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L’année 2008 de la désolation: où est la révolte ?

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Que retiendront les générations futures de cette année 2008 ?

Rien de bien joli !

Voici que quelques esprits se croyant supérieurs ont inventé une roulette banquière mondiale dans laquelle ils se sont pris les pieds et le corps tout entier. Ils ont entraîné dans leur chute le monde entier, ruiné des millions de pauvres gens qui avaient placé leurs économies en vue de leur retraite ou pour se couvrir des mauvais jours. Ils ont provoqué la faillite de millions d’entreprises et mis des millions de personnes au chômage. Ils ont mystifié des milliers de gestionnaires d’organismes publics qui mettront des années à s’en relever.

Et croyez vous qu’ils baissent la tête ? Point. On peut être persuadés qu’ils coulent des jours tranquilles sous les cocotiers, hors de portée, autant que possible, des juridictions qui auraient velleités de les poursuivre.

Les états injectent quasiment à fond perdu des milliards qu’ils prennent dans des caisses vides, c’est à dire en endettant encore davantage les générations futures. Ces milliards viennent réconforter tous ces chevaliers d’industrie qui regardent encore avec arrogance ceux qu’ils ont dépouillés, pendant que le peuple peine à assurer son ordinaire dans les pays développés, à assurer sa survie dans les autres.

C’est tout juste si l’on s’en indigne… un peu.

En France, un pauvre déjanté du nom de Jérôme Kerviel, est poursuivi pour avoir fait perdre cinq milliards d’euros à une banque, en jouant, façon pousse mégot, le même jeu que les grands banquiers du monde jouaient en vraie grandeur.

A ce gigantesque brigandage, on a trouvé un nom. Pas celui des coupables. Ce serait trop joli. Non ! C’est la « crise ». C’est la  crise, madame, et par la crise votre pension se trouvera sensiblement diminuée. C’est la crise, monsieur, et vous n’aurez plus qu’à vendre à l’encan votre maison familiale laborieusement gagnée, mais dont vous ne pourrez plus honore les mensualités du crédit. C’est la crise, enfant qu’on ne peut soigner car tes parents ne peuvent pas payer. C’est la crise, c’est la crise mondiale, ouvriers, cultivateurs, employés, chômeurs, immigrés, SDF de tous les continent.

C’est la crise, peuple. Vous voyez, vous êtes pilé, vous êtes appauvri, vous êtes affamé, par les lois de l’ordre mondial du capitalisme et du libéralisme, système dans lequel une minorité se goinfre pendant que la majorité en chie.

Mais, peuple, où est ton indignation, où est ta révolte ?

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Notes d’économie politique  40 – 27 décembre 2008

Libéralisme et économie de marché: même combat

Certains croient pouvoir poser un distinguo entre économie de marché et libéralisme. Par exemple, certaines « motions » du Parti Socialiste voudraient pouvoir s’inscrire dans l’environnement mondial de l’économie de marché. C’est reconnaître la légitimité de la concurrence comme facteur de développement.

La « synthèse » se présenterait donc comme suit: le marché est dynamisant. Il incite à l’effort puisqu’on doit le prendre en compte tant dans les objectifs que dans les moyens. Par contre, certaines activités ne peuvent être développées au nom de l’interdiction ou la régulation du « fais ce que voudras » lorsqu’elle portent en germe une contradiction avec l’intéret général. C’est le libéralisme contrôlé, donc ce n’est plus le libéralisme.

Ce distinguo assez subtil est-il véritablement opérationnel ou n’est-ce pas un raionnement fumeux ? Dans Le Monde daté du 21 novembre 208, on trouve en page 3 un article de Sylvain Cypel intitulé Le crépuscule de l’automobile américaine. L’argumentaire général peut être résumé de la façon suivante : aux USA, à l’opposé de ce qui est en Europe, par exemple, les dérivés du pétrole sont restés bon marché. L’absence de taxe n’a pas pu empêcher la montée du prix du litre d’essence à la pompe quant le prix du baril montait. Mais, au final, le prix payé par l’automobiliste restait bien inférieur à ce que payait un français ou un espagnol.

