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Le pape and Co : récidive. Mort au Saint Con !

pape.1237594755.jpgFaut-il en tenir une couche pour oser dire que le préservatif n’est pas une solution pour la question du SIDA !

Quand la connerie atteint ce niveau, il ne reste plus qu’à… Je ne sais même pas. Les bras m’en tombent.

Merci Dieu de nous avoir donné des êtres aussi cons pour pouvoir nous rendre compte qu’on l’est un petit peu moins.

J’avais écrit, il y a quelques mois que cet homme était dangereux. Je me suis trompé. Ce n’est pas un homme. Il n’a rien d’humain ! Qu’on l’excommunie du cercle des détenteurs d’esprit.

L’outrage à 300 euros

Voilà qu’un préfet ombrageux est parvenu à faire condamner une militante à 300 euros d’amende pour avoir tenu des propos qui ne lui plaisaient pas. Outrage à préfet !

Pourtant que c’est bon de dire ce qu’on pense.

Quand un de ces vilains, un petit, un pète fort et puant, un maquereau passe, je me fais du bien:

« Tu as un comportement médiocre de pousse-mégot racrapoté se vautrant dans la sanie de son impuissance mentale tenant à pleine main le symbole phallique décroissant de son autorité flacide. Comportement émétique et aphasique. Pornographie de l’esprit, pet mental, vomissure de l’âme, contraceptif gluant de l’intelligence. Poubelle de l’honneur, émissaire vaseux de liquides honteux d’égouts saumâtres et coagulés. Fiente verte d’oiseau noir. Fiente noire d’oiseau vert. Gangrène cérébelleuse, cancer de l’esprit, choléra de l’honneur. Excroissance putride d’un chancre pourri par l’imaginaire d’être plus grand qu’on ne sait être et qu’on maintient péniblement le pénis à la main. Je hais cette suffisance cravatée. Je hais ceux qui se croient. Je hais le pouvoir fielleux ramassé à la balayette. »

Le pape and Co: Mort aux cons !

« C’est un triste cas, mais le vrai problème est que les jumeaux conçus étaient des personnes innocentes, qui avaient le droit de vivre et qui ne pouvaient pas être supprimées. L’Eglise a toujours défendu la vie et doit continuer à le faire, sans s’adapter aux humeurs de l’époque ou à l’opportunité politique. »

Voilà comment s’exprime un complice du pape à propos de l’excommunication de la mère d’une petite fille de 9 ans violée et du médecin qui a pratiqué l’avortement.

J’ai des nausées !

Mort aux cons !

1968 + 41 Chronique du blocage de la fac !

1968+41

Comédie par Vincent Demont et Léo Dutriaux

Acte unique

Scène unique: Bloqueur, Étudiant, Étudiant 2.

La scène se déroule dans un couloir aux murs blancs immaculés sauf quelques affiches de propagande. Une poignée d’étudiants irréductibles s’opposent toujours à l’autorité dans une faculté de 4000 élèves qui, suite à une AG de 700 membres, a votée le blocage.

Étudiant, énervé

Punaise vous êtes lourds avec votre blocage ! Je veux aller en cours !

Bloqueur, avec un soupçon de lassitude

Je comprends mais les cours n’ont pas lieu indépendamment du blocage de toute façon. Une grande majorité des enseignants font grève! Et si on ne bloque pas les cours, le peu de professeurs ne faisant pas grève feront cours. Et toi dont le professeur sera peut-être gréviste seras pénalisé par rapport aux rares dont le professeur ne suit pas le mouvement! En plus, les boursiers et vacataires ne peuvent se mobiliser sous peine de pertes pécuniaires. Et donc dans ton intérêt et pour l’équité, tu devrais venir bloquer. Après je comprends que par générosité tu laisses les autres avoir leur semestre à ton détriment pour les alléger de ta concurrence…

Étudiant, se renfrognant

J’ai deux heures aller-retour. Je n’ai pas envie de perdre quatre heures pour gaspiller mon temps au blocage ou aux assemblés générales !

