Archive dans 23 novembre 2008

Crise : Les casinos font la manche. Du culot !

Mais voilà que la crise est venue et que le bon peuple prolo se raisonne un peu parce qu’il faut bien bouffer tout de même. Alors, les machines à sous sont moins pleines qu’avant.

Et voilà que j’entends à la radio les lamentations d’un mec du groupe Barrière. Ce groupe possède les casinos de Besançon, Biarritz, Benodet, Bordeaux lac, Briancon, Les princes, Cannes Croisette, Carnac, Carry le Rouet, Cassis, Chamonix, Dax, Deauville, Dinard, Enghien les bains, Jonzac, La Baule, Le Mail, Mandelieu la Napoule, Menton, Ruhl, Niederbronn les bains, Ouistreham, Perros guirec, Ribeauvillé, Royan, St Malo, St Rapahel, Ste Maxime, Toulouse , Trouville, etc.. Ce sont donc de grands malheureux. Et voilà le mec qui osait laisser entendre que, si les pouvoirs publics ne l’aidait pas, il licencierait des centaines d’employés.

Tous des porcs qui remplissent leur poches, leurs slips, leurs soutifs, leurs chaussettes, de gros paquets de billes de banque, quand la conjoncture est bonne et qui, dès lors qu’elle devient mauvaise et qu’ils n’ont rien provisionné (sauf leurs intouchables biens propres et nombreux), ont le culot de mendier, menacer et faire chanter.

Je ne trouve pas de mots assez vulgaires et injurieux pour qualifier ce comportement.

Parfois j’ai des envie de veuve sanglante Place de la Révolution

Parti socialiste: tout sauf Ségolène

Ils sont adorables, les socialistes. Ils ont une personnalité populaire. Qui aurait même pu battre Sarkozy si on ne lui avait pas mis des arbres entiers dans les roues.

Mais point n’en veulent.

Chapitre 1: Bertrand se retire avant le scrutin et demande de voter pour Martine.

Chapitre 2: Benoît se fait sortir à son tour et demande de voter pour Martine.

Et, à chaque fois, le score de Ségolène monte. Et pourtant…

J’imagine que Martine, si elle est battue suggérera qu’on vote pour Nicolas !

Car enfin : Nicolas et Martine même combat : TOUT SAUF SEGOLENE

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Le PS fait peau vieille

Voilà qu’on apprend que le maire de Paris appelle à soutenir Martine Aubry. J’avais crû comprendre que ces deux là ne se supportaient pas. Mais enfin, au PS tout est possible y compris le mariage de la pieuvre et du crotale !

 

Au fond, tout revient dans l’ordre et la machine à perdre vient de se remettre en route.

 

Car les seuls à apporter un peu d’air frais étaient bien Benoît Hamon et Ségolène Royal à des titres divers. Disons que, malgré leur total manque de virginité politique, ils paraissaient n’avoir pas été complètement mâchés par la bête.

 

Benoît Hamon avait l’intention sympathique de tirer le parti vers la gauche. Entreprise difficile quand on a le Directeur du FMI dans son parti et quand la plupart des dirigeants se reconnaissent dans l’économie de marché. Et puis il y a le petit Besancenot qui ronge le tour de la galette. Et le peuple l’aime, le petit Besancenot. La seule chance, c’est qu’il est peu probable que le peuple veuille de Besancenot comme Président de la République.

 

Et puis, il y a Ségolène. Le gros morceau. La bête de scène. Sans doute tire-t-elle un peu vers la droite, car au fond elle sait bien qu’elle a peu de chances de gagner si elle ne va pas grignoter à droite. Ce qui fait l’atout supplémentaire de dame Royal, c’est que le peuple l’aime bien. Quand on a fait le score qu’elle a fait aux présidentielles avec tous les éléphants du PS qui déposaient des tonnes de peaux de bananes sur son chemin, on reste un personnage avec lequel il faut compter. Et ces abrutis de dirigeants la croyaient fichue. Pan ! C’est elle qui fait le plus gros score !

 

En étant réaliste, la seule chance de battre Sarkozy repose pout l’instant aux pieds de la dame. On peut trépigner, c’est ainsi. Et c’est la seule qui soit aussi populaire à l’extérieur du parti. Et pour élire un président, il faut aller chercher des voix, beaucoup de voix, en dehors du parti !

