Catégorie dans 02-Notes d’économie politique

Les politiques et le rapport à l’argent

J’ai connu un maire d’une ville moyenne qui était pharmacien. On disait qu’il gérait sa ville un peu comme son officine. Les dépenses étaient raisonnées. Comme tout maire de gauche, la priorité était donnée au social. Des moyens pour des crèches, des moyens pour des associations sportives ou culturelles, des moyens pour la construction de logements H.L.M.. Et peu de dépenses somptueuses. La voirie aurait pu être plus lisse, les fêtes de Noël plus brillantes, les impôts locaux plus élevés.
Certes, il lui est arrivé de se laisser prendre (on verra plus loin à quoi). Mais, grosso-modo, c’était une gestion comme une famille ou un commerçant qui sait qu’il ne peut dépenser beaucoup plus qu’il ne gagne, sauf à s’endetter de façon déraisonnable.
Dans la gestion d’un budget public ou d’entreprise, la notion de choix et de priorité prend une dimension particulière : l’argent n’est pas produit par le travail de celui, celles ou ceux qui ont la charge de le dépenser. Pour le coup, la relation entre recettes et dépenses est moins ténue. Il arrive souvent, aussi, que le budget soit très considérable et que l’échelle des valeurs se fausse : dépense cent euros de plus ou de moins, à l’échelon du budget d’une ville, n’a pas le même impact qu’à celui d’un budget familial.
Dans de telles circonstances, même des citoyens très honnêtes peuvent n’avoir plus les mêmes automatismes. Même les présidents d’associations le savent. On se laissera aller à prendre des billets de première classe pour arriver « reposé » à une réunion. On prendra ses repas dans un bon restaurant plutôt qu’un autre, plus modeste. On s’offrira un Blackberry…
Appliquer ce principe à des responsables de budgets importants, de villes, de régions, à des élus, à des députés, à des ministres, voire à des présidents, et les conséquences seront onéreuses.
Ces jours-ci, on dépense des sommes considérables pour assurer la sécurité de la réunion des membres du G20. Était-ce vraiment légitime pour une session qui va prôner l’austérité ?
Les ministres ont-ils toujours besoin d’autant de conseillers bien rémunérés ?
Est-il indispensable de prendre un jet privé pour aller ici ou là ?
Ne peut-on pas organiser des déjeuners de travail au bistrot du coin qui a peut-être une salle disponible ?
On n’en a même pas l’idée…

Un an ou deux après la venue de la gauche au pouvoir en 1981, on me confiait que des conseillers ministériels issus du syndicalisme ne pouvaient plus, de bonne foi, déjeuner à moins de 200 francs (à l’époque, c’était une somme !).
Pourtant, tous ces gens ne sont pas des prévaricateurs. Simplement, la source de l’argent devient « irréelle ».

Le personnel politique français est mal éduqué. Il devrait prendre exemple sur les Scandinaves qui n’oseraient pas acheter un cigare sur les fonds publics.
L’exemple vient d’en haut. Évidemment. Et le cumul des mandats y contribue. Plus on est élu et plus longtemps, plus on est dans les nuages et plus on perd la notion de l’argent

Changer celà ? Vous rêvez.

Notes d’économie politique 50 – 28 juin 2010

Retraites : faire porter la charge sur tous les revenus générés par le travail

Revenons un peu sur la question des retraites. A cette occasion, osons poser la question de ce que les citoyens attendent d’un état ? En premier lieu, certainement la sécurité. Autrefois, on attendant du roi et du seigneur qu’ils défendent le peuple contre les brigands et les pillards tout en assurant la nourriture au fil des jours et des saisons.

Dans l’état moderne, la différence n’est pas si grande. Il suffit de lire ou d’écouter les revendications des défilés. Le peuple attend du travail pour vivre décemment. Il attend d’être protégé des guerres économiques. Il attend d’être protégé le mieux possible de la maladie et de pouvoir payer les soins. Il attend de pouvoir bénéficier d’une pension raisonnable quand l’âge de la retraite sera venue.

Pour ce qui est du travail, on espère que celui-ci sera « fourni » par les institutions et le monde industriel et commercial ou de disposer des facilités pour créer soi-même son entreprise. Avec l’avènement du libéralisme, on attend aussi que la fonction de protection de l’état s’ étende à la régulation des rapports employeur-employé et à la protection des salariés. Depuis toujours, les rapports entre celui qui pouvait procurer du travail et celui qui pouvait l’effectuer ont toujours pris la forme d’un rapport de forces dans lequel le salarié était en position inférieure. La révolution industrielle et capitaliste n’a rien changé à cela, bien au contraire.

Quand l’entreprise vend un produit, son prix est déterminé par divers composants : le coût des  matériaux et des charges diverses, le coût du travail, les impôts et taxes, le bénéfice qui se répartit entre l’entreprise et les actionnaires. Certains éléments sont peu compressibles comme le coût des matériaux et des charges et les impôts. Et c’est le travail des salariés qui fournit tout le reste : salaires, bénéfices, dividendes. Le travail des salariés est donc rémunéré bien en dessous de sa vraie valeur.

La question de la légitimité de cette différence que le Marxisme nomme « plus-value » mérite d’être posée.

Je voudrais ici proposer un exemple. C’est celui d’une entreprise de services informatiques qui a commencé avec 3 personnes : le patron (celui qui possédait le capital, minuscule en ces débuts-là) et deux salariés qui contribuaient presque jours et nuits à l’essor de cette affaire qui, au fil des années devint florissante. En moins de 20 ans les effectifs furent multipliés par 15 et le chiffre d’affaire progressa dans une plus grande mesure encore. Le patron se rémunérait sur les bénéfices. Les salariés avaient leurs salaires… convenables. Un jour, le patron décida de vendre. Il fit une plus-value extraordinaire, cent fois supérieure à ce qu’aurait donné la seule inflation. En fait, il vendit son propre capital, son travail, mais aussi une large part de celui des salariés pour laquelle ils n’avaient pas reçu salaire.