Bloqueur

Mais en temps normal ne le fais-tu pas pour aller en cours ?

Étudiant, se reprenant

Oui mais c’est différent, moi je viens pour travailler et pour gagner ma vie plus tard !

Bloqueur, tape sur la table

Et tu crois qu’on se mobilise pour quoi ? Pour la réhabilitation des petit pois jaunes dans nos assiettes ? Non on se mobilise pour notre avenir ! Pour ton avenir ! Pour que tu aies un diplôme de qualité et que tu puisses gagner ta croûte !

Étudiant, calmant le jeu

Bon, admettons, mais j’ai payé cher, 500€ pour mon année et je n’ai donc pas envie de la rater !

Bloqueur

Justement c’est bien assez cher comme ça ! Si on ne fait rien, ton année te coûtera 3000€. En plus les enseignants ont assuré qu’on ne sera pas pénalisé.

Étudiant

Oui, maintenant, les professeurs veulent que je lise les cours sur Internet. J’ai payé pour des vrais cours.

Bloqueur

D’accord mais si on ne fait rien, les futurs enseignants seront déconnectés de la recherche. Les cours seront moins bons et toi moins bien formé. Et si tu veux leur aide pour tes mémoires et tout autre travail personnel, tu l’auras dans l’os parce qu’ils ne connaîtront que le programme. Avoue que ce serait ballot, non ?

Étudiant

Mais de toute façon moi j’ai fini mes études l’année prochaine donc la recherche et l’enseignement…

Bloqueur, perdant patience

Oui, j’oubliais que tu vis d’amour et d’eau fraîche dans une grotte. Comme tu ne profites d’aucun confort, la recherche ne te concerne pas. Et comme tu vis dans la forêt, tes enfants n’auront pas besoin d’enseignements puisqu’ils seront chasseurs-cueilleurs. Le problème, c’est que la plupart des gens eux ne vivent pas dans la forêt et ont besoin de la recherche et de l’enseignement pour survivre dans la jungle urbaine.

Étudiant, vexé

Moi, j’aurai fini mes études et j’aurai tranquillement mon poste de psychologue.

Bloqueur, chuchotant

Mais il est lobotomisé ou… (Normalement) Hum, parce que tu crois qu’au vu des réformes actuelles et de la montée des concepts de rentabilité du gouvernement, la pratique des sciences humaines va sortir indemne du courroux destructeur du dollar tout puissant qui va ravager les domaines non lucratifs ?

Étudiant

Tu as réponse à tout, mais en attendant, vous vous plaignez tous d’une réforme alors que vous avez élu, en tant que français, le président qui a composé le gouvernement à l’origine de celle-ci, C’est totalement contradictoire !

Bloqueur

Voter pour un président, c’est avant tout voter pour un programme, ou contre le programme des autres. Alors lorsque une réforme (pour laquelle aucun des citoyen n’a voté) passe avec une tripotée de modalités attachées, et que l’ensemble des individus concernés et spécialistes du domaine de la réforme sont obligés de manifester pendant plusieurs semaines pour faire comprendre sa réprobation, le tout dans un système censé servir le peuple sans aucune forme d’autoritarisme, ce qu’on appelle démocratie, alors d’accord, il y a contradiction.

Étudiant

Bon, je ne veux pas débattre de ça, je suis juste venu pour savoir où en étaient les cours. De toute façon je maintien que votre blocage n’est pas légitime, je veux reprendre les cours moi ! Point barre !

Bloqueur, violemment

Et bien nous sommes tous dans le même cas. Une seule solution : Se sortir les phalanges du …, venir aux actions universitaires, aux Assemblés Générales, et tout faire à l’unisson, car plus nous serons, plus le mouvement sera bref et efficace, et au plus court les cours reprendront leur cour normal ! (Normalement.) Très bien, si c’est tout ce que tu voulais savoir… Au suivant !