 

Car Martine Aubry va rendre frigide.Tout le monde se souvient de la Ministre. Raide comme un cierge de Pâques, aurait dit Brel. Et puis, ce n’est tout de même pas, non plus, à gauche toute.

 

C’est d’ailleurs rigolo: va se retrouver secrétaire du PS une créature qui aurait voté Bayrou aux dernières présidentielles et qui essaie de nous faire croire qu’elle est plus à gauche que Madame Royal. C’est dire combien tout cela sent la soupe aux vieux croûtons moisis.

 

A ce propos, des lecteurs de mon blog (il y en a quelques uns) me déclarent ne pas comprendre mon soutien à Ségolène Royal qui n’est nullement en accord avec mes autres prises de positions. Je les comprends. Mais si je ne soutenais vraiment que ce que j’ai vraiment envie de soutenir vraiment, je ne soutiendrais vraiment pas grand chose. Avec l’âge, je suis devenu pragmatique. Comme je l’ai dit souvent, je préfère Ségolène à Bayrou et je préfère Bayrou à Sarko. Car il est bien évident que, par les temps qui courent, la politique de la France serait plus sociale si c’était la dame qui avait été élue.

 

On a déjà raté notre chance deux fois. sera-ce jamais deux sans trois ?

L’Université et moi : 3-L’entrée en Psychologie : premières sensations

On dit que j’ai échoué en Lettres Modernes. Point du tout. Ce sont les Lettres Modernes qui ont échoué. J’étais là, plein de disponibilité et de ferveur, disposé à analyser le moindre petit pied de la Légende des Siècles. Et voici qu’il me fallut me colleter avec le Lai de Lanval. Et d’ailleurs, qui sait aujourd’hui ce qu’est un « lai » et « de Lanval » de surcroiît ?

Je m’inscrivis donc en Psychologie et pour la première année, au Certificat de Psychologie Générale qui était commun avec la Licence de Philosophie et au Certificat de Psychologie de l’Enfant qui était spécifique.

Et voici que mon père, conseillé par je ne sais qui, m’apporta deux livres qu’il avait emprunté à la Bibliothèque des Cheminots de Paris Austerlitz, à lire avant la rentrée (qui à cette époque heureuse avait lieu début novembre): L’Introduction à la Psychanalyse de Sigmund Freud et le Traité de Psychologie de Norman L. Munn (ou plutôt la traduction en français de ce manuel américain). J’y découvris deux univers très différents. Sans doute Freud fut-il celui qui m’étonna le moins, car on m’avait, bien sûr, déjà parlé de Psychanalyse. Mais je fus quand même frappé par la prudence de l’auteur. Car Freud, comme dans beaucoup d’autres ouvrages, se montre hésitant. Il utilise des circonlocutions, des métaphores. Ou, plutôt, expose bien la différence entre les faits de parole de ses clients sur le divan et les hypothèses explicatives qu’il construit. C’était une vraie leçon d’humilité. L’inventeur de la Psychanalyse faisait part de ses hésitations, voire de ses incertitudes. Je dois dire que j’ai souvent regretté, par la suite, que ses successeurs connaissent moins l’usage du conditionnel. En particulier Mélanie Klein que j’ai toujours considérée comme une cinglée quand elle nous parle de « fantasme de dévoration du sein maternel ». René Zazzo l’a clouée en palant des « vaticinations de Dame Mélanie Klein ». Même si j’ai une dent contre Zazzo pour son attitude lors de ma thèse, j’incline à penser comme lui.

Quant à Munn, ce fut une découverte. Tous ces rats qu’on faisait souffrir et toutes ces expériences… Découverte ! Car, en fait de Traité de Psychologie, celui de Munn était un Traité de Psychologie Expérimentale. Mais je survécus et j’appris quelque chose: c’est qu’il existait bien des voies d’études du psychisme et que rien ne pouvait prouver que l’une était meilleure que l’autre tant que les auteurs se gardaient de confondre les hypothèses et les conclusions. Cette attitude, dont je découvris par la suite qu’elle était scientifique, ne m’a jamais quitté. Cela m’a valu l’inimitié de certains psychanalystes. Les expérimentalistes sont plus sereins.