 

 

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Du coup, les constructeurs américains, jusqu’à ces derniers temps, n’ont absolument pas investi dans l’économie de carburant. Ils ont continué à produire de grandes berlines, de gros 4×4 et de gras et gourmands pick-up. Pendant ce temps, les européens et les asiatiques concevaient les modèles que nous connaissons et pénétraient de façon importante le marché des U.S.A.. Et lorsqu’au jours présents le client américain se met à rechercher, pour des raisons économiques, civiques et écologiques des véhicules moins gourmands, ni Ford, ni General Motors, ni Chrysler n’ont eu de modèles à proposer.

Et l’on est frappé de lire, dans l’article, cette citation de David Cole, fils d’un ancien P.D.G. de General Motors, défendant les constructeurs nationaux: « Dans une économie de marché, on ne peut blâmer des entrepreneurs d’être allés là où était le profit. Si faute il y a eu c’est celle des gouvernants ». ce qui revient somme toute à dire: excusez-nous d’être aussi profondément immatures. C’est parce que vous nous avez mal éduqués. Voilà qui, au moins, a l’avantage d’une grande sincérité : le contenu de la citation montre autant d’immaturité que le comportement qu’elle commente. On en revient toujours aux mêmes questions. La seule recherche du profit et, il faut aussi le dire, du profit maximal, est le seul moteur de cette économie. Point de politique industrielle. Tout et tout de suite. Et quand les choses vont mal, on se retourne vers la puissance publique pour demander de l’aide en mettant en balance des milliers de pertes d’emplois. Sans vergogne.

On en revient toujours là.

Notes d’économie politique  39 – 25 novembre 2008

Lire un commentaire: ICI

 

Le génocide et l’individualisme

Je regardais une rediffusion d' »Holocauste » sur la chaîne Histoire. Et voici de nouveau posée cette éternelle question: comment peut-on comprendre que des millions de juifs aient pu ainsi être assassinés sans pratiquement aucune résistance.
Le film montre de façon rapide le soulèvement du ghetto de Varsovie et l’étonnement des participants de constater qu’ils peuvent, même avec peu d’armes, causer des dommages à l’adversaire dès lors qu’ils son un peu groupés et organisés. Mais, au fond, ils savent bien qu’ils finiront vaincus notamment parce qu’ils ne sont pas assez nombreux.
Plus tard, est montrée, un peu sommairement, il est vrai, l’évasion du camp de Sobibor. Cette évasion a ceci de spectaculaire, c’est qu’elle est massive. Mais c’est ce nombre qui en fait la force et la réussite. La puissance de feu des gardiens n’est pas suffisante à la fois pour s’opposer aux armes, pourtant inférieures en nombre, des évadés et abattre tous ceux qui courent vers la sortie.
Ce qui fait la force de cette évasion, c’est évidemment le nombre, mais aussi le fait qu’elle réussit au prix du sacrifice d’un certain nombre de candidats à la liberté. A vrai dire, ce ne sont pas des individus qui s’évadent, mais une espèce qui survivra simplement parce qu’un nombre suffisant sera épargné.
Le contraste est grand avec tous ceux qu’on conduit résignés à l’abattoir. Mais alors pourquoi ne se soulèvent-ils pas en masse comme les prisonniers de Sobibor ?
Il y a, de mon point de vue, deux facteurs.
Le premier est l’absence totale d’organisation collective telle que serait un parti, une association ou un syndicat, par exemple. C’est ainsi que le parti communiste fut un élément structurant de la résistance française aux nazis, même s’il ne fut pas le seul. Le noyau structurant permet l’agrégation d’éléments auparavant isolés: ainsi se développent peu à peu groupes de résistance ou de partisans. Mais les membres découvrent vite que la survie du groupe transcende la survie individuelle. Il devient évident, comme à Sobibor, que tous ne survivront pas.
Le deuxième facteur est corollaire du précédent: c’est l’individualisme. Quand les personnes soumises aux arrestations imaginent leur salut individuel, elles n’en trouvent naturellement aucun, tant le rapport de force est en leur défaveur. Il ne reste plus qu’à espérer l’improbable qui ne survient naturellement pas. Alors qu’il eût suffi que des centaines de déportés se jettent sur leurs gardiens avant de monter dans les trains pour que l’évasion soit possible, au prix, naturellement d’un certain nombre de victimes. On sait bien qu’il y eut quelques spectaculaires manifestations d’isolés qui périrent et n’entrainèrent pas un ensemble suffisant d’individus qui ne constituaient pas une collectivité.
Mais il ne suffit pas de croire que « l’union fait la force ». La force de l’union vient de ce que chaque membre est disposé au sacrifice pour la collectivité. Cette union sacrée peut naître de l’idéologie commune. Elle peut découler aussi du désespoir commun.
Ceux qui nous gouvernent et pillent les richesses du monde prennent bien soin de ne pas désespérer trop de citoyens.