L’étudiant sort côté jardin.

Étudiant 2, entrant côté cour, énervé

Punaise vous êtes lourds avec votre blocage ! Je veux aller en cours !

Rideau.

Pécresse ou la dinde de Noël

Je me souviens qu’à l’époque où se tramait la LRU (Loi du Ravage Universitaire), un collègue avait écrit une tribune dans le Monde pour se demander à quoi pourrait bien servir cette loi dans la mesure où les universitaires s’étaient toujours arrangés pour faire un peu comme ils voulaient. Cette idée n’était pas totalement inexacte. Mais tout le monde se mit à rêver d’universités où le pouvoir cesserait de nous faire chier sur des sujets auxquels il ne connaissaient rien. Ou nous demander de résoudre la quadrature du cercle en formant et en spécialisant les étudiants pour le marché du travail pendant qu’on disait aux citoyens qu’il faudrait désormais changer de métier plusieurs fois dans sa vie.

Alors, notre méfiance est tombée. Un peu inquiets, toutefois, de cette précipitation estivale du vote de la loi. Puis chacun a vaqué à ses occupations.

Et voici que les objectifs sournois se révèlent. La Pécresse d’H.E.C., avec sa mafia, nous avait concocté une bonne merchandisation du savoir. L’Université devenait Société Anonyme, le Président P.D.G. et tutti quanti.

On s’est réveillé un peu tard. Mais c’est fait ! Et puis Monsieur-Je-Sais-Tout nous a fait l’offrande, le 22 janvier, d’un de ses discours marqués du sceau de l’excrément. Tous ceux qui doutaient encore ont franchi le Rubicon !

Et voilà que la pauvre Pécresse, en service commandé, comme la Dati, se fait rouler dans la farine ou pire encore. Elle pond et repond des adaptations à son décret de merde sans avoir pris conscience que c’est toute la L.R.U. qu’ont vouait maintenant aux Gemonies. Il y a bien un ou deux syndicats croupion pour s’en satisfaire. Ses petits camarades cacophonent et la désavouent. Quant au Grand Chef, c’est tout comme. Après avoir soufflé sur les braises, il urine dessus à gros bouillons pour les éteindre. Sans se rendre compte que Pécresse est dessous. De toute façon, elle est plumée !

Université: Tout a été dit. On ne peut avoir raison contre tout le monde !

Voilà. Sur les questions relatives à la loi LRU, il est probable que tout a été dit, ou presque. Les universitaires sont des hommes et des femmes de science: ils ont maintenant décortiqué cette loi qu’on avait fait voter en catimini au mois d’août 2007. Le catimini est une mauvaise chose. Il n’est pas rare qu’il vous pète à la gueule.

Presque toutes les universités sont engagées dans des actions.

Tous les conseils, CNESER, CPU, etc… ont donné des avis négatifs.

Il y a même des gens de l’UMP pour trouver que cette loi est mauvaise.

Même le peuple qui n’est pas très informé de ces questions et qui prend volontiers les universitaires pour des fainéants commence à se dire que, pour que ça dure et aussi fort, c’est qu’il doit y avoir quelque chose de louche.

Une coordination étudiante vient de lancer un appel, fort, à la grève.

Nos gouvernants sont face à leurs cachotteries, leurs ignorances et leurs injures. En persistant, ce sont eux les fauteurs de troubles.

On ne peut avoir raison contre tout le monde.

L’intelligence universitaire: Sottie a neuf personnaiges

Ce texte de Philippe Maupeu, Chercheur Médiéviste à Toulouse Le Mirail circule ces temps-ci sur Internet. On le déguste et on se le repasse… Voilà bien qu’il représente tout ce que d’autres haïssent : la culture (car il n’est pas donné à tout le monde de savoir pasticher la langue du XVIème siècle), la finesse, l’humour, l’intelligence.