Cette première année de psychologie fut très heureuse. J’y rencontrais une jeune personne avec qui j’allais partager quelques mois de ma vie. Ce ne fut pas sans incidence sur mes choix car elle était encore en cure psychanalytique. Fut-ce l’effet de cette compagnie ? Je m’ennuyais assez peu en cours. Il y avait même des intervenants brillants comme Pierre Gréco, un bon élève de Piaget (mais j’avoue que je ne comprenais pas tout). Gréco maîtrisait totalement les concepts piagetiens. Mais nous, pauvre auditoire. Mais c’était brillant. Que dis-je brillant, suprême. Le privilège rare d’écouter un prof qui parle sans notes et sans ennui. A la fin, on apllaudissait à tout rompre.

Il y eut Daniel Lagache, le samedi matin à 8 heures dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne. Pourquoi cette admiration ? L’horaire et le jour étaient difficiles et je ne me souviens pas qu’il fut un grand orateur. Et il faisait un cours sur le « Deuil Pathologique », pas de quoi danser la java ou le rock ! Et cette détresse lorsque je compris qu’il nous parlait d’une de ses patientes qui s’étaient immolée par le feu. Et là j’ai approché toute la solitude et la grandeur du thérapeute dans la souffrance qu’il s’autorisait à laisser percevoir à ses élèves. Et il nous apprenait aussi combien notre expérience et notre savoir étaient bien peu de choses… Et, en même temps, par son expérience même, il nous apprenait aussi le droit à l’erreur.

Daniel Lagache fut de ceux qui comprirent très tôt que, malgré les diverses méthodes d’approche, la Psychologie, en tant qu’elle s’efforcer d’expliquer le fonctionnement de l’être humain, était une et indivisible. Beaucoup des petits maîtres qui lui ont succédé, l’on oublié.

Dans la catégorie monstres sacrés, il y eut aussi Paul Fraisse.  Pourtant pas un brillant enseignant. Ni même un brillant chercheur. Au jour d’aujourd’hui, il serait classé en troisième ou quatrième ligne.

Je crois bien qu’il faisait un cours sur l’apprentissage. Un cours de Psychologie Expérimentale. Pas vraiment marrant. Mais il y avait quelque chose que j’ai compris plus tard, quand j’ai su qu’il était très croyant, tout l’humanisme qui l’animait derrière les expériences de laboratoire qu’il nous exposait sans jamais perdre l’homme de vue. Un expérimentaliste comme lui ne pouvait être totalement sec.

J’ai eu l’immense terreur et l’immense privilège d’être interrogé par Paul Fraisse à l’oral. J’ai survécu. Je crois bien, même, avoir obtenu une note honorable.

A un an près, j’aurais pu entendre Jean Piaget. Mais il avait regagné Genève. Pierre Oléron lui avait succédé.
Oléron était un enseignant épouvantable. Les applaudissements, à la fin de chaque cours, étaient misérables. J’ai su, par la suite qu’il détestait faire des cours. Il était parvenu à la chaire de Psychologie Génétique, à la suite de Piaget, apparemment comme troisième homme dans une situation où des considérations politiques et diverses ne permettaient pas de faire un choix. Je sais que René Zazzo était l’un des postulants. Je ne sais plus qui était l’autre, peut-être Merleau-Ponty. En tous cas, Zazzo était de gauche, communiste, disait-on. Et en ces temps-là ce n’était pas un avantage hors des territoires culturels dominés par le Parti.

Je reparlerai plus tard de Pierre Oléron, parce que je devais le cotoyer de nombreuses années.

J’eus aussi le privilège de suivre les enseignements de Maurice Debesse. L’homme était très âgé, avait probablement dépassé l’âge de la retraite. Il mérite cependant un mot pour avoir cristallisé la recherche pédagogique de l’époque. Aujourd’hui, on a tendance à se tordre de rire en lisant ce qu’il a écrit sur la Crise d’Originalité Juvénile. Pour l’époque puritaine et gaullienne, c’était quelque chose. Je crois que Debesse et la plupart des enseignants de Pédagogie, appartenaient à des mouvements d’Education Nouvelle. J’en étais aussi quelque peu, ayant préparé mon Diplôme de Moniteur de Colonies de Vacances (eh oui ! c’était le nom) avec les C.E.M.E.A. qui étaient un repaire de gauche dans lequel je m’étais bien repéré.

Et puis il y avait Juliette Favez-Boutonnier. Je n’en parle pas pour ses cours de psychanalyse qui n’avaient pas le charisme de ceux de Lagache. Non, mais après son cours, nous nous retrouvions à quatre, dans un café, avec Josiane Delhemmes, Annick Guérin et Viviane Hazan pour réunir et mettre en ordre nos notes pour le Bulletin de Psychologie.