 

Notes d’économie politique  38 – 1er novembre 2008

Crise: 14 mesures pour que cela ne se reproduise plus !

Dans le supplément « Économie » du numéro du journal Le Monde daté du mardi 28 octobre 2008, 14 mesures sont présentées pour « réguler le capitalisme financier ».
Je rappelle la liste de ces mesures ci-dessous, mais je ne les détaillerai pas renvoyant mon lecteur au quotidien.
Je voudrais simplement faire remarquer qu’elles sont totalement anti libérales. Elles visent à encadrer et contrôler l’activité des organismes financiers, à interdire certaines pratiques et certaines prises de risques. Elles visent aussi à développer la régulation et le contrôle international.
On n’aura aucun mal à obtenir l’adhésion à ces mesures de toute personne raisonnable et sensée qui ne considère pas les activités financières comme une partie de poker mais comme un levier du développement mondial. Voici donc un excellent exemple de ce que peut être une économie administrée destinée à protéger les citoyens et déterminer les règles d’une activité profitable pour la collectivité.
Les 14 mesures:
1. Encadrer la titrisation
2. Taxer les marchés de gré à gré
3. Améliorer la législation Sur l’attribution des crédits
4. Réglementer les fonds spéculatifs et le capital-investissement
5. Conforter le contrôle interne
6. Limiter les bonus et les golden rémunérations
7. Revoir les normes comptables
8. Etendre la lutte contre l’inflation à l’immobilier et à la bourse
9. Interdire la spéculation aux banques de dépôt
10. Renforcer le Fonds Monétaire International
11. Limiter la volatilité des monnaies
12. Augmenter le pouvoir des autorités de régulation
13. Relancer la coopération contre les places offshore
14. Encadrer les agences de notation

Notes d’économie politique  37 – 1er novembre 2008

Crise: des millions de victimes innocentes, il faut un Tribunal Pénal International

On sait maintenant que la crise ne sera pas que boursière. Elle accompagne ou amplifie un mouvement de récession dont il n’est pas certain qu’elle soit la cause, car il n’est pas interdit de supposer que le mouvement de récession se soit amorcé de façon indépendante. Mais, au jour d’aujourd’hui, l’effet boule de neige est là. Et cet effet est encore amplifié par la couardise des milieux boursiers qui, au lieu de faire la part des choses et ne réajuster que ce qui mérite de l’être, réagissent de manière infantile et irréfléchie. A moins que, hypothèse d’un machiavélisme plus grand encore, l’ordre du jour ne soit à la spéculation frénétique à la baisse en espérant « se refaire » en achetant à vil prix et en espérant aussi n’être pas le dindon.

Mais, en tout cas, et au final, tout ceci se traduit par une perte de revenus, voire d’une perte d’emploi, pour des millions de gens à qui l’on présente la crise comme on le ferait des mouvements de la marée, comme si c’était inexorable et non modifiable, comme si c’était volonté divine d’un dieu malveillant ou comme si c’était « la faute à personne ».

Or, la faute est bien à un groupe de gens qui ne sont guère plus d’une poignée à l’échelle de l’humanité et qui se sont emparé du pouvoir économique sur le monde pour s’enfler du phallus et des comptes offshore dans ce qu’on nomme « paradis » fiscaux. Et même si ceux-ci, de méprisante façon, ne reconnaissent pas leur faute, on n’entend pas dire qu’ils soient le moins du monde inquiétés par les puissances d’état. Leurs ennuis se limitent, au maximum, à la perte d’un parachute doré et même pas à la perte de valeur de leurs stock-options, car ils ont vendu fort à propos, ce qui n’aurait jamais été que la nième couche de leur tas d’or.