Quand on s’intéresse au financement des retraites, il faut porter attention sur cette part du produit du travail qui n’est pas retournée aux salariés. On a pris le parti, en France d’asseoir les cotisations sur les salaires et les seuls salaires. La légitimité de cette « cotisation » est complexe puisque les cotisants financent les retraites des retraités présents. Ce n’est donc pas une véritable cotisation qui serait placée et retournée ultérieurement à l’intéressé sous forme de pension.

Or, choisir le système de la répartition entraîne deux conséquences : tout d’abord le système est irréversible, car il ne serait pas imaginable de cotiser pour sa pension future tout en finançant les retraites dans le présent. La deuxième est qu’en dépersonnalisant les cotisations, puisqu’on ne cotise pas pour son futur personnel, on n’a finalement que décidé d’un droit à la retraite, financé par une contribution assise sur les salaires présents. La différence d’avec un impôt n’est pas très grande. On peut même dire qu’elle est quasi nulle.

Si l’on ne veut pas financer les retraites par l’impôt, ce qui ne serait peut-être absolument légitime, on pourrait alors accepter l’idée qu’il doive exister une relation entre le travail et la retraite. Mais on peut aussi, très légitimement affirmer que l’assiette ne soit pas seulement le salaire versé, mais aussi toutes les plus values qui ont été générées par ce travail : bénéfices, dividendes, plus values boursières. Alors, la question du financement des retraites devient triviale si les cotisations sont assises, non seulement sur les salaires, mais aussi tous les profits que le travail du salarié génère.

Dans sa fonction de protection, comme décrite ci-dessus, l’état devrait imposer cette disposition légitime. Et qui a un sens. Pourquoi ne le fait-il pas ?

Notes d’économie politique 49 – 16 juin 2010

Retraites : qui doit payer ?

On aurait pu considérer le financement des retraites comme une forme d’assurance, chacun économisant ou plaçant de façon à disposer d’un revenu au moment opportun. Ce que certains font parce qu’ils ont les moyens de le faire. Mais d’autres ne le peuvent pas. Et quand le législateur a voté pour les retraites par répartition en décidant que les actifs financeraient les retraites des plus anciens, il a choisi une toute autre voie, de surcroît non réversible. Passer à la retraite par capitalisation serait obliger une ou deux générations à financer deux fois : la retraite des plus anciens et leur retraite personnelle.

La voie de la répartition n’a pas été choisie par hasard : la retraite par capitalisation excluait ceux qui étaient trop vieux pour y parvenir.

Ce faisant, les cotisations des uns finançant les retraites des autres, il fallait bien un garant de l’avenir. Evidemment, seul l’état pouvait l’être. Et quoique nos gouvernants prétendent, ils ont hérités de ce rôle, sans le vouloir probablement. Mais la réalité de cette garantie est là et il faut l’assumer : c’est l’Etat qui est garant des retraites. En demandant aux uns de financer les retraites des autres, c’était implicitement reconnaître le droit, pour chacun, d’être, à son tour traité de la même façon.

Simplement, le législateur s’est trompé en faisant reposer l’assiette des cotisations sur les salaires et non sur la richesse générée par le travail, comme il aurait dû le faire.

Le P.I.B. est le fruit du travail de chacun, mais ce travail n’est pas toujours autant producteur de richesses, non parce qu’il y a des travailleurs plus paresseux que d’autres, mais simplement parce que le travail n’étant plus strictement manuel, l’appareillage associé à ce dernier peut créer des profits différents. C’est comme si l’on disait que conduire un camion produit le même fruit que conduire une camionnette. La pénibilité peut être comparable, mais le volume transporté n’est pas le même… Ainsi, peut-on, sur de multiples exemples, montrer que le produit du travail n’est pas proportionnel au salaire censé le compenser, même à niveau de qualification égale.

La richesse étant produite par le travail, c’est donc, logiquement, sur cette plus value qu’il faut  faire reposer les cotisations, mais non sur le salaire proprement dit. En d’autres termes, plus le profit retiré de l’activité d’un salarié ou d’un acteur économique est grand, plus la contribution au financement des retraites doit être élevé. Sans épargner l’enrichissement sans cause qui devrait logiquement être infiniment taxé

Notes d’économie politique 48 – 1er Juin 2010

Le peuple grec dépossédé de ses droits

grece.1273160922.JPGLa « faillite » grecque est l’exemple absolu d’un désastre provoqué par un système économique non administré.

Le premier acte est l’économie débridée, au sens du libéralisme sauvage et du laisser faire n’importe quoi. Les affaires vont à tout va avec un contrôle politique faible. Une grande partie des profits sont détournés dans une économie parallèle contre laquelle on ne lutte pas et dont le budget national ne profite en aucune façon. L’investissement se dirige vers le profit à court terme. Les politiques ne contrôlent rien, voire profitent de la situation. Le budget de l’état est en perpétuel déficit puisque les rentrées d’argent  sont insuffisantes du fait de la fraude et des échappatoires fiscales. La situation économique est chroniquement mauvaise. Des avantages sociaux exagérés sont maintenus : âge de la retraite précoce, par exemple, d’autant plus intéressant qu’on peut alors cumuler la pension et emploi au noir.  La situation financière ne tient que par une chaîne d’emprunts qui se succèdent pour rembourser les emprunts qui arrivent à échéance. La corruption fait partie du spectacle national et il n’est pas exclu que les politiques en profitent.