© Jean Pierre Dufoyer, novembre 2008

Universités : autonomie et privatisation

Sans doute la loi d’autonomie des universités a été accueillie par beaucoup avec bienveillance. Il était question de tout gérer, des locaux jusqu’aux choix pédagogiques. Au fond, c’était bon. Pouvait-on croire.

 

Mais voici que cette autonomie est assortie de la mise en place d’un pouvoir fort. Les universités seront gérées par un Président. Auquel sera joint évidemment un Conseil d’Administration. Mais tous les projets de décrets d’application tendent à donner un maximum de pouvoir à ce président.

 

Son pouvoir ira jusqu’à « moduler » la durée du travail des senseignants. Les « mauvais » chercheurs (ceux qui ne parviennent pas à pondre dans la hâte un certain nombre d’articles scientifiques) devront faire plus d’heures de cours. Ce qui, au demeurant n’améliorera pas leurs recherches. Quel pouvoir discrétionnaire ! Et l’on voit, tout de suite poindre le favoritisme et le népotisme. Peut-être même qu’en partageant la couche du président, on pourra ne rien faire !

 

Le modèle économique de la société marchande avance .Les universités vont fort ressembler à des sociétés anonymes avec la mise en place de ces réformes libérales et compétitives, tant en matière de recherche qu’en matière d’enseignement. Sous le couvert publicitaire de l’autonomie, on ne cherche qu’à livrer l’université à certains appétits que nous connaissons bien. Quand on parle de rapprochement avec les grandes écoles, on sait bien que ce rapprochement peut se faire dans plusieurs sens.

 

Tout ceci, bien sûr, au nom de l’excellence ! On peut certainement déplorer le niveau de certains étudiants à l’entrée. Mais ce ne sont pas les universités qui ont décrété « 80% de la classe d’âge au bac ». On peut aussi déplorer les erreurs d’orientation. Mais c’est la contrepartie d’un système démocratique. La démocratie fonctionne par essais et erreurs. Seule la dictature sait d’avance comment elle fera.

 

Pour l’heure, l’Université est ainsi faite et on nous demande déjà assez de pratiquer une politique de réussite qui frise la démagogie. C’est probablement cela qu’il faut changer plutôt que les pouvoirs du Président. Depuis des siècles, l’Univerté était collégiale. Elle fonctionnait un peu comme une coopérative. Une coopérative pleine de spasmes, mais une coopérative quand même. Aujourd’hui, la porte d’entrée de la Société Anonyme est ouverte.

 

Quand l’Etat décidera de réduire son financement, il faudra bien trouver des ressources quelque part. Alors, on augmentera les droits d’inscription et l’on se tournera vers un partenariat avec le secteur privé. Les étudiants pauvres seront rejetés et la recherche fondamentale prendra un coup dans l’aile.

 

Les yeux tournés vers l’Amérique, la Sarkozie veut nous faire singer les universités américaines, qui ne sont pas toutes glorieuses, d’ailleurs. C’est un choix évidemment politique, comme pour le reste.

 

On me dit qu’il est en train de se passer des choses similaires en Italie. Voilà qui n’étonne pas !

L’Université et moi : 2-Rencontre avec la politique

Ma formation politique était très incertaine. A l’âge de 14 ans, j’étais très Algérie Française, sans doute sous l’influence d’un copain de lycée, interne à Lakanal et que ses parents restés à Oran, avaient envoyé là pour ne pas compromettre ses études. Le putsch de 1958 m’amusa beaucoup. A vrai dire, je n’y comprenais pas grand chose. L’arrivée de de Gaulle ne me troubla point, tant j’étais immergé dans l’anti Quatrième République qui avait cours en ces temps-là.

Mais lorsque le péril du service militaire en Algérie vint me tourner autour, je commençais à réfléchir autrement. Et puis, il y avait les témoignages sur la torture, même si les attentats aveugles me répugnaient profondément.

Quand de Gaulle négocia avec le F.L.N., j’y vis une trahison et quand Bastien Thiry fut exécuté, j’y vis un crime.

J’arrivais donc à la Sorbonne, plein de sentiments contradictoires.