En d’autres temps, on était moins indulgent envers les profiteurs. Au Far West, on les eut couverts de goudron et de plumes. Et ceux qui furent poursuivis, en France, pour marché noir, en 1945, n’avaient pas touché le millième de ce que ces arrogants parrains ont engrangé.

Il semblerait quand même légitime que la justice passe. Au moins qu’on les dépouille de la plus grande part de leurs biens pour secourir ceux que leur impéritie a conduit et va conduire au désespoir. Il y a tous ceux, dans le monde occidental qui vont se retrouver au chômage. Il y a tous ceux dans le Tiers Monde, pire encore, qui ne pourront manger à leur faim. Il y a tous ceux qui y perdront la vie de désespoir ou de disette. Car même ceux qui ont souscrits à des emprunts irréalistes ne sont jamais coupables que de s’être fait embobiner par des intermédiaires incompétents et avides de profit

Il est pas impossible que le nombre de victimes soit plus élevé que ne le furent celles de la Yougoslavie. Alors, qu’attend-on pour constituer un Tribunal Pénal International pour juger des crimes économiques qui ont conduit les citoyens de la planète à un tel désastre ?

Dans une société « normale », où subsisterait un peu de morale, il faut reconnaître ses fautes, mais aussi les réparer. On attend…

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Notes d’économie politique  36 – 28 octobre 2008

L’Islande, la crise et la consommation

carte_islande.1224888076.jpgSi les soixante-huitards dont je fais partie, consomment tout en continuant à critiquer la société de consommation, ils commencent à se trouver un peu seul. Car la consommation est devenue envahissante et peu critiquée. L’examen des caddies aux caisses des supermarchés, notamment le premier samedi du mois, après la paye, en donne témoignage. Y figurent des produits de peu d’intérêt sur le plan nutritif, voire organoleptique, et qui ne sont venus là que parce que la publicité les y a conduits.

 

Il y a d’ailleurs quelque chose de totalement surprenant quand on constate que des sites Internet, des journaux et des chaînes de  télévision puissent être totalement financés par la publicité. Car il faut bien, au final, que les annonceurs de TF1 se rattrapent quelque part. Et la publicité a ceci d’odieux, c’est qu’elle est le plus souvent mensongère en présentant comme nouveaux ce qui ne l’est pas (ou si peu), en présentant des vertus qui n’existent pas (ou si peu). Ainsi a-t-on inventé le verbe mincir pour parler des produits qui ne faisaient pas maigrir !

 

Les Islandais ont consommé comme des malades.

 

Pendant très longtemps, les hommes n’ont consommé que ce qu’ils produisaient. Et les cultures agricoles fournissaient la nourriture, les forêts le bois de chauffage ou de construction, les carrières, les pierres, la pêche, les poissons, etc., etc.. Ils consommaient aussi ce qu’ils volaient comme le faisaient les rois en levant l’impôt. Et si les rois s’endettaient, au moins le peuple plus sage, ou contraint de l’être, s’endettait peu.

 

La société de consommation a changé tout cela. Et le peuple de Zola qui s’endettait pour payer son pain, s’est mis, désormais repu, à s’endetter pour tout et n’importe quoi. Et c’est devenu d’autant plus facile que tout le monde y trouve son compte: le vendeur qui vend et le préteur qui prête. Souvent d’ailleurs, ils font partie de la même bande et le guichet du crédit voisine à trois mètres la caisse. Je me souviens d’un vendeur de Conforama, prêt à baisser son prix, pour autant que j’achête à crédit, la commission de la société de crédit venant compenser le manque à gagner de la vente.

 

Et puis on a inventé la ligne de crédit « revolving », la ligne de crédit ouverte à un taux quasi usuraire…

 

Les islandais ont emprunté comme des malades.