Sottie(1) a neuf personnaiges
c’est assavoir de Bone Reforme, Male Reforme, Le Metre du Monde, les Gens, Educacion Nationale, l’Estudiant, l’Enseignant-chercheur, Pasquet Fiscal, la Crise.

Education Nationale est assise par terre, la tête dans les mains, pauvrement vêtue ; Université est à ses côtés.
Les Gens est couché, il ronfle sur son oreiller. Entrent Estudiant et Enseignant Chercheur.

L’Enseignant-Chercheur:
Les Gens, les Gens : resveillez-vous !
Ne songiez plus, houspillez vous !
Educacïon(2) Nationale
Se meurt, veez comme elle est pasle !

L’Estudiant:
Les Gens, les Gens, resveillez-vous !
Levez les yeulx, entendez nous !
Prouffit et Rentabilité
Ont volé Université !

L’Enseignant-Chercheur et l’Estudiant, crient plus fort, d’une seule voix :
Savoir, Liberté, Connoissance,
Literature, Histoire et Science,
N’ont plus aujourd’uy de quoy vivre :
On leur retire tous leurs livres(3) !

Les Gens se retourne dans son lit :
Quant cesserez vous ce tapaige ?
Or me prenez vous en otaige ! ?

L’Estudiant, L’Enseignant Chercheur:
Les Gens, sommeil n’est plus de mise !
La Crise ? Elle a bon dos la Crise !
(La Crise montre son bon dos)
Male Reforme est plein de Vices :
Educacion est au supplice !

Le Mètre du Monde entre avec ses rébânes. Il est tout petit. Il est suivi par ses serviteurs – on en reconnaît quelques-uns.

Les serviteurs, dans un jargon incompréhensible :
Gloria Rex, Metrus Mundi,
Gubernator, fax Populi,
Asinus Rex coronatus,
Christian Clavieri amicus,
Mutator Praefectorum
Et Dominus reformarum !

Le Mètre, à l’Estudiant et à l’Enseignant-chercheur:
Je vos ay oïs, bande de cons.

Les serviteurs : à l’Estudiant et à l’Enseignant-chercheur :
Il vos a oïs ! Comme il est bon !

Le Mètre, il présente Male Reforme : elle boîte, elle louche, vestue de guenilles ; dans sa main une bourse, petite et aux cordons bien serrés.
Moi j’dys : y’ a besoin de Reforme :
Regardez-la, elle est en forme.
(il montre Male Reforme, qui esquisse un pas de danse et tombe)
Moi j’dys, les bouquins c’est tres bien,
Mais pour les Gens y en a pas b’soin.
Pour bosser au supermarché,
Faut surtout aprandre a compter.

Les serviteurs :
Gloria Rex ommipotens,
Omnipresens, omnisciens !
D’Université Pourfendeur,
D’Educacion le fossoyeur !

Le Mètre :
Moi j’dys, celle Reforme est bonne :
C’est Educacion qui desconne !
J’ay pas d’argent a vous donner,
Pasquet Fiscal a tout piqué.
(Il montre Pasquet Fiscal, énorme, qui dort dans un coin)

L’Estudiant, l’Enseignant Chercheur :
Alez vos ant, Male Reforme,
Alons querir Bone Reforme !
Respect, Debat, Concertacion(4),
Democracie, Proposicion,
Videz hors celle sotte fole
Qui assotit tout nostre escole !

Respect, Debat, Concertacion, Democracie et Proposicion bottent le cul de Male Reforme qui s’enfuit. Entre Bone Reforme, de grace refulgente, montée sur un char tiré par deux ministres.

Le Metre du Monde, abandonné de ses serviteurs :
Moy j’dys faut toujours escouter :
Vous sçavez, j’ay beaucoup changé.

Estudiant :
Vos l’avez dict bien d’autres foys :
Vous nous faictes manger de l’oye !
Educacion est bien malade,
Pou de bien lui font vos salades.

