Barbara

Barbara

Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Ce jour-là
Et je t’ai rencontrée
Il y a 40 ans
Dans les mots d’un chanteur de scène
Qui parlait de toi
Simplement
Sur les planches d’un théâtre
Et depuis Barbara
Je crois bien que tu ne m’as plus quittée
Je suis allé rue de Siam
Mais elle était affreuse
Avec tous ces immeubles
Affreux
Carrés et tous pareils
Affreux
Non ça ne devait pas être là

Alors je me suis fait raconter la rue de Siam
Par ceux qui l’avaient connue
J’ai regardé des vielles cartes postales jaunies
Qui dataient de ce temps-là
Et depuis
Quand il pleuvait sans cesse sur Brest
Et quand il m’arrivait de descendre la rue de Siam
Je pensais toujours à toi
Même s’il ne pleuvait pas
Même si la rue de Siam n’est plus la même
Tu le sais bien toi
Elle était bien plus étroite
Il y avait des tramways
Qui faisaient ce bruit
De tramway
Sur les rails
De tramway
Il y avait des bars à matelots
D’où sortaient parfois
Des matelots
Et des chants
De matelots
Et ses petits bordels discrets
Pour les marins permissionnaires
Tu sais
Non peut-être tu ne sais pas
On descendait le long des maisons
Et tout se passait là
On entrait par derrière
Hors de vue de la rue

Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Mais ce n’est plus pareil
Et tout est reconstruit
Le pont de Recouvrance
Ne tourne plus il monte
Et il descend
Et il remonte
Pour laisser passer la « Jeanne »
De temps en temps
L’arsenal existe toujours
Mais il est bien vide
Les navires sont partis ailleurs
Peu à peu
Alors le pont de Recouvrance ne monte plus
Et ne descend plus
Mais le bateau d’Ouessant est toujours là
Sur la même cale
Tu sais
Dans le port de commerce
Il s’appelle toujours Enez Eussa
Mais c’est le troisième du nom
Et il est bien plus rapide
Et bien plus moderne
Il est bleu et blanc
Il emmène des centaines de touristes
Il fait toujours escale à Molène
Dans un crachin à couper au couteau
Comme seule l’Iroise sait faire
Mais il ne va plus jamais jusqu’à Lampaul
Il fait toujours escale dans l’anse du Stiff
Parce que c’est plus calme
Et plus facile
Alors on ne passe plus auprès de la Jument
Ah la Jument
C’est quelque chose
Que ce phare là
Heureusement on voit encore Kereon
Sur Men Tensel
Et puis le Fromveur est parfois bien agité
Et les touristes blêmissent
Quand on le franchit
Tu vois Barbara
Tout est toujours pareil
Et toujours différent

Barbara
N’oublie pas
Où est-il donc
Cet homme
Qui sous un porche s’abritait
Vois-tu
Je crois bien que c’était moi
Oui c’était moi
Et j’ai crié ton nom
« Barbara »
Et tu t’es jetée dans mes bras
Épanouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Oh Barbara
J’ai senti
La caresse de tes cheveux noirs pleins de pluie
Qui coulaient contre ma joue
Et ton corps chaud là contre le mien
Et je me suis noyé en toi
Oh Barbara
Combien de fois
Pendant toutes ces années
Me suis-je trouvé là
Sous ce porche où je m’abritais
Où je criais ton nom

Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n’est plus pareil
Et mon rêve est parti
Pourtant je te sens encore

Contre mon épaule
Serrée
Heureuse
Blottie
Tu es toujours aussi brune
Tes cheveux dégoulinent toujours
Et c’est mon rêve qui revient
Comme il est revenu
Tant de fois
Tout au long de ma vie

1069 – 04/02/2013

Bakounine