Pour tout dire, il n’y a guère d’état. L’économie n’est pas administrée.

L’acte deux est celui de la « crise ». Le pouvoir politique qui est faible ne peut que contempler la situation et son évolution. Le mécontentement populaire croit. L’économie parallèle continue de ronger les ressources de l’état. Pire encore, puisque le nombre de chômeurs augmentant, c’est augmenter en même temps le nombre potentiel de travailleurs « au noir ». Pour sauvegarder les apparences, le pouvoir politique continue d’emprunter. Cela devient une chaîne de Ponzi. Pour trouver des créanciers, les gouvernants en sont réduits à mentir sur la situation financière. Le pouvoir essaie de freiner un peu les rémunérations, surtout celles des fonctionnaires sur lesquelles il peut agir, ce qui lui est le plus facile, ce qui crée des difficultés sociales. Pour perdurer aux affaires, il est contraint de céder sur de nombreuses lignes. En même temps, les institutions et les personnes qui profitent de la situation ne souffrent que peu. Quand il est question de diminuer les rémunérations des fonctionnaires, on n’imagine pas  diminuer celles des députés ou des ministre

L’acte trois est celui de l’inévitable faillite. D’abord en partie dissimulée, puis elle éclate au grand jour avec d’autant plus d’éclat. Pour le coup, les institutions financières qui ont bien profité de la situation  en prêtant à des taux déjà substantiels, prennent peur et augmentent leurs taux dans des proportions énormes. Ce sont les mêmes institutions qui proposaient d’une main des produits toxiques et qui, de l’autre, se montraient très sourcilleuses lorsque ces « produits » devenaient calamités, comme toutes les banques l’ont fait dans le monde entier.

Autrefois, la Grèce aurait dévalué sa monnaie comme on faisait alors : le taux en aurait été mesuré pour ne pas trop pénaliser les organismes prêteurs qui auraient continuer à gagner. A gagner moins, mais à gagner tout de même avec des taux toujours supérieurs à l’inflation. Tout le monde s’en serait tiré, sauf le peuple, évidemment, qui aurait perdu du pouvoir d’achat.

La suite est connue : le FMI et les états européens vont emprunter à 3% pour prêter à la Grèce à 5%. Il n’y a pas de petits bénéfices… Pour « sortir de cette crise », le gouvernement grec n’envisage rien d’autre que d’augmenter la TVA de 4% et de massacrer les rémunérations des fonctionnaires. C’est donc le peuple, qui n’est pour rien dans cette situation, qui va payer.  Evidemment, rien n’est toujours proposé concernant les rémunérations des patrons et des hommes et femmes politiques. Quant au grand capital, il est aussi laissé à l’écart de tout cela. Rien n’est envisagé vers les représentations sur le territoire grec des organismes financiers qui portent une grande part de responsabilité dans la « crise ».

Cette situation relève de la politique du chien crevé au fil de l’eau. L’état grec, dans sa fuite en avant, ne se souciait guère. Les électeurs, laissés à l’écart de tout cela, n’étaient informés de rien. Et par-dessus tout, on croyait qu’il y avait le parapluie de l’euro.

La monnaie unique ne peut que contribuer à la déresponsabilisation des états. La Banque Centrale Européenne est administrée par des technocrates hors de tout contrôle politique et, a fortiori, hors de tout contrôle des électeurs. Depuis toujours, la B.C.E. se préoccupe d’avoir un Euro fort. Les raisons de cette ligne sont obscures, au moment où, tranquillement, le Dollar se dévalue. Peu importe alors si l’Euro fort devant le dollar faible augmente les coûts de production, freine les exportations et favorise les délocalisations. Les responsables se plaignent de cette situation qui pénalise les ventes vers l’étranger et, en même temps, y trouvent bon prétexte pour justifier les délocalisations.

Cette théorie de l’Euro fort est obscur. Peut-être n’y a-t-il pas de sens, mais seulement dogmatisme.

Un pays a le devoir d’assurer le bien être des citoyens et, notamment de favoriser l’emploi. L’euro fort place les coûts de main d’œuvre au dessus de ceux de la zone Dollar et bien au dessus du Yuan. La logique voudrait donc que l’on favorise l’emploi par l’exportation de produits manufacturés, en même temps qu’on défavorise l’importation de biens de consommation produits à moindre coût dans des pays à monnaie faible et coût du travail dérisoire. La stratégie de l’Euro fort fait tout le contraire.En déléguant l’administration économique à une structure qui n’est pas démocratiquement contrôlée, le peuple européen et le peuple grec se voient conduits à devoir travailler plus pour combler les dettes créées par d’autres à leur insu.

A contrario, un véritable contrôle populaire sur la politique et les dirigeants aurait pu produire le contraire. Tant qu’il n’est pas associé aux décisions économiques, le citoyen n’a que peu conscience des inconvénients qu’il y a à acheter des biens de consommation produits à bas prix et qui entretiennent le chômage. L’organisation politique hétéro-gestionnaire de la Grèce, et de toute l’Europe, est déresponsabilisante. Les citoyens ne sont consultés en aucune façon, sauf de loin en loin et sur des thèmes de campagne électorale sans rapport. Le peuple est dépourvu du pouvoir et des choix économiques qui se concentrent entre les mains de ceux qui peuvent s’en emparer, c’est-à-dire à des organisations ou des groupes mercantiles que les gouvernements ne contrôlent même pas. Personne ne me demande si j’accepterais d’acheter un écran de télévision 200 € plus cher, mais made in France !