Université, couronne le Metre d’un bonnet d’âne :
‘Un roy sans lettres, c’est ung faict,
Est comme un asne couronné’.
Vos le sçaurïez se vos estiez
Aléz a Université !

Bone Reforme, entourée de l’Estudiant, l’Enseignant-Chercheur, Debat, Concertacion, Proposicion, Democracie, Respect ; les Gens les a rejoints :
Male Reforme a faict son temps
Alons a son enterrement,
Puis mectons nostre entencïon
A relever Educacion.

Explicit.

1 Pièce allégorique, jouée surtout au 15ème et au début du 16ème siècles, mettant en scène, sous formes de
personnifications, les problèmes politiques du temps.
2 Notez la diérése, procédé poétique qui consiste à faire deux fois plus avec deux fois moins.
3 Variante : ‘vivres’.
4 Notez l’absence de diérèse.

Université: les fainéants et les mauvais chercheurs, au travail!

Par Pierre Jourde, écrivain et universitaire
(http://bibliobs.nouvelobs.com/blog/pierre-jourde/20090210/10490/universite-les-faineants-et-les-mauvais-chercheurs-au-travail)

Une poignée de mandarins nantis qui ne fichent rien de leurs journées et refusent d’être évalués sur leur travail, manifeste contre la réforme Pécresse pour défendre des privilèges corporatistes et une conception rétrograde de l’université. Au travail, fainéants!

L’ignorance et les préjugés sont tels que c’est à peu près l’image que certains journalistes donnent du mouvement des chercheurs, des universitaires et des étudiants qui se développe dans toute la France. Au Monde, Catherine Rollot se contente de faire du décalque de la communication ministérielle, en toute méconnaissance de cause. Le lundi 9 février, Sylvie Pierre-Brossolette, sur l’antenne de France Info, défendait l’idée brillante selon laquelle, comme un chercheur ne produit plus grand-chose d’intéressant après quarante ans («c’est génétique»!), on pourrait lui coller beaucoup plus d’heures d’enseignement, histoire qu’il se rende utile.

Il aurait fallu mettre Pasteur un peu plus souvent devant les étudiants, ça lui aurait évité de nous casser les pieds, à 63 ans, avec sa découverte du virus de la rage. Planck, les quantas à 41 ans, un peu juste, mon garçon! Darwin a publié L’Evolution des espèces à 50 ans, et Foucault La Volonté de savoir au même âge. Ce sont des livres génétiquement nuls. Aujourd’hui, on enverrait leurs auteurs alphabétiser les étudiants de première année, avec de grosses potées d’heures de cours, pour cause de rythme de publication insuffisant. Au charbon, papy Einstein! Et puis comme ça, on économise sur les heures supplémentaires, il n’y a pas de petits profits.

Mais que Sylvie Pierre-Brossolette se rassure: le déluge de réformes et de tâches administratives est tel que son vœu est déjà presque réalisé. On fait tout ce qu’il faut pour étouffer la recherche. Les chercheurs et les enseignants-chercheurs passent plus de temps dans la paperasse que dans la recherche et l’enseignement. Ils rédigent les projets de recherche qu’ils auraient le temps de réaliser s’ils n’étaient pas si occupés à rédiger leurs projets de recherche. La réforme Pécresse ne fera qu’accroître cela.

Les journalistes sont-ils suffisamment évalués au regard de leurs compétences et de leur sérieux? Est-ce que c’est génétique, de dire des bêtises sur les antennes du service public?

On enrage de cette ignorance persistante que l’on entretient sciemment, dans le public, sur ce que sont réellement la vie et le travail d’un universitaire. Rien de plus facile que de dénoncer les intellectuels comme des privilégiés et de les livrer à la vindicte des braves travailleurs, indignés qu’on puisse n’enseigner que 7 heures par semaine. Finissons-en avec ce ramassis de légendes populistes. Un pays qui méprise et maltraite à ce point ses intellectuels est mal parti.