 

L’Islande se trouvait disposer d’une monnaie un peu surévaluée. Allez savoir pourquoi. Donc on empruntait en euros ce qui offrait des taux de crédit plus réduits. Ainsi, les islandais ont emprunté 5 fois leur PNB. Pour rembourser, il leur faudra travailler 5 ans sans toucher un rotin ! Et en même temps, leurs banquiers, aussi cons que les autres, leur vendaient des actifs pourris, pour placer leurs faibles économies ou pour constituer un capital pour la vieillesse.

 

Et, compte tenu de la petitesse des banques islandaises, elle se sont cassé la figure parmi les première. La couronne islandaise s’est complètement écrabouillée et les emprunts en euros sont devenus horriblement cher en même temps que les valeurs pourries s’effondraient entraînant tout le reste.

 

Les islandais endettés jusqu’au cou et sans doute au delà, sont maintenant dans la fosse septique !

 

Cherchons les coupables.

 

L’état évidemment qui a totalement manqué à son rôle protecteur et régulateur, comme partout ailleurs. Les banques vendant n’importe quoi comme partout ailleurs. Et les organismes de crédit vendant du crédit encore plus qu’ailleurs.

 

Le cas de l’Islande n’est pas et ne sera pas le seul. Nous allons probablement constater que la société scandinave doit sa relative paix sociale et politique a sa compromission avec la société de consommation. Du coup, le modèle risque d’être moins modèle qu’il n’y paraissait.

 

Le cas de l’Islande ouvre la voie de l’analyse de la crise. Il ne suffit pas de clamer qu’on va réformer le capitalisme, car les acteurs de cette catastrophe sont très nombreux et dispersés. Il n’y a pas que les banques, puisque c’est toute la chaîne de production, de vente et d’offre de consommation qui est concernée. Nous devons donc continuer notre analyse pour continuer à montrer que toutes les structures de production et de commercialisation se sont trouvées unies pour s’embarquer sur ce navire, y compris les pouvoirs politiques complices par ignorance, ou bêtise, ou par esprit de système d’hostilité envers toutes les formes d’organisation coopératives. Et lorsqu’on continue, par exemple, à vouloir valoriser les retraites par capitalisation, on est complice. Que valent aujourd’hui les retraites des islandais ? Vaut-il mieux que les générations à venir payent la note des retraites de leurs parents ou remboursent les crédits que ces derniers ont exagérément souscrits ? Sans compter l’injustice sociale, car on sait bien que l’impact sur les grandes richesses sera bien moins fort. Car ce n’est pas aussi dur de perdre 50% de 100000 euros que 50% de 1000 euros.

 

P.S.: Quelle est la monnaie islandaise ? le 4×4 !

 

Notes d’économie politique  35 – 25 octobre 2008

C’est la fin du capitalisme

Un excellent article paru dans Le Monde du 11/10/2008 présente un entretien avec Immanuel Wallerstein , présenté comme suit:

Signataire du manifeste du Forum social de Porto Alegre (« Douze propositions pour un autre monde possible »), en 2005, vous êtes considéré comme l’un des inspirateurs du mouvement altermondialiste. Vous avez fondé et dirigé le Centre Fernand-Braudel pour l’étude de l’économie des systèmes historiques et des civilisations de l’université de l’Etat de New York, à Binghamton.

L’interviewé explique comment le capitalisme qui a pris le relais de la société féodale aux XVème-XVIème siècles en est arrivé à cette voracité financière et cet aveuglement. Et ce qui est probablement sa fin.

On pourrait ajouter qu’il est probable que les citoyens n’ont pas été autant informés au cours des crises similaires précédentes. Les moyens de communication de 1929 n’avaient évidemment rien à voir. Et les relais médiatiques, qui ne manquent pas désormais, permettent à chacun de comprendre et, s’il ne comprend pas tout, de chiffrer. Il s’étonne que même si « les caisses sont vides », il soit possible de mobiliser des millions, voire des milliards. On lui explique alors que ce ne sont que des emprunts ou des garanties et qu’on retrouvera un jour tout… ou partie. Et là, il sait bien que son Trésor, le Trésor Public, devrait y laisser des plumes. Sauf peut-être à bien manager la créance. Au fond, devenir actionnaire et siéger dans les conseils d’administration.