Cette impéritie du pouvoir politique est encore une fois illustrée par l’accident pétrolier du Golfe du Mexique. Les américains ont beau faire les gros bras, il est évident que les dommages seront considérables notamment parce qu’on ne peut (on ne sait) mobiliser toute une population pour lutter contre l’envahissement du pétrole brut.

La mobilisation populaire est impossible en dehors des cadres implicatifs et, surtout, autogestionnaires. Si le peuple grec avait été consulté, il y a des mois, voire des années, sur les sujets qui le concernent actuellement, il est probable que la situation serait moins hasardeuses. Les parasites politiques et économiques ne seraient plus aux commandes. Les délégués du peuple y seraient pour défendre et favoriser le peuple.

Seule une politique participative autogestionnaire eut été la solution. Il est probable qu’il est trop tard. Les choix grecs sont toujours pris contre le peuple qui n’est pour rien dans ce merdier.

Il ne reste plus aux grecs que la solution révolutionnaire. Ce n’est pas sans danger.

Notes d’économie politique 47 – 6 mai 2010

L’état communiste, l’état libéral, l’organisation libertaire

On ne peut évidemment pas écrire « état libertaire », même si cela ferait un titre bien équilibré !

L’état libéral postule que la libre entreprise est source de progrès. On est dans un monde de compétition politique et sociale. lLs meilleurs hommes parviennent aux meilleures places. Les meilleures entreprises dominent les marchés. Les meilleurs chercheurs sont honorés et récompensés. Quant aux autres, ils tiennent leur place entre le fond et la surface, en fonction de leurs efforts et de leurs mérites. Cette organisation sociale postule, pour faire croire qu’elle n’est pas injuste, que tous les hommes naissent libres et égaux et qu’ils partent de la même ligne de départ. Ce postulat est d’emblée faussé car il admet que certains peuvent être plus entreprenants que d’autres, font de meilleurs efforts. Et l’on est bien obligé d’admettre que les plus douées le sont par nature ou par héritage, ce qui fausse d’emblée la compétition car il est évident que tout le monde ne part pas du même point. On croit pouvoir se contenter de dire que tous les hommes naissent libres et égaux en droits, mais en droits seulement.

La compétition est le trait le plus discutable de l’ambiance libérale. La compétition suppose qu’il y a des vainqueurs et des vaincus et place ces derniers sous la dépendance du bon vouloir, voire de la charité, des premiers. De toute façon, le libéralisme ne vise pas l’égalité. Il vise une société économiquement productive et hiérarchisée. Cette hiérarchie peut avoir plusieurs facettes: au 19ème siècle, les dynasties des « maîtres de forges » se sont emparés de l’outil de production. Il disposaient du pouvoir de donner du travail, du pain et un logement, ce qui rendait l’ouvrier complètement aliéné. Perdre son travail, c’était tout perdre. Ces industriels s’enrichissaient, mais parfois aussi se ruinaient. A leur seule, et relative défense peut être avancé le fait qu’ils généraient du travail. Un souvent misérable travail, mais du travail quand même. Puis est venue l’entreprise financière. Là, peu d’emploi, peu de salaires, peu de distributions de richesses.

L’état libéral ne défend pas le peuple. par définition. Tout au plus est-il contraint d’édicter quelques lois pour éviter les abus immoraux: travail des enfants, congés payés, durée légale du travail, etc., en cédant peu à peu et à contre-coeur sous la pression des mouvements sociaux. Malgré ces quelques aménagements, l’état libéral ne protège pas l’ouvrier puisqu’il est incapable d’empêcher le chômage ou l’habitat insalubre. L’état libéral est de connivence avec les riches.

L’état communiste d’inspiration marxiste prétend défendre le peuple. Il s’empare des moyens de production avec l’ambition de fournir à chacun travail, nourriture, logement. Il y a là légitimité, car on ne voit pas pour quelle raison les travailleurs qui produisent la richesse  n’en récolteraient pas les fruits. Quand il prétend instaurer la « dictature du prolétariat », il veut dire par là que seuls ceux qui produisent peuvent décider des affaires politiques et économiques.

Ainsi présenté, le principe est simple et clair : la terre aux paysans, l’usine aux ouvriers. Mais ce principe trouve vite ses limites. peut-on dire « l’école aux instituteurs » sans s’interroger sur ce que les enseignants doivent dispenser. Peut-on dire « l’armée aux soldats ». Bien évidemment non. Pour fonctionner, le système a besoin d’une sorte de charpente de direction. C’est le parti. Le parti est le lieu où s’élabore la politique. Jusque là, on n’aurait rien à dire.

C’est ainsi que la politique industrielle sociale est décidée, au final, en haut (le « soviet » suprême) puis descend jusqu’à la commune ou l’usine ou l’atelier. Du coup, elle dépossède l’ouvrier de la gouvernance de sa vie. Dans les bonnes formes d’application, chacun aura au mieux son logement et son travail, mais devra exécuter un plan à la création duquel il n’aura pratiquement pas contribué. Dans cette formule, le travailleur est un perpétuel exécutant assisté.

Le système communiste, dans les déclinaisons connues, installe le parti sur un modèle hiérarchique. Il y a tout un empilement de structures jusqu’à la plus haute qui dispose de tous les pouvoirs. Se constitue alors une oligarchie qui progresse dans l’échelle du parti. au prix de l’obéissance voire de la servilité. Faute d’une extrême rigueur morale, l’organisation devient quasi féodale, pire que l’organisation libérale, en raison de la toute puissance du parti. Et elle a vite fait de devenir dictatoriale et paranoïaque.