La réforme Pécresse est fondée là-dessus: il y a des universitaires qui ne travaillent pas assez, il faut trouver le moyen de les rendre plus performants, par exemple en augmentant leurs heures d’enseignement s’ils ne publient pas assez. Il est temps de mettre les choses au point, l’entassement de stupidités finit par ne plus être tolérable.
a) l’universitaire ne travaille pas assez

En fait, un universitaire moyen travaille beaucoup trop. Il exerce trois métiers, enseignant, administrateur et chercheur. Autant dire qu’il n’est pas aux 35 heures, ni aux 40, ni aux 50. Donnons une idée rapide de la variété de ses tâches: cours. Préparation des cours. Examens. Correction des copies (par centaines). Direction de mémoires ou de thèses. Lectures de ces mémoires (en sciences humaines, une thèse, c’est entre 300 et 1000 pages). Rapports. Soutenances. Jurys d’examens. Réception et suivi des étudiants. Elaboration des maquettes d’enseignement. Cooptation et évaluation des collègues (dossiers, rapports, réunions). Direction d’année, de département, d’UFR le cas échéant. Réunions de toutes ces instances. Conseils d’UFR, conseils scientifiques, réunions de CEVU, rapports et réunions du CNU et du CNRS, animations et réunions de centres et de laboratoires de recherche, et d’une quantité de conseils, d’instituts et de machins divers.

Et puis, la recherche. Pendant les loisirs, s’il en reste. Là, c’est virtuellement infini: lectures innombrables, rédaction d’articles, de livres, de comptes rendus, direction de revues, de collections, conférences, colloques en France et à l’étranger. Quelle bande de fainéants, en effet. Certains cherchent un peu moins que les autres, et on s’étonne? Contrôlons mieux ces tire-au-flanc, c’est une excellente idée. Il y a une autre hypothèse: et si, pour changer, on fichait la paix aux chercheurs, est-ce qu’ils ne chercheraient pas plus? Depuis des lustres, la cadence infernale des réformes multiplie leurs tâches. Après quoi, on les accuse de ne pas chercher assez. C’est plutôt le fait qu’ils continuent à le faire, malgré les ministres successifs et leurs bonnes idées, malgré les humiliations et les obstacles en tous genres, qui devrait nous paraître étonnant.

Nicolas Sarkozy, dans son discours du 22 janvier, parle de recherche «médiocre» en France. Elle est tellement médiocre que les publications scientifiques françaises sont classées au 5e rang mondial, alors que la France se situe au 18e rang pour le financement de la recherche. Dans ces conditions, les chercheurs français sont des héros. Les voilà évalués, merci. Accessoirement, condamnons le président de la république à vingt ans de travaux forcés dans des campus pisseux, des locaux répugnants et sous-équipés, des facs, comme la Sorbonne, sans bureaux pour les professeurs, même pas équipées de toilettes dignes de ce nom.
b) l’universitaire n’est pas évalué

Pour mieux comprendre à quel point un universitaire n’est pas évalué, prenons le cas exemplaire (quoique fictif) de Mme B. Elle représente le parcours courant d’un professeur des universités aujourd’hui. L’auteur de cet article sait de quoi il parle. Elle est née en 1960. Elle habite Montpellier. Après plusieurs années d’études, mettons d’histoire, elle passe l’agrégation. Travail énorme, pour un très faible pourcentage d’admis. Elle s’y reprend à deux fois, elle est enfin reçue, elle a 25 ans. Elle est nommée dans un collège «sensible» du Havre. Comme elle est mariée à J, informaticien à Montpellier, elle fait le chemin toutes les semaines. Elle prépare sa thèse. Gros travail, elle s’y consacre la nuit et les week-ends. J. trouve enfin un poste au Havre, ils déménagent.