On peut penser aussi que les représentants du peuple seront vigilants, car les cloches de leurs électeurs vont tinter à leurs oreilles. En France, les électeurs de gauche, n’en doutons pas, et même les électeurs de droite qui n’ignorent pas ce qu’aurait fait leur référent, le Général de Gaulle. Qu’on le veuille ou non, cette pression populaire existera. Au moins pendant quelques années. Personnellement, je regretterai qu’on ne soit pas encore entré dans l’économie administrée, mais au moins ce sera l’économie surveillée.

On voudrait pouvoir espérer, comme le suggère Wallerstein, qu’on pourrait entrer dans une nouvelle forme de développement. Les citoyens sont clairement favorables à ce que la question de la répartition des richesses soit posée. Ils sont également sensibles à la question de la modification des modèles de développement en relation avec la nécessaire économie de moyens de la planète.

C’est là où une administration doit intervenir. Voilà un Fond Monétaire International étonnamment muet pendant cette période qui pourrait bien faire l’effort de s’investir dans le développement durable. Par exemple, tous les pays qui se trouvent entre les deux tropiques ont tout ce qu’il faut pour développer l’énergie solaire et recevoir les bénéfices qui en découleront. Mais ceci n’est possible qu’en jugulant la corruption dans nombre de ces pays qui canalise la richesse vers un petit nombre. Ce qui veut dire qu’il faut aussi administrer cela et mettre son nez dans ce qu’on a coutume de considérer comme du seul ressort des dirigeants de l’état considéré.

Les « puissances » ont donc là une grande responsabilité: aider au développement raisonné tout en contrôlant l’usage qui est fait des transferts de technologie et d’ingenierie. Un ingérence est donc nécessaire dont, jusqu’à présent, elles ont été bien peu capables ou bien peu volontaires. Il est grand temps que cela cesse.

Notes d’économie politique 34 – 14 octobre 2008

Crise financière: des gouvernants impuissants !

La lecture de la presse, de la bonne presse, l’écoute de la radio, de la bonne radio, la consultation des sites Internet, des bons sites, donne une impression générale: les gouvernants se montrent impuissants devant la crise financière. Pire, on a le sentiment que les mesures prises, ici et là, n’ont qu’une influence faible, nulle ou contraire. ainsi, toutes les sommes injectées ou en cours d’injection par le Trésor Américain ne semblent pas porter le moindre fruit.

Il est aussi vrai qu’ici et là, chacun y va de ses mesures ou de ses promesses nationales. Les européens, en la circonstance, ont fait preuve, jusqu’à ce jour, d’une absence de solidarité remarquable. Ces discordances sont, à juste titre, interprétées comme elles doivent l’être: s’il y avait une méthode permettant à coup sûr de sortir de là, cela se saurait. ce qui veut dire que nos gouvernants en sont ignorants et impuissants.

Et, malgré leurs rodomontades, la preuve s’en confirme chaque jour. Si les bourses baissent encore malgré le climat entretenu par le monde politique, c’est simplement parce que les boursiers spéculent maintenant à la baisse. Ces gens-là n’ont pas de scrupules. Ils sont en train de se refaire par des ventes importantes qui vont baisser les cours (à se demander s’ils ne sont pas complices) afin de racheter au plus bas pour retrouver son petit tas d’argent lorsque ça remontera.

Ceci démontre clairement que les règles, ou plutôt l’absence de règles, du monde boursier et capitaliste résistent aux pires cataclysmes.

Notes d’économie politique 33 – 12 octobre 2008

Retraites à ne pas confier au « Capital »

Aux USA, il n’y a pas de véritable système de retraite par répartition comme cela existe en France et dans d’autres pays d’Europe. Et dans ces derniers, la tendance est de restreindre l aresponsabilité des régimes obligatoires au bénéfices de systèmes de capitalisation offert par des opérateurs privés. Ces opérateurs, les fameux « Fonds de Pension » américains, placent les dépôts de leurs clients en Bourse afin de les faire fructifier au mieux.