Le monde communiste aurait pu fonctionner sur le modèle de son idéal. Nombre de militants du parti le pensaient, le croyaient, parfois même contre l’entêtement des faits. Plus dure fut leur déception.

Tout au plus, l’organisation a pu fournir le travail, le vivre et le couvert dans des conditions déplorables comme en U.R.S.S..

L’organisation anarchiste est tout autre. On peut dire qu’elle part de la base, là où sont les lieux de production : la mine, l’usine, l’atelier, l’exploitation agricole et ceci ne supporte pas la moindre exception. L’outil de production est destiné exclusivement à faire vivre ceux qui le font fonctionner avec des régulations ou des exceptions pour assurer la solidarité. Chacun participe à la production et en relève les fruits. Dans les applications qui ont été faites de ce principe (dans les S.C.O.P? , par exemple), on a admis des différences de salaire selon la charges des responsabilités, mais tout en ménageant une rémunération digne et suffisante pour les moins payés. Pour le coup, les différences entre les rémunérations les plus faibles et les plus élevées sont notoirement moins importantes que dans le monde capitaliste.

L’outil de travail est la propriété des travailleurs qui peuvent partager avec de nouveaux venus, en même temps que d’autres restituent leur part à leur départ. Comme les ouvriers sont propriétaires de leur entreprise, aucun dividende n’est évidemment versé à qui que ce soit. Seules peuvent être réservées de sommes destinées à l’investissement ou à la solidarité ou au financement de services collectifs qui ne sont pas producteurs de richesse. Il n’y a guère de différence avec un kholkose, sauf… qu’il n’y a pas de parti.

L’absence de parti ou de ligne directrice du parti fait l’originalité et la difficulté de cette organisation. Mais on en décèle alors la difficulté, car la structure politique, sociale et économique ne peut être seulement composée par la concaténation des organisations de base. Ici vient donc le risque de la création d’une ossature autoritaire comme le parti dans l’univers communiste. La solution de ce problème réside dans la notion de coordination. Ces coordinations sont crées pour des périodes plus ou moins longues, à l’initiative de celui ou de ceux qui convainquent de la nécessité. On peut se référer à l’exemple des coordinations ouvrières ou étudiantes qui naissent au moment de mouvements sociaux ou de revendication. Naturellement, l’absence de familiarité avec cet exercice peut conduire à un certain désordre qui ne peut qu’être aplani avec l’habitude.

La coordination est un lieu d’expression et de décision ouvert. Le niveau d’ouverture peut être plus ou moins large : chacun peut s’exprimer ou seuls les délégués peuvent le faire. Ici vient la notion de « délégué ». Un député, par exemple, est un personnage qui se fait élire pour 5 ans et qui, entre temps, ne rend pas compte à ses électeurs et confisque, d’une certaine façon, le pouvoir. A contrario, le délégué est choisi, élu, pour une coordination donnée, avec une mission donnée. Il n’appartient pas forcément à un groupe ou un syndicat. La durée de son mandat peut être longue ou courte, mais ce qui est déterminant est qu’il rend compte, de façon permanente, de son action devant ceux qui l’ont mandaté.

L’existence de coordinations et de délégués fait toute la différence : ils sont temporaires, à géométrie variable, et suivis de très près par les mandants.

Nombreux sont ceux qui croient que cette manière d’organiser la société est impossible en raison même de sa souplesse. Pourtant le nombre de structures qui existent dans le monde libéral est gigantesque : conseils de parents d’élèves, conseils syndicaux, conseils et assemblées associatives, conseils d’école ou d’université et naturellement conseils municipaux, d’agglomération, généraux, régionaux, députés, sénateurs, etc., etc.. Le nombre n’est donc pas mis en cause. Seule la souplesse peut créer ce qu’on pourrait prendre pour une difficulté supplémentaire, ce qui n’est pas démontré, et qui surtout se présente comme un gage majeur de démocratie.

Notes d’économie politique 46 – 18 mars 2010

Crise : mettre les banques sous tutelle

Il n’est pas nécessaire de refaire la démonstration. La « crise » mondiale non encore terminée tient à l’irresponsabilité des banques qui ont joué et pris des risques immodérés, sinon délirants avec, pour l’essentiel, de l’argent qui ne leur appartenait pas. Nombre d’entre elles se sont trouvées alors dans l’impossibilité d’honorer leurs créances, voire de restituer leurs avoirs aux déposants.
Afin d’éviter cet immense désordre et cette immense spoliation, les états sont venus au secours de ces banques en leur prêtant pour assurer les fins de mois.
On aurait pu penser alors que ces mêmes banques auraient compris la leçon par une gestion plus raisonnable des biens qu’elles avaient entre les mains. Point du tout. On a vite vu qu’elles ne se précipitaient pour financer le commerce, l’artisanat, les services et l’industrie. Elles ont préféré reprendre la partie de poker menteur. Les habitudes sont revenues avec le cortège des primes et salaires que l’on connaît.
Elles ont vite oublié qu’elles devaient leur survie à des millions de travailleurs qui ont perdu leur emploi dans la manoeuvre. Mais c’est bien connu : la banque irresponsable n’a que faire du travailleur sauf pour lui fourrer du crédit revolving à un taux presque usuraire. Ce qui conduit aussi à utiliser l’argent du contribuable pour soutenir les ménages surendettés.
Et voici que maintenant, ces mêmes banques, après avoir été bien heureuses de l’aide que les états leur ont fournie, se prennent à faire la fine bouche pour renvoyer l’ascenseur et financer ces mêmes états en difficultés.
En quelques mois, la preuve a été faite que les banques étaient irresponsables. Au final, on se demande si elles servent à autre chose qu’à s’emparer de l’argent public. Lorsqu’un vieillard n’est plus en mesure de gérer ses biens de façon responsable, on le met sous tutelle. Lorsqu’un déficient mental n’est plus en mesure de gérer ses biens de façon responsable, on le met sous tutelle.
On ne saurait dire si la maladie des banques est la sénescence ou la déficience. Il est cependant urgent de les mettre sous la tutelle des citoyens.
Il est urgent de nationaliser le système bancaire mondial.
Comment faire ? Les états emprunteront aux banques de quoi les acheter. Puis il suffira de demander aux banques devenues nationalisées de rembourser les banques devenues nationalisées qui avaient prêté l’argent.
C’est digne d’un « subprime » ou d’un produit dérivé, non ?