J’y découvris l’U.N.E.F. et un havre qu’était la salle du G.L.M.. Le Groupe de Lettres Modernes, section de l’U.N.E.F., disposait sous les toits, en haut de l’escalier A de la Sorbonne, d’une salle d’une certaine superficie. Dans ce local, il y avait des tables et des chaises, des affiches et des débats politiques. C’était chauffé. Le balai ne devait pas y entrer souvent. Mais c’était commode et plus économique qu’un bistrot du Quartier Latin. Mais ce n’était jamais calme. J’y découvris toutes les tendances: les communistes s’affichaient clairement. Mais il y avait aussi d’autres groupes, qui participeront sans doute à la formation des groupuscules en 68, se disaient plus à gauche. Et, dans ma naïveté, je n’avais pas imaginé qu’on pût être plus à gauche que le P.C..

Je peux laisser à un historien spécialiste la classification de toutes ces tendances. Mais en tout cas, elles s’exprimaient dans le local du GLM et je les écoutais. Tout Algérie Française que j’aie pu être (ce que je me suis bien gardé de dire par crainte de finir en hachis – il n’y a pas si longtemps que j’ai osé l’avouer), le fond de ma personne était de gauche. Et puis la pression de l’état gaullien se faisait de plus en plus sentir sur ma culture philosophique assez fortement teintée d’existentialisme.

Au hasard des rencontres, je me trouvais impliqué par les socialistes. A ce moment, la Ligue Française de l’Enseignement, repaire socialiste de tous temps, cherchait une entrée à l’Université. Avec quelques camarades de rencontre, je me trouvai donc impliqué dans la création du Cercle Laïque des Étudiants de Paris, ce qui donnait le sigle bizarre de CLEP que quelques mauvais sujets traduisirent rapidement en « clebs ». Je crois bien que j’en étais vice-président. Nous organisâmes pour commencer un débat sur un sujet d’actualité: orientation ou sélection à l’Université. Non, ce n’est pas une blague. Comme quoi, il y a des thèmes qui sont éternels. La Ligue loua une salle à la Mutualité. Il y vint une poignée d’auditeurs qui n’avaient rien à faire là parce que leur position était déjà déterminée.
Je sais que le C.L.E.P. continua un peu, mais sans moi.
Mais si cette année de Lettres Modernes fut nulle du point de vue de mes études universitaires, j’en sortis politiquement avancé. Ma position était de gauche, mais hors de toute organisation qui ne me semblait conduire qu’à l’embrigadement. Le pire exemple était celui des communistes fidèles béats d’une religion qui avait fini par piétiner l’évangile marxiste, au moins dans les pays de l’Est. Quant aux groupuscules ou aux trotskistes, il ne valaient guère mieux, sans compter qu’un certain nombre me paraissaient cinglés.
J’étais un peu mal à l’aise de ne pouvoir me retrouver dans aucune de ces structures. Il fallut 1968 pour que je fasse connaissance avec le point de vue libertaire qui ne m’a jamais quitté depuis surtout quand je découvris que l’anarchie n’était pas ce qu’on voulait me faire croire.

© Jean Pierre Dufoyer, novembre 2008

L’université et moi : 1-Avant la Psychologie

C’était une fin d’après-midi, disons de novembre 1966. J’étais alors étudiant en psychologie et je terminais ma licence. Je terminais lentement. Car l’année précédente, je m’étais fait royalement coller aux deux certificats de psycho-physiologie, à la session de juin, comme à la session d’octobre.

En fait, la licence de psycho était bizarre. Elle était délivrée à la fois par la Faculté des Lettres et Sciences Humaines et par la Faculté des Sciences. On pouvait la prendre par les deux bouts. Après une première année scientifique ou littéraire, on passait d’abord les certificats correspondants, puis on allait dans l’autre faculté passer le reste.

J’étais « littéraire ». J’avais commencé mes études universitaires par une propédeutique lettres en même temps qu’une hypokhâgne de second choix. Mais j’avais passé deux bacs (à l’époque on en passait deux) assez scientifiques: un bac C en première (avec mention bien, madame !) et un bac de Sciences Expérimentales en terminale (avec mention assez-bien, pas si mal, mais moins bien, quand même). Mais, au fond de moi, je n’avais guère envie de faire des études scientifiques. Je voulais être prof de français. J’étais donc tout naturellement allé vers des études littéraires.