L’inconvénient est évidemment, que ces placements vont souffrir des alea de la conjoncture économique.

Dans les évènements que nous vivons ces mois-ci, aucun fond de pension n’a encore avoué la baisse de ses rendements voire ses pertes. Pourtant rien ne dit qu’ils n’aient pas placé une partie de leurs avoirs sur des outils financiers incertains qui ont cours ces temps-ci.

C’est là toute l’incohérence et toute la contradiction d’un système qui incide à placer son argent pour préserver son avenir dans des fonds dont la sécurité n’est pas garanti.

Il est donc indispensable que les fonds de pension soient gérés dans des conditions de sécurité suffisantes, ce que , seul, l’état peut faire. On peut imaginer, au pire, une structure d’économie mixte. mais en tout état de cause, il est indispensable de sécuriser et garantir. A défaut de garantie par l’état, une administration et un contrôle majoritaire par les usagers et les clients s’avèrera indispensable. Ceux-ci pourront également choisir les placements en fonction de leurs intérêts personnels ou sociaux.

Notes d’économie politique 32 – 8 octobre 2008

Après la crise…

Au cours de cette crise financière, on a parfois le sentiment que nombre de libéraux repentis sont devenus marxistes… ou presque. Car on constate, évidemment, que certaines analyses de l’auteur du Capital s’appliquent bien à la situation actuelle. Loin de moi l’idée d’en revenir à un marxisme du XIXème siècle. Mais il est vrai que, d’une certaine façon, l’oeuvre de Karl Marx est prémonitoire. On regrettera naturellement que l’application qu’en ont fait les Bolchéviques n’en ait été qu’une singerie tragique mêlée d’ambitions et de désir du pouvoir.

Il est probable aussi que la règle du laisser-faire comptant sur la régulation de marché n’est plus acceptable.  Elle est probablement efficace, mais les dégâts collatéraux sont tellement gigantesques qu’on ne peut l’accepter. Il est donc probable, et souhaitable, que nous entrons désormais dans une période d’économie administrée, même aux USA, car il n’est plus imaginable que l’argent du contribuable continue de venir en aide aux capitalistes déliquescents. Ce qui va poser diverses questions.

La première concerne l’étendue des nationalisations en cours, ce que l’état conservera et le mode de ces nationalisations. Seront-ce des acquisitions globales ou des prises de participation majoritaires ? Devra-t-on avoir encore des entreprises nationales ou plutôt des systèmes d’économie mixte. La notion d’entreprise contrôlée par l’état doit-elle ne concerner que les banques qui viennent d’être sauvées par l’intervention des fonds publics ? Ou doit-on en profiter pour réexaminer l’étendue du contrôle ?

La deuxième concerne le rôle et le fonctionnement des instruments financiers. Aux origines, les bourses ou ce qui en tenait lieu, ont été conçues pour drainer l’épargne vers l’investissement industriel ou commercial et déterminer la valeur des entreprises concernées. Cet outil, dès lors qu’il est sainement employé, notamment pour recueillir des capitaux privés, est donc indispensable. On peut naturellement discuter de la forme: actions ou obligations, par exemple, ou tout autre moyen. Par contre, il est indispensable de juguler la spéculation. Car la spéculation ne repose sur rien de concret, sinon sur une notion, dont plus personne ne se fait défenseur, qui est celle de la « création de valeur ».

La troisième concerne les acteurs du développement que sont les ouvriers et les salariés.  Hormis un juste salaire, faut-il encore promouvoir les  formes de participation ou d’intéressement autant pour motiver que pour récompenser l’effort accompli ?

Ceci induit la quatrième question qui est celle de l’évolution du statut des entreprises. Car l’idée de participation ou d’intéressement débouche sur celle de l’actionnariat ouvrier qui, elle-même, débouche sur des structures d’entreprises participatives voire contrôlées en majorité par les salariés, c’est à dire des structures mutuelles ou coopératives.

L’opportunité est offerte de « refaire le monde ». Il serait bon qu’on ne laisse pas passer cette occasion.

Notes d’économie politique 31 – 2 octobre 2008