A 32 ans, elle soutient sa thèse. Il lui faut la mention maximale pour espérer entrer à l’université. Elle l’obtient. Elle doit ensuite se faire qualifier par le Conseil National des Universités. Une fois cette évaluation effectuée, elle présente son dossier dans les universités où un poste est disponible dans sa spécialité. Soit il n’y en a pas (les facs ne recrutent presque plus), soit il y a quarante candidats par poste. Quatre années de suite, rien. Elle doit se faire requalifier. Enfin, à 37 ans, sur son dossier et ses publications, elle est élue maître de conférences à l’université de Clermont-Ferrand, contre 34 candidats. C’est une évaluation, et terrible, 33 restent sur le carreau, avec leur agrégation et leur thèse sur les bras. Elle est heureuse, même si elle gagne un peu moins qu’avant. Environ 2000 Euros. Elle reprend le train toutes les semaines, ce qui est peu pratique pour l’éducation de ses enfants, et engloutit une partie de son salaire. Son mari trouve enfin un poste à Clermont, ils peuvent s’y installer et acheter un appartement. Mme B développe ses recherches sur l’histoire de la paysannerie française au XIXe siècle. Elle publie, donne des conférences, tout en assumant diverses responsabilités administratives qui l’occupent beaucoup.

Enfin, elle se décide, pour devenir professeur, à soutenir une habilitation à diriger des recherches, c’est-à-dire une deuxième thèse, plus une présentation générale de ses travaux de recherche. Elle y consacre ses loisirs, pendant des années. Heureusement, elle obtient six mois de congé pour recherches (sur évaluation, là encore). A 44 ans (génétiquement has been, donc) elle soutient son habilitation. Elle est à nouveau évaluée, et qualifiée, par le CNU. Elle se remet à chercher des postes, de professeur cette fois. N’en trouve pas. Est finalement élue (évaluation sur dossier), à 47 ans, à l’université de Créteil. A ce stade de sa carrière, elle gagne 3500 euros par mois.

Accaparée par les cours d’agrégation, l’élaboration des plans quadriennaux et la direction de thèses, et, il faut le dire, un peu épuisée, elle publie moins d’articles. Elle écrit, tout doucement, un gros ouvrage qu’il lui faudra des années pour achever. Mais ça n’est pas de la recherche visible. Pour obtenir une promotion, elle devra se soumettre à une nouvelle évaluation, qui risque d’être négative, surtout si le président de son université, à qui la réforme donne tous pouvoirs sur elle, veut favoriser d’autres chercheurs, pour des raisons de politique interne. Sa carrière va stagner.

Dans la réforme Pécresse, elle n’est plus une bonne chercheuse, il faut encore augmenter sa dose de cours, alors que son mari et ses enfants la voient à peine. (Par comparaison, un professeur italien donne deux fois moins d’heures de cours). Ou alors, il faudrait qu’elle publie à tour de bras des articles vides. Dans les repas de famille, son beau-frère, cadre commercial, qui gagne deux fois plus qu’elle avec dix fois moins d’études, se moque de ses sept heures d’enseignement hebdomadaires. Les profs, quels fainéants.

Personnellement, j’aurais une suggestion à l’adresse de Mme Pécresse, de M. Sarkozy et accessoirement des journalistes qui parlent si légèrement de la recherche. Et si on fichait la paix à Mme B? Elle a énormément travaillé, et elle travaille encore. Elle forme des instituteurs, des professeurs, des journalistes, des fonctionnaires. Son travail de recherche permet de mieux comprendre l’évolution de la société française. Elle assure une certaine continuité intellectuelle et culturelle dans ce pays. Elle a été sans cesse évaluée. Elle gagne un salaire qui n’a aucun rapport avec ses hautes qualifications. Elle travaille dans des lieux sordides. Quand elle va faire une conférence, on met six mois à lui rembourser 100 euros de train. Et elle doit en outre subir les insultes du président de la république et le mépris d’une certaine presse. En bien, ça suffit. Voilà pourquoi les enseignants-chercheurs manifestent aujourd’hui.