Le proviseur du lycée Henri IV, une vieille peau que j’avais déjà fréquenté en seconde à Lakanal, n’avait pas voulu de moi dans son hypokhagne renommée. J’avais donc échoué, de nouveau, au Lycée Lakanal dans une classe ou l’on pouvait préparer Normale Sup, mais qui, en fait ne nous préparait qu’à l’ENSET (Ecole Normale Supérieure de l’Enseignement Technique), qui avait une section pour les profs littéraires. On avait quand même de sacrés profs ! Il y avait, notamment, un certain Monsieur Cavalier qui était un bon, enseignait le français de façon pas trop ennuyeuse, très compétent sur le théâtre et qui m’énervait profondément parce qu’il détestait Jean Vilar.

Un jour, je déposais sur son bureau cette méchants strophe:
Jean Vilar, Jean vilain,
C’est d’la boue et du crottin.
Jean Vilar, Jean vilain,
Aura mon pied au bas des reins.

Je ne sais pas pourquoi j’écrivis ceci qui ne correspondait absolument pas à mon point de vue. Peut-être était-ce pour stigmatiser l’argumentaire de celui qui critiquait tant l’artiste. De toute façon, je ne sais plus ce qu’il advint de la chose.

En même temps, j’étais inscrit en fac, où je ne pouvais pas aller, car j’étais très pris au lycée, sauf à un cours d’Histoire Romaine de Pierre Grimal que je trouvais très intéressant.

Pendant un trimestre, je restai interne parce mes parents n’avaient pas voulu me livrer aux tentations de la chambre en ville. Mais on peut toujours se divertir, si l’envie nous prend. Nous avions de longues heures d’études non surveillées (car nous étions réputés « grands »).  Je n’ai pas le souvenir d’une grande concentration. Je m’acheminais parfois en rampant presque sous la chaise d’un élève qui portait une grande blouse grise dont les deux pans pendaient de part et d’autre du siège. Le grand jeu était donc d’y glisser silencieusement du papier journal préalablement froissé et… d’y mettre le feu.

Je n’ai jamais réussi à incendier la blouse. Mais les sauts en l’air de son propriétaire valaient le spectacle.

En même temps, j’avais fini par trouver une chambre en ville et je mis mes parents devant le fait accompli. Et comme c’était une chambre au pair, ils ne pouvaient même pas avancer l’argument financier. C’était à Sceaux, chez un monsieur Diamant-Berger qui pourraient bien être Henri, le cinéaste. Je devais donner des cours du soir aux enfants. Des pestes qui ne voulaient pas de cours, ce qui m’arrangeait bien.

Et j’étais souvent amoureux. Disons que c’était un état naturel. Je revois les visages. Pas tous les prénoms. Je me souviens de la souffrance d’entendre un autre élève me raconter comment il était « sorti » avec l’une d’elle. Il y eut  celle que je surnomme Chloé . A l’époque on « sortait ». Les filles étaient très, très, très , très… prudentes. Après coup, je les comprends et, à vrai dire, je ne le regrette pas. Vu de maintenant, cette quasi chasteté à quelque chose de franchement sublime et romantique.

C’est dire aussi que les résultats universitaires furent à la hauteur de ma concentration au travail. Pas une note supérieure à 5 sur 20 au concours. Et j’échouai aussi à Propé en juin.

Foin des avatars. Je me réinscrivis pour octobre à Propé en changeant les matières: dissertation française, version anglaise et géographie (qui remplaça l’aléatoire dissertation philosophique et que j’étudiai vite fait pendant les vacances). Et je fus reçu. sans mention, je dois l’avouer : la pente était savonneuse.

Et je m’engageai pour des études de Lettres Modernes.

Ce que j’ignorais, c’est qu’il fallait comprendre « lettres modernes » par opposition aux « lettres classiques ». Et non l’étude de la littérature contemporaine, comme je l’espèrais. Les Lettres Modernes commencent en 1500 ! Je me souviens, en particulier, d’une étude du Lai de Lanval digne la recherche de la chair dans le corps d’une étrille. Je n’ai rien contre les étrilles, ni contre le Lai de Lanval. C’est un poème qui ne manque pas de qualités dès lors qu’on l’a déjà traduit de sa langue ancienne. Mais de là à passer une heure par semaine pendant une année dans l’amphithéâtre Durkheim, sur ce sujet ardu. Dur.

