Archive dans 10 juin 2011

J’accuse le ministre de l’Education Nationale

Alain Refalo, Médiapart, 8 juin 2011

L’exigence de vérité commande de prendre à nouveau la parole pour mettre en accusation les fossoyeurs de l’école publique, au premier rang desquels celui qui a en charge le ministère de l’Éducation Nationale. L’annonce de l’embauche de 17 000 «enseignants» par le biais de Pôle Emploi, alors que 16 000 postes de titulaires sont supprimés révèle, une fois encore, la supercherie et l’imposture d’une politique misérable qui sacrifie une génération d’élèves sur l’autel des restrictions budgétaires et d’une idéologie des puissants qui ont programmé la mort du service public d’éducation. C’est désormais une évidence: ce ministère a renoncé à tous les principes éthiques et déontologiques qui lui assuraient une légitimité pour être la voix de l’Éducation Nationale.

J’accuse le ministre de démanteler l’école publique en rayant de la carte 1 500 classes à la prochaine rentrée scolaire et en supprimant 16 000 postes d’enseignants, tout en privilégiant les embauches de personnes précaires non formées.

J’accuse le ministre de mentir à l’opinion publique, aux parents d’élèves et aux enseignants en faisant croire qu’il est possible de faire mieux avec moins, en clamant que l’école publique remplira mieux sa fonction avec moins d’enseignants qualifiés et plus d’élèves en difficulté dans les classes.

J’accuse le ministre de conduire une politique éducative réellement assassine qui, par des «réformes» irresponsables, tue le métier d’enseignant, tue le désir d’enseigner, tue le plaisir d’apprendre et finalement tue l’école de la République.

J’accuse le ministre d’avoir rompu durablement, après les désastreuses initiatives de son prédécesseur, l’indispensable lien de confiance entre l’autorité hiérarchique, l’encadrement intermédiaire et les enseignants du primaire, lien de confiance sans lequel il est impossible de construire quotidiennement une école du progrès pour tous.

J’accuse le ministre de double langage sur le droit à l’innovation pédagogique dans les classes et les écoles: d’un côté, il l’encourage, forums institutionnels à l’appui, de l’autre il le brime en imposant des programmes rétrogrades, des évaluations nationales formatées et des dispositifs de «soutien» en trompe-l’œil qui ont pour effet de standardiser les pratiques des enseignants au mépris de la liberté pédagogique garantie par la loi.

J’accuse le ministre de non assistance à professeurs en danger lorsqu’il les laisse seuls et désemparés affronter incivilités et violences ou lorsqu’il fait peser sur eux un stress permanent via un management de la hiérarchie aux injonctions souvent contradictoires.

J’accuse le ministre de mépriser les jeunes enseignants lorsque, sans aucune formation pédagogique et professionnelle, il les envoie «désarmés» et à leurs risques dans «l’arène» de la classe, négligeant les conséquences pour leurs élèves.

J’accuse le ministre de refuser d’investir dans l’éducation à la non-violence dès l’école en préférant les mesures dites «sécuritaires» qui insécurisent durablement les personnels et les élèves car elles montrent chaque jour leur totale inefficacité.

J’accuse le ministre de mener une politique qui porte atteinte aux droits de l’enfant en autorisant le fichage informatisé des élèves dès la maternelle, par le biais du fichier Base Elèves et du Livret Personnel de Compétences, outils illégitimes et illégaux du contrôle social des populations.

J’accuse le ministre de vouloir influencer la jeunesse de ce pays en imposant à la rentrée prochaine le retour de la phrase de morale écrite sur le tableau noir ainsi que l’apprentissage et le chant de La Marseillaise, alors que c’est d’éducation citoyenne dont nous avons besoin pour construire l’indispensable vivre-ensemble pour une société réellement solidaire.

J’accuse le ministre de vouloir caporaliser les enseignants du primaire en exigeant leur obéissance inconditionnelle à des injonctions hiérarchiques qui constituent un reniement de l’éthique de leurs missions.

J’accuse le ministre d’ordonner aux inspections académiques de poursuivre les enseignants du primaire en résistance, de sanctionner les enseignants-désobéisseurs, tels François Le Ménahèze à Nantes, symbole remarquable de la résistance éthique et responsable aux dérives et mensonges d’une hiérarchie incompétente.

J’accuse enfin le ministre de se mentir à lui-même et de porter tort à la fonction qu’il occupe.

Nul ne saurait emprisonner indéfiniment les consciences. Aujourd’hui, celles-ci sortent progressivement de leur léthargie. Cette indignation éthique qui monte représente une formidable esp��rance. Elle annonce la révolte salutaire dont notre société a plus que jamais besoin pour dessiner l’à-venir de notre école sous les couleurs de la générosité, du respect et de la solidarité.