Notes d’économie politique 45 – 11 février 2010

 

La crise : sagesse de Maurice Allais, folie du libéralisme. Oui au protectionnisme.

Maurice Allais est le seul Prix Nobel d’Economie que la France ait jamais eu (1988). A ce titre, on aurait pu penser que tous les commentateurs et exégètes de la crise auraient pu l’interroger. Et si l’on pensait (à tort) qu’il était trop âgé pour ce faire, on aurait pu, au moins, consulter son oeuvre. Dans un article dans le journal Le Monde, paru le 25 janvier 2009, l’auteur, Pierre Antoine Delhommais, faisait rappel de son livre La Crise mondiale d’aujourd’hui (1999).

Je cite:

« De profondes similitudes apparaissent entre la crise mondiale d’aujourd’hui et la Grande Dépression de 1929-1934 : la création et la destruction de moyens de paiement par le système du crédit, le financement d’investissements à long terme avec des fonds empruntés à court terme, le développement d’un endettement gigantesque, une spéculation massive sur les actions et les monnaies, un système financier et monétaire fondamentalement instable (…).
Ce qui est éminemment dangereux, c’est l’amplification des déséquilibres par le mécanisme du crédit et l’instabilité du système financier et monétaire tout entier, sur le double plan national et international, qu’il suscite. Cette instabilité a été considérablement aggravée par la totale libération des mouvements de capitaux dans la plus grande partie du monde.
(…) Depuis 1974, une spéculation massive s’est développée à l’échelle mondiale. A New York, et depuis 1983, se sont développés à un rythme exponentiel de gigantesques marchés sur les «stock-index futures», les «stock-index options», les «options on stock-index futures», puis les «hedge funds» et tous «les produits dérivés» présentés comme des panacées (…).
Qu’il s’agisse de la spéculation sur les monnaies ou de la spéculation sur les actions, ou de la spéculation sur les produits dérivés, le monde est devenu un vaste casino où les tables de jeu sont réparties sur toutes les longitudes et toutes les latitudes. Le jeu et les enchères, auxquelles participent des millions de joueurs, ne s’arrêtent jamais. Aux cotations américaines se succèdent les cotations à Tokyo et à Hongkong, puis à Londres, Francfort et Paris. Sur toutes les places, cette spéculation, frénétique et fébrile, est permise, alimentée et amplifiée par le crédit. Jamais dans le passé elle n’avait atteint une telle ampleur (…).
L’économie mondiale tout entière repose aujourd’hui sur de gigantesques pyramides de dettes, prenant appui les unes sur les autres dans un équilibre fragile. Jamais dans le passé une pareille accumulation de promesses de payer ne s’était constatée. Jamais sans doute il n’est devenu plus difficile d’y faire face. Jamais sans doute une telle instabilité potentielle n’était apparue avec une telle menace d’un effondrement général. »

Mais comment cette déraison est-elle devenue possible ?

A cela, une seule réponse : le dogme du libéralisme et le refus de l’encadrement de l’économie et du protectionnisme.

Cet encadrement n’aurait ouvert les barrières douanières qu’entre les pays ayant atteint un niveau de développement comparable Et si le Traité de Rome avait un sens lorsqu’il était signé par les six pays fondateurs, il n’en a aucun quand le coût du travail est si différent entre la France et la Roumanie. Ce qui veut dire que le traité de Lisbonne est insensé ! Pire encore, lorsque la différence est celle de la Chine et de l’Europe. La Chine est devenue l’usine du monde parce que ses coûts de production, ses coûts salariaux notamment, sont dérisoires. En voulant trouver le meilleur prix pour le téléviseur à écran plat, l’ouvrier français n’est probablement pas conscient qu’il y trouve en même temps la disparition de l’emploi en France.

C’est une vue à court terme, voire illusoire, que de croire que la concurrence peut être un moteur universel de l’économie. Sans aller loin, il suffit de s’intéresser à quelques exemples nationaux :
– La libéralisation du marché des télécommunication a-t-elle été profitable ? Sur le plan des tarifs ? Très peu puisque les opérateurs s’entendent entre eux. Sur le plan du service ? Absolument pas. Su le plan des emplois ? Encore moins. On est passé d’un service public imparfait à des entreprises au service très imparfait, alors qu’il aurait suffi à l’état patron d’imposer à France Télécom les changements nécessaires
– La libéralisation du marché de l’électricité a-t-elle été profitable ? Sur le plan des tarifs, on craint le pire. Sur le plan de la sécurité, notamment des centrales nucléaires ? On crait le pire. Sur l’investissement à long terme et la sécurité des approvisionnements ? C’est le brouillard.
– Qu’apportera la privatisation du transport ferroviaire ? Si l’on en croit l’exemple britannique, des morts !