Il y avait aussi un autre piège. Il se nommait Radio-Sorbonne. Hé oui ! Nombre de cours étaient diffusés à la radio. On pouvait donc les écouter chez soi, d’une oreille attentive ou… distraite. Mais pire, l’heureux propriétaire que j’étais, pour l’époque, d’un magnétophone, ne se privait pas d’enregistrer le cours en remettant à plus tard d’ouïr l’ennuyeux cours sur Lanval. » Plus tard » devint « bien plus tard », pluis « calendes grecques », puis jamais.

La pente savonneuse s’accentua très fortement. La sanction méritée vint : échec aux deux sessions assorti d’un trouble d’orientation, les lettres modernes n’étant vraiment pas ce qu’il me fallait.

Mais l’échappatoire vint en même temps. Cette année-là, le concours des IPES (Institut de Préparation à l’Enseignement Secondaire*) fut ouvert en psychologie. C’est la note de Propé, deuxième session, qui servait de classement. Je repassai donc Propé et… ne fut pas admis au concours.

Mais, pour le coup, je décidais d’entreprendre des études de psychologie.

* On suivait les cours de fac. On avait du soutien pour préparer le CAPES et l’Agrégation. Et on était payé !

© Jean Pierre Dufoyer, novembre 2008

Heures de cours dans l’enseignement supérieur: le décret scélérat

En 1969, un maître-assistant devait assurer150 heures de cours par an. Certains trouvent que ce n’est pas beaucoup. Mais 150 heures de cours, c’est déjà, en moyenne, 450 heures de préparation. On ajoute à celà les corrections des contrôles des connaissances, les corrigés d’écrit, les oraux, dans certains cas, les jurys d’examen, etc, etc….

Au final, ce n’etait pas peu pour UN MI-TEMPS !

Car les enseignants du supérieur sont des enseignants-chercheurs et doivent, à peu près, partager leur activité entre ces deux catégories de tâches.

Et aujourd’hui, grâce à une … de ministre nommée Saunier Seité, c’est devenu 192 heures !

Plus encore, au nom de l’autonomie des universités, on voudrait maintenant que le Président puisse, selon des critères très flous, faire varier les horaires de service des enseignants. Ainsi, on pourra punir les mauvais chercheurs en leur donnant plus d’enseignement. Pourra-t-on aussi punir les mauvais enseignants en leur imposant plus de recherche ?

On ajoutera à celà que l’activité de recherche est surtout devenue depuis 20 ans une frénésie de publication d’articles dans des revues. Cette débauche quantitative n’a rien apporté sur le plan de la qualité. Pire encore. Plus personne n’a le temps d’écrire un livre, un bon livre comme nos maîtres le faisaient. D’ailleurs certains articles sont « bidons », comme ce fut le cas récemment, dans des revues pourtant très sérieuses.

Cette dérive est grave.

Recherche bâclée. Enseignement bâclé. Voilà l’avenir.

Le public doit en être informé.

 

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Pourquoi Ségolène ?

Il y a quelque chose de commun entre Barack Obama et Ségolène Royal. Voilà deux personnages qui semblent venir d’ailleurs. D’un ailleurs où les politiciens encroûtés ne sont pas et n’auraient pas leur place. Et c’est pour cela qu’on les estime. Parce que justement, on voit bien qu’ils n’appartiennent pas totalement à la clique qui a fait de la politique son gagne-pain quotidien, son métier, sa routine…

Et voilà qu’ils s’avancent sans certitudes. Ils ne disent pas « je » comme l’autre qui promet tous les jours le contraire de la veille. « Yes we can », dit l’un. « Ensemble nous pouvons », dit l’autre. Simplement parce que personne ne possède la lampe magique pour annihiler les problèmes. Il y a cependant une attitude de les aborder, une manière socialiste ici, ou démocrate là-bas.

On a fait le même reproche à Barack Obama comme à Ségolène Royal: celui de n’avoir pas de programme. A la belle chose que les programmes électoraux et clientèlistes ! Les torchons de papier qu’on s’empresse de piétiner dès la première heure ou que la folie des grandeurs des pétroliers ou de la finance écrabouillent à la première occasion. Il n’y a donc pas d’autre solution qu’une adhésion et une participation fortes, massives à coté d’un leader, du moment, et qui promet au moins une chose: d’écouter le peuple.

« Ensemble nous pouvons ! »

« Yes we can ! »

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