Alain Refalo est un professeur des écoles français, et un millitant actif de la non-violence. Président du Centre de ressources sur la non-violence de Midi-Pyrénées, et directeur de publication d’Alternatives non-violentes, Alain Refalo est surtout connu pour avoir participé au lancement du mouvement des professeurs désobéïsseurs. Ceux-ci refusent d’apppliquer les programmes de 2008 en expliquant « qu’en conscience, ils refusent d’obéïr ». Il s’agit d’une démarche non-violente, où l’auteur de l’acte illégal le fait car il pense légitime de lutter pour changer la loi. En 2009, l’inspection académique dont il dépend le sanctionne de 19 jours de retraits de salaire, d’un refus de promotion, ainsi que d’un abaissement d’échelon pendant quatre ans. Il publie en 2011 le livre « Résister et enseigner de façon éthique et responsable », préfacé par Philippe Meirieu. Il écrit régulièrement dans un blog collectif lancé en 2008 :
resistancepedagogique.blog4ever.com

La bactérie qui rend l’Europe malade ou une autre facette du déconnodrome libéral européen

Les allemands mangent du concombre. Ils pourraient manger du concombre allemand. Le climat ne s’y prête pas trop, direz-vous. Les allemands qui sont passés maîtres dans l’art de l’isolation thermique des habitations, doivent être capables de construire des serres performantes. Oui mais voilà, ils préfèrent le concombre espagnol parce qu’il est moins cher. Alors, on fait venir, à grand renfort de production de CO2 des concombres produits dans la Péninsule Ibérique.

Mais voila la bactérie Escherichia coli de type 0104 qui se fait mortelle. Les allemands ont vite fait d’incriminer les concombres espagnols. Vilains concombres espagnols. Trop bon marché pour être honnêtes.

Chute spectaculaire des ventes du concombre en Espagne, en France, et qui sait où. Manque de pot, la bactérie n’est pas dans le concombre espagnol. Il serait logique que les allemands calomniateurs payent les indemnités aux concombriculteurs espagnols. Point du tout ! C’est l’Europe qui va payer… enfin, un peu. C’est-à-dire, les grecs, les espagnols, les portugais, les irlandais, etc.. C’est la grande économie de marché ! Qui veut payer pour mes conneries ?

Si les concombres avaient été allemands, on est porté à croire que le gouvernement allemand se serait vite porté au secours des producteurs allemands avec des euros allemands.

Le scandale grec !

Après que ses hommes politiques aient conduit la Grèce là où elle est arrivée, la liste des punitions que le peuple va subir est longue et injuste. On s’étonne d’ailleurs que ces dirigeants politiques soient encore là. Dans le monde des affaires, les dirigeants d’entreprise ayant d’aussi lamentables résultats seraient limogés. A moins qu’ils n’aient été mis là pour procéder à des « restructurations », comme l’on dit, ou à des licenciements. Peut-être est pour cela qu’on les conserve.
Et l’Europe et le F.M.I. sont là, comme un fond de pension américain qui serait l’actionnaire majoritaire, à pousser à des mesures « d’austérité » qui ne seront que des spoliations. Les décideurs du F.M.I. ou les décideurs européens n’en verront pas leur train de vie personnel modifié. Leurs rémunérations ne seront pas abaissées. C’est le peuple grec, et lui seul, avec un salaire minimum à 500 euros par mois, qui fera les frais de l’opération et qui verra son niveau de vie affecté pendant de nombreuses années. Car il leur faudra, non seulement subir l’austérité présente, mais aussi l’austérité future, car il faudra aussi rembourser les prêts.
Voilà l’étonnante trouvaille d’une Union Européenne dont les agissements ne sont pas pour les peuples, mais CONTRE les peuples. Il ne s’agit pas de venir au secours des grecs. Il s’agit de demander aux plus faibles de sauver le rouleau compresseur économique des intérêts qui ne sont pas les leurs. La « Constitution Européenne » montre ce qu’elle est réellement : un concordat de notaires autour d’un mariage sous le régime de la séparation des biens. « Europe sociale » ? Foutaises !
Dans le monde des affaires, il existe même une porte de sortie qui est le dépôt de bilan. Les grecs ne peuvent même pas y procéder. Ils sont priés de créer de la valeur qui leur sera aussitôt confisquée.
Travailler pour que la totalité des richesses produites soit confisquée par un tiers, pendant qu’on ne laisse à la main d’oeuvre que juste de quoi ne pas mourir de faim ! Cela a un nom. Cela se nomme esclavage.

Aujourd’hui, le peuple grec est totalement dépossédé de ses choix politiques. Le F.M.I., l’Europe, les dirigeants grecs se comportent comme des dictateurs qui imposent leur loi sans que le peuple ait été consulté. Où est la démocratie ? Est-ce à dire que la démocratie se trouve suspendue dès lors que de puissants intérêts économiques sont en jeu. On a dépouillé le peuple grec de ses droits fondamentaux. Il ne lui reste plus qu’à être pauvre et à travailler pour l’occupant. Heureusement, il lui reste le droit de s’indigner et de camper sur la place Syntagma, devant le parlement et de demander un référendum. Le jour où la police fera le vide, on sera revenu au temps des colonels.