Mai 1968 : 18 – L’esprit de mai 1968 a soufflé sur le parcours de la flamme à Paris

Mai 1968 : 18 – L’esprit de mai 1968 a soufflé sur le parcours de la flamme à Paris

[Mai 1968: commencer au début]

Je voulais consacrer une note à l’esprit de Mai 1968 qui ne se résume certainement pas à quelques slogans comme « il est interdit d’interdire ». Ce qui fait le côté singulier de cet esprit, c’est qu’il concerne tout ce qui naît et prend corps dans l’esprit du peuple, souvent à cause d’une indignation. Alors surviennent des actes, des mouvements, des manifestations qui naissent assez spontanément, même si, peu à peu, ils trouvent une certaine forme d’organisation. Les structures politiques ou syndicales peuvent s’y associer. Mais elles n’en sont pas le moteur. Le moteur, c’est le peuple

Un exemple en est donné aujourd’hui, 7 avril 2008, par les évènements qui ont accompagné le déplacement de la « Flamme Olympique » dans Paris. A la source de l’indignation, la situation qui est faite aux Tibétains et aux contestataires chinois de la politique de leur pays. Ensuite, une bribe d’organisation par une structure qui représente peu de monde et qui vit habituellement en marge des structures syndicalo-politiques.

On a un avant goût de la mobilisation de ce groupuscule lors de la cérémonie d’Olympie ou le principal responsable de cette organisation se fait éjecter parce qu’il déploie une banderole.

Et voici que le peuple de Paris se mobilise ce jour de la traversée de la flamme (voir ).

Toutes formes de manifestations ont lieu, ce qui démontre bien qu’il n’y a pas derrière toute cela une bonne grosse organisation bien structurée comme la C.G.T.. Certains se rassemblent sur le Parvis des Droits de l’Homme. D’autres compliquent le parcours en tentant de s’emparer de la flamme, d’autres se couchent sur la chaussée. Comme aurait dit de Gaulle; « c’est la chienlit » !

Il s’ensuit un parfait pandémonium. A plusieurs reprises, le porteur doit s’arrêter. On enferme alors porteurs et flamme dans un autobus. Une fois, au moins, c’est démontré, la flamme s’éteint. Probablement plusieurs fois. Au final, la cérémonie tourne au plus grand ridicule. Le peuple de Paris, c’est à dire aussi bien des députés que des conseillers municipaux, aussi bien des jeunes que des vieux, aussi bien des gens de droite que des gens de gauche, aussi bien des étudiants que des travailleurs, aussi bien des salariés que des chômeurs, s’est levé pour empêcher cette flamme devenue symbole de l’oppression chinoise de faire son chemin comme si rien n’était.

C’est cela, l’esprit de mai 68: c’est celui du soulèvement populaire et fraternel contre une indignité. L’esprit de mai naît de l’homme et de la femme qui contemple certains évènements ou certains symboles et sait qu’il ne pourra rester impassible.

Dans le cas présent, et si l’on en croît la plupart des commentaires que j’ai pu lire sur les blogs, le mélange indécent de l’argent et de la répression politique avec les « idéaux » olympiques bien mis à mal, fut le déclencheur. Il fallait que cette flamme ne passât point sous les applaudissements. Il fallait que cette flamme s’éteigne, ne serait-ce qu’un instant. Cela fut. Ainsi le lien ténu entre Olympie et Pékin est désormais symboliquement rompu. Ce n’est même plus comme en 1936. Demain à Londres, aujourd’hui à Paris, demain à San Francisco, après demain ailleurs, les peuples du monde ont dit, disent et diront ce qu’ils pensent de tout cela.

 

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La photo de Notre-Dame de Paris, portant entre ses deux tours l’image des cinq anneaux devenus menottes fera le tour du monde.

Le plus divertissant, si l’on peut dire, c’est que des militants des Droits de l’Homme ont été empêchés, voire interpellés, voire brutalisés, par des forces de police, dans la capitale du pays présenté comme le plus grand défenseur de ces droits. La police est toujours aussi peu dépourvue de nuances (cela doit être un reste de 1968) puisqu’elle s’est posée ainsi en défenseur de l’ordre chinois.

On sait ce qu’il est advenu. Vingt-sept kilomères sous une protection policière digne de celle d’une visite officielle d’un chef d’état, et pas n’importe lequel. Trois mille ! Des forces de l’ordre sur tout le parcours avec une flamme gardée par une véritable « tortudo « .

Au final, la pauvre flamme a fini sa route sous les quolibets dans un autobus après s’être éteinte une (c’est certain) ou plusieurs fois (c’est probable). Quel ridicule fiasco ! De toute façon, j’ai crû comprendre qu’elle devait finir à Charléty . Celui qui avait décidé cela était soit un idiot, soit un ignorant, soit un provocateur.

[Suite ]

Bakounine