Dans le monde privatisé, l’égalité du citoyen devant les services publics n’existe plus : pas de téléphone dans les lieux retirés (ou très cher) , pas d’électricité, etc.. Superbe dispositif d’aménagement du territoire ! En matière d’Internet ce sont souvent les départements qui investissent. En matière de transport ferroviaire, ce sont les régions. Au final c’est le contribuable qui paye pour que soit maintenue un relative égalité de service, pendant que les société privées concessionnaires s’empifrent. Sur le long terme, on a déjà l’expérience de la distribution de l’eau ou des pompes funèbres.

Par ailleurs, l’encadrement n’aurait pas permis la gigantesque partie de poker menteur mondiale que sont l’augmentation frénétique du crédit et la folie des marchés spéculatifs. Comme le disait très justement Maurice Allais, les dettes s’empilent sur les dettes.

Et pire encore : on se rend compte qu’une fois la tempête passée, et pas encore la crise, les mêmes recommencent les mêmes jeux de cons qui ne font qu’entretenir la misère des trois quarts de la population mondiale. Il serait temps que les hommes politiques en prennent conscience. a moins qu’ils ne soient déjà complice pour avoir sablé le champagne avec les patrons des multinationales au Fouquets, un soir d’élection. Et si les politiques n’en prennent pas conscience ou sont complices, il faut qu’on les change. Vite.

Un article paru sur le site de Solidarité et Progres proposait de délocaliser Pascal Lamy. Voilà une bonne idée. Mais il n’est pas seul. On pourrait faire un ou deux charters.

ensemble.1260787678.jpg

Notes d’économie politique 44 – 14 novembre 2009

 

 

>

G20 et les « bonus » : la belle affaire

lehman-brothers.1253189700.jpgVoilà que Sarkozy est tout excité à l’idée d’obtenir des pays du G20 une « limitation » des bonus et/ou leur étalement dans le temps. La belle affaire. Ces rémunérations, extraordinaires, il faut bien le dire, sont entrées pour peu de choses dans la crise monétaire. Mais comme elles ont été révélées au bon peuple, les gouvernants s’attellent à les faire baisser (autrement, ils s’en ficheraient comme de leur première couche-culotte). Mais les feraient-ils baisser de moitié qu’elles resteraient toujours scandaleuses. Et on peut faire confiance aux sangsues pour trouver rapidement d’autres moyens plus discrets de se servir impérialement.

Le véritable problème repose dans la structure même des établissements bancaires dans le système où ils évoluent.

Dans sa forme initiale, la banque fut créée pour prêter de l’argent. Elle se rémunérait sur l’intérêt. Ainsi définie, la banque tient une place sérieuse dans le dispositif économique. Mais désormais, ce n’est plus sa seule source de profit. On dit même qu’elle n’est que secondaire face aux gigantesques opérations de spéculation. Et ce sont ces opérations de spéculation doublées d’une partie de pomme de terre chaude avec les subprimes et autres titres maudits qui ont précipité les banques dans un abîme sans fond, entraînant avec elles l’économie et créant par effet de bord des millions de chômeurs. Et pour empêcher que cette chute ne devienne un syndrome chinois, les états leur ont fait profité généreusement de l’argent public, celui-là même qui avait été collecté auprès de ceux qu’elles avaient ruinés.

Les banques, aujourd’hui, font de la banque, de l’assurance, de la spéculation. Certaines vont même jusqu’à vendre du téléphone portable ! Pourquoi pas gérer des bordels ? L’interdépendance d’activités différentes ajoute, en cas d’incident, un effet de contagion à l’effet domino qui est en soi, déjà fort préoccupant. La véritable et solide décision que le G20 pourrait prendre, car je n’espère pas qu’il proclame la fin du capitalisme, serait d’interdire aux banques de faire autre chose que de la banque.  Que les assureurs fassent de l’assurance et qu’on laisse la spéculation, pour autant qu’elle existe encore, à la bande de zozos qui ne risquera qu’elle-même. Et que la banque se contente de n’offrir par ailleurs à ses clients qui le souhaitent, des produits d’épargnes ou des placements non ou peu spéculatifs et ne mettant pas en danger la trésorerie des souscripteurs.

L’idéal serait, bien sûr, la création, dans chaque pays, d’un secteur bancaire nationalisé, fort et moral. On peut toujours rêver, en attendant le grand soir.

Notes d’économie politique 43 –  17 Septembre 2009

Licencier et faire des bénéfices

Un certain nombre d’entreprises ont profité de la « crise » pour licencier tout en continuant de faire des bénéfices. Je lisais aujourd’hui que le secteur français de la vente par correspondance (3 Suisses, La Redoute, etc) voyait le chiffre d’affaires augmenter de 15%. Et pourtant des plans de licenciements consistants sont à l’oeuvre.

Dans la logique capitaliste, il n’y a rien là de scandaleux puisque l’objectif est de faire des bénéfices, les plus importants possibles, pour rémunérer largement les patrons et les actionnaires. Et c’est ainsi qu’apparait toute la perversité du système. L’actionnaire est mû par le profit. L’actionnaire n’est même plus un conglomérat de « petits » rentiers qui se sont assurés leur vieillesse. L’actionnaire est un groupe financier, un fonds de placement. Cet actionnaire là n’a que faire des salariés, et même de l’entreprise puisque au premier signal défavorable, il vendra tout pour reporter ses fonds ailleurs. Il lui arrivera même, par quelques tours de passe-passe boursiers de revendre, sans scrupules, l’entreprise qu’il a acheté hier avec une forte plus-value.

