L’université et moi : 4- Mes études de Psychologie

L’université et moi : 4- Mes études de Psychologie

Je dois le reconnaître, je ne fus guère déçu par mes études en Psychologie. Bien sûr, il y a toujours des profs qui sont spéciaux. Voire très spéciaux. Il y avait, par exemple, une certaine Henriette B…, qui était une vraie peste. Une vraie méchante, dirai-je. Et notre pire hantise était de ne pas la rencontrer à l’oral. Il y avait des cours brillants, comme celui de Pierre Gréco où je ne comprenais pas tout, des cours besogneux, comme ceux de Pierre Oléron, des cours soporifiques comme celui de Maurice Debesse qui atteignait un âge très canonique.

Et puis et surtout, il y avait tout un tas d’aspects pratiques qui ont malheureusement disparu, et que je regrette.

Il y avait Thérèse Lemperrière qui nous faisait des « Présentations de Malades » à l’Hôpital Ste Anne. Si l’on procédait ainsi aujourd’hui, tous les comités d’éthique nous tomberaient sur le poil. Il est vrai que… Le professeur et le malade étaient assis sur une estrade et s’entretenaient. Cette présentation avait été préparée par une introduction pendant laquelle elle attirait notre attention vers ce que nous devions voir ou entendre. Et, après, évidemment, il y avait un commentaire. Il est vrai que la vidéo a maintenant remplacé tout cela. Mais, à cette époque, nous n’aurions pas eu la moindre occasion  de toucher d’aussi près la réalité des maladies mentales.

Il y avait aussi les Travaux Pratiques de Psychologie de l’Enfant. Pratique également abandonnée. On était reçu dans les écoles et là, installés autour d’une table par groupes de 2 ou 3, on recevait un enfant soit pour un entretien, soit pour un test, soit pour une expérience. Évidemment, on apprenait plein de choses même si l’on se gardait bien de révéler quoi que ce soit à quiconque. C’était très constructif. C’est là que j’appris toutes les bases de l’examen psychologique de l’enfant, sous la conduite de Colette Chiland, à l’époque assistante, que je retrouvai plus tard dans le groupe des enseignants etqui m’appelait « Jean Pierre » sur un ton qui aurait pu laisser croire qu’elle était ma mère. Mes collègues cliniciens vont voir dans mon témoignage un beau délire (Ah Freud !). Tant pis ou tant mieux. Je ne saurais qu’être flatté de faire partie de fils (spirituels) de Colette Chiland. Et quid du contre-transfert ?

Cette pratique (des travaux pratiques) a duré assez longtemps, j’y ai même participé plus tard comme moniteur puis comme enseignant. Puis les parents des écoliers ont fini par s’apercevoir que leurs enfants passaient entre les vilaines mains des vilains psychologues. On comprend alors que les directeurs et les inspecteurs aient fait machine arrière. Il est resté la vidéo, et les stages. Mais les stages c’est pour la quatrième ou la cinquième année, alors que dans ces TP, on recevait des étudiants débutants. C’était tout de suite motivant.

Et puis, il y eut la psychophysiologie, où nous avons maltraité des grenouilles et des rats et dessinés des cerveaux qu’on retirait de grands cristallisoirs pleins de formol. On faisait aussi des enregistrements électro-encéphalograhiques sur nous-mêmes ou d’autres étudiants et tout un tas de choses scientifiques et pratiques sur des paillasses.  C’était bon.

Oui, on peut dire que c’était le bon temps, car on était assez proche de la réalité de la personne. Tout cela a bien changé, souvent au profit de la parlote.

Mes études de psychologie furent honorables : je fus ajourné en juin la première année, mais reçu en septembre, en particulier avec une mention assez-bien en Psychologie de l’Enfant (ce qui décida de ma carrière, plus tard).

Pour la psychophysiologie, il me fallut, comme à beaucoup, m’y reprendre à deux fois. Mais j’obtins une mention à l’un des deux certificats.

Mais le prodige vint d’ailleurs. En janvier 1967, j’avais 22 ans, je n’avais pas terminé ma licence, et pourtant je donnai mon premier cours au Centre Universitaire Censier. Cela mérite un exposé détaillé.

© Jean Pierre Dufoyer, novembre 2008

Bakounine