apprentissages, loisirs éducatifs et pas seulement le sport (il y a tant d’autres choses : activités manuelles et artistiques, théâtre, jardinage, éducation citoyenne, conduite auto, soutien scolaire individualisé, participation au travail associatif, voire activités utiles et rémunérées, etc., etc.). Car si l’on écourte la journée en laissant la bride sur le cou des élèves, que feront-ils de ce temps gagné : Trainer ? Télé ? Révision déchirante de la politique de restriction en moyens techniques et en matériel ! Mais autrement tout ne sera que poudre aux yeux !
Après avoir réglé l’affaire de la journée scolaire, on pourra s’intéresser à l’organisation des trimestres et des vacances. Mais on sent bien qu’on sera plus détendu.
Faut-il s’adapter aux différences de climat entre le Nord et le Sud du pays ? Certainement.
Faut-il tenir compte des demandes de loisirs familiaux qui ont des contraintes climatiques et retombées économiques comme le ski ? Certainement.
Faut-il garder des unités de vacances intermédiaires à deux semaines ? Evidemment oui, car il faut aussi une adaptation pour passer du rythme des journées scolaires à celui des journées de vacances. Et pour cela il faut du temps.
Peut-on réduire la durée des vacances d’été sans retombées complexes sur les loisirsfamiliaux et données économiques ? Certainement pas. Dans sa jeunesse, l’auteur ce ces lignes a joui de «grandes vacances» du 15 juillet au 30 septembre, puis du 1er Juillet au 30 septembre (fabuleux !). Seule contrepartie, pas de «petites» vacances à la Toussaint et en février. Il n’a pas souvenir que ce rythme l’ait traumatisé. Par contre, il y avait ces cours mortels avec certains professeurs mortels…
1-Rythme temporel dans un environnement de loisir sportif éducatif péri-scolaire, Communication, Congrès d’Ergonomie Scolaire, Toulouse, 20-22 octo¬bre 1988.
2- Voir http://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A9dagogie_Freinet
ou http://www.freinet.org/.