« L’Europe », entendons par là les doctrinaires et les « gouvernants » de cet amas de pays régis par le concordat de notaires dénommé Traité de Lisbonne, sont d’ardents thuriféraires de la libre entreprise et de la libre concurrence. Ce dogme s’applique aussi à ce qu’on a coutume de nommer « services publics », qui peuvent être non rentables, comme la distribution du courrier ou du téléphone dans des régions éloignées ou reculées.
Pour atteindre cet objectif défini par esprit de système, on a privatisé un certain nombre d’entreprises qui apportaient ces services, comme les télécommunications et la fourniture de l’énergie électrique, par exemple, désormais placées sous le régime du profit et de la concurrence. Cette politique perdure. Les transports ferroviaires de passagers devant être prochainement concernés.
Ces société nationalisées ont été vendues à des actionnaires qui se moquent royalement du service offert et souhaitent des dividendes. Ces sociétés, jetées dans le monde de la concurrence sauvage se trouvent alors dans la position pleine de contradictions du domaine privé. Pour prospérer, elles doivent vendre moins cher que les concurrents tout en maintenant un niveau de bénéfices suffisants pour ravir l’actionnaire.
Les premières victimes de cette politique sont les usagers des services publics placés dans des positions atypiques et dont la desserte sera coûteuse. Sur ce point, l’exemple de la téléphonie et d’Internet est tout à fait démonstratif. Aux citadins, le « haut débit », sans qu’il y ait forcément une différence de prix conséquente avec des services bien inférieurs. Du coup, on se retourne vers les collectivités territoriales pour dérouler du câble ou de la fibre optique faisant indirectement augmenter la facture de chacun via l’impôt. Fini le temps de l’égalité des citoyens et faute de services suffisants les zone rurales se dépeuplent quand il faudrait une sérieuse politique d’aménagement du territoire. Le coût des effets pernicieux de cette situation sont renvoyés vers l’impôt qui se trouve alors subventionner les profits des actionnaires.
Mais le plus rémunérateur consiste à maintenir un haut niveau de prix malgré la concurrence… à condition que toutes les parties s’entendent. Ce n’est pas là l’entente entre le petit commerce et le supermarché. Le petit commerce doit être ravagé puis qu’il éloigne le chaland des zones commerciales. Et puis, la lutte est trop inégale. Il s’agit de l’entente entre les « gros ».
Ainsi GDF-Suez et E.On se sont-ils fait prendre. De même France Télécom, Sfr et Bouygues Télécom. Il en est de même pour Procter et Gamble, Henkel et Unilever. Mais Henkel ne fut pas puni pour avoir dénoncé ses camarades.
Les exemples de telles ententes sont nombreux. Même aux U.S.A qui disposent d’un arsenal législatif bien supérieur à celui de l’Europe. C’est d’autant plus facile qu’il y a concentration. Quand on domine à deux ou trois le marché du monde, il n’est pas malaisé de s’entendre. Le but ultime du jeu est que la plus fort ait dévoré tous les autres et qu’il se retrouve seul à pratiquer les prix qu’il veut. En France, après la disparition de TF1 et d’Orange, le marché de la télévision par satellite est totalement entre les mains du groupe Canal Plus – Canal Sat.
Dans un monde vertueux la concurrence serait un facteur de baisse des prix.
Mais le monde n’est pas vertueux.
Notes d’économie politique 55 – 2 mai 2011