Dans un monde d’économie sociale, le rôle de l’entreprise est tout opposé. L’entreprise a pour mission de produire des biens pour la collectivité et point des dividendes. L’entreprise a pour seconde mission d’offrir corrélativement, du travail à des salariés. On pourrait même imaginer, dans cette perspective, que les bénéfices servent soit à améliorer les salaires, soit à faire des investissements pour produire plus de biens et proposer en même temps plus d’emploi.

Ceci n’est possible que dans le cadre nationalisé ou dans le cadre autogestionnaire.

L’expérience communiste a, malheureusement, jeté l’opprobe sur le système des entreprises d’état.Le kolkhoze était bien autre chose pour la paysannerie russe que l’état de servage qui était le sien avant 1917. Mais l’organisation totalement hiérarchisée et centralisée reproduisait, d’une certaine façon, la structure socio-économique précédente. Le pouvoir avait juste changé de mains. Et cela Marx ne l’avait pas prévu ou s’était refusé à l’imaginer.

La seule réponse à ce risque de dérive autoritaire réside donc dans des formes d’autogestion. Celle-ci étant gravée dans le marbre des structures politiques, sociales et économiques. L’autogestion constitutionnellement garantie permet d’empêcher la tentation du pouvoir puisque tout délégataire est, en permanence, responsable devant ses mandants. Et, dans un cadre industriel, les salariés décident alors de l’affectation des bénéfices soit à l’amélioration de leur revenu, soit à des investissements utiles. On rétorque souvent que les hommes étant ce qu’ils sont, une telle sagesse n’est pas possible. Pourtant, nous avons chaque jour des exemples de solidarité dans la classe ouvrière que nous n’avons pas l’occasion de voir dans la classe dirigeante. Sans compter que la structure autogestionnaire par elle-même pose les limites et surtout responsabilise obligatoirement.

Là, il n’est plus question de faire des bénéfices et de licencier.

Notes d’économie politique  42 – 10 septembre 2009

Capitalisme, libéralisme : ils n’ont rien compris

caissevide.1206056235.jpgVoilà que le capitalisme sauvage et le libéralisme dément ont conduit l’économie mondiale vers un trou sans fond. Voilà que ce qui valait 5000 euros en Bourse, il y a quelques mois, n’en vaut plus que 3000 aujourd’hui. Voilà que des millions d’épargants ont perdu leur épargne et ne savent plus comment financer leur retraite. Voilà qu’on lâche près de 100000 travailleurs par jour sur le carreau du chômage. banques.1233444963.jpgEt croit-on qu’il se passe vraiment quelque chose ? Les même continuent de spéculer à la baisse ou à la hausse ou à la n’importe quoi pour essayer de « se refaire », comme l’on dit.  Les mêmes dirigent là où ils dirigeaient avant et se font verser d’énormes rémunérations. On remarque que ces rémunérations étaient prétendument justifiés par la création de richesse et d’emplois. A-t-on entendu dire que la même bande qui s’entre échange les sièges dans les conseils d’administration, en se versant au passage d’incroyables pots de vin,… non, jetons de présence, s’est est retirée pour laisser la place à d’autres ? A-t-on ouvert les comptes anonymes de Suisse, des îles Caïman ou des autres « paradis » fiscaux ? Non ! Tout recommence. Ou plutôt tout continue comme avant, avec les mêmes règles, à de rares ajustements près, à la marge. Tout continue comme avant sauf pour ces pauvres cons de travailleurs auxquels on dit de « se retrousser les manches ». Putain, ils ont passé leur vie à se retrousser les manches pour ne récolter que des bribes de la richesse produite. et les voici à « l’assurance chômage ». Et il ne faut pas croire que ce sont ceux qui les ont exploités qui payent cette assurance-là. Ils se la sont payés eux-mêmes. Ou bien elle est financée par d’autres prolétaires qu’on fait cotiser de plus en plus sur leur salaire en cure d’amaigrissement. Tout continue. C’est la crise. La crise est un incident de parcours de la vie capitaliste et libérale qui se traduit par un léger appauvrissement des plus riches (et encore, pas forcément) et un fort appauvrissement des plus pauvres. Et que dire des endettés, des endettés à plus que raz la gueule auxquels on a fait croire en un avenir radieux: « mais oui, votre bien immobilier prendra une plus-value de 10% par an ! ». Et pendant de temps-là, les PDG pédègent tranquillement assis sur leurs coussins d’or des stock-options vendues au bon moment grâce à d’habiles tuyaux pas du tout percés. Même le Madoff, grand voyou qui ne se différencie d’Al Capone que par l’absence d’armes à feux, coule des jours tranquilles ailleurs que là où il devrait être. Encore qu’en matière d’armes à feu, on pourrait compter toutes celles que ceux qui se sont ruinés par sa faute, sont en train de se braquer sur la tempe.

A part des petits frémissements, tout continue comme avant. Oui, il est vrai que quelques chefs d’état parlent de réformer le capitalisme ! Les niais. Pensent-ils vraiment réformer le grand banditisme. Car tout cela est banditisme, d’une amoralité absolue et totale: tu bosse, je te pique ton blé, je fais le con avec et tu rebosse.

moutons.1230074438.jpgOn aurait pu penser que les états, qui ont pour rôle la protection du citoyen, seraient entrés en force dans le capital des banques et autres sociétés foireuses qui tendent la main sans le moindre amour propre. Point du tout. Les états aident ceux qui ont merdé et ruiné le monde à recommencer.

On aurait pu penser à un tas de choses pour moraliser et mettre en ordre tout cela. Les états comme les banquiers en sont toujours au capitalisme et au libéralisme: ils n’ont rien compris.

Comment disait-il, l’autre: « Travailleurs de tous les pays… » ?

 

Notes d’économie politique  41 – 1er février 2009