Archive dans 7 mai 2007

Pendant l’élection, les otages sont toujours otages

ericdotage.1178498499.jpgPendant que Sarkozy fait liesse, Eric Damfreville est toujours otage des talibans en Afghanistan. Comme toute notre attention est occupée par l’élection présidentielle, on fait durer le plaisir pour mieux retrouver d’ici quelques jours cet odieux devant de la scène que les media vont naturellement offrir à ces malades d’un Coran imaginaire. Hurlons à la mort ! Hurlons car l’horreur nous étreint à la pensée de ces méthodes d’un autre âge ! Hurlons, car ces primitifs bornés ne font que provoquer la haine et le désespoir ! Hurlons de chagrin pour l’otage et sa famille !

Cette campagne, c’était comme mai 1968 * Nous ne sommes pas seuls !

Je relis tous les messages électroniques, tous les documents qui ont circulé et que nous nous sommes fait passer entre nous.
Quelle fraternité: un meeting au stade Charlety qui ressemblait à celui du 27 mai 1968: chaleureux, coloré, bariolé.
Quelle créativité ! Aussi bien littéraire que graphique. En cela, Internet a donné a tous un remarquable (mais pas assez redoutable) moyen d’expression. Combien de blogs ont-ils été créés ? Combien de lignes de blogs ont-elles été écrites ? Combien d’images ont été dessinées ? Combien d’affiches ont été dévoyées ?
Quand le nouveau président de la répblique déclare que c’en est fini de l’héritage de mai 1968, il n’a rien compris. Comment n’a-t-il pas vu que nous avons investi ce nouveau moyen d’expression, que nous l’avons mis au service de notre liberté d’expression ?
Et comment cela est-il venu ? Je n’imagine pas un seul instant que la productivité populaire eut été aussi féconde si Dominique Strauss-Kahn ou Laurent Fabius avaient été candidats. Ce sont donc des circonstances nouvelles qui sont à l’origine de cela. Et ces circonstances se nomment ségolène Royal. Voilà quelqu’un qui a su comprendre que la politique nouvelle ne pouvait se faire sans une participation franche et massive du peuple. En créant son site Internet « Désirs d’avenir » elle a donné le ton. En conduisant des réunions « participatives », elle a développé le concept.
A propos des meetings de Bercy de Sarkozy et de Charlety de Ségolène Royal, nombreux sont les commentateurs qui ont fait la même analyse: « le public de Bercy montrait une société homogène; celui de Charléty une société plus diverse, plus colorée. Dans le premier cas, beaucoup d’inclus; dans le second, beaucoup d’aspirants à l’intégration, de candidats à intégrer cette classe moyenne dont le sort reste une des clés de l’avenir » (J.M. Colombani, Le Monde, 4:5:2007). Tout s’explique alors. Il ya ceux (dont un grand nombre parmi les plus âgés) qui attendent du pouvoir qu’il leur trace la route, qu’il les protège, qu’il veille à ce que rien ne soit changé, qu’il les gouverne pour tout dire. Et puis il y a ceux, malheureusement un peu moins nombreux que les premiers, qui aspirent à ce que la représentation politique et l’exécutive qui en est l’émergence conduise une politique dont le peuple, en perpétuelle évolution, est la source et la racine.
D’une certaine façon, la démarche de Ségolène Royal est révolutionnaire. C’est du révolutionnaire « soft », mais c’est du révolutionnaire quand même. D’abord en se présentant plus comme un porte-parole, exécutif, mais porte parole tout de même. Beaucoup n’ont pas compris pourquoi elle ne répondait pas plus précisément à la question perfide de Sarkozy sur les 35 heures. Le second disait qu’il allait au plus vite ouvrir la possibilité de contingents d’heures supplémentaires (exonérés en partie de charges et d’impôts de surcroît). La première se contentait d’annoncer qu’elle allait remettre à plat. Revenir dessus, alors ? Non, remettre à plat, c’est à dire faire passer l’ensemble du dispositif à l’examen critique des partenaires sociaux pour en retenir, en supprimer ou en modifier ce qui semblerait utile aux uns et aux autres.
Ainsi, Ségolène Royal ne se présente pas avec des réponses toutes faites, mais avec une méthode qui est, pour l’essentiel, la concertation. En cela, elle est beaucoup plus fine que son adversaire, car elle ne s’expose pas à retirer un texte dans l’humiliation, comme le projet CPE. Elle sait aussi que, sauf à recourir à la dictature (ce qui est peut-être l’objectif de Sarkozy), on ne peut imposer brutalement et de façon durable des réformes qui n’ont pas l’adhésion d’une large majorité: «  »Le projet de Nicolas Sarkozy, c’est de prendre le pouvoir. Le mien, c’est de vous le rendre », «  »Je viendrai régulièrement devant vous vous rendre des comptes du pouvoir que vous m’avez déposé et non pas donné ». Il y a là des accents des fondamentaux de la première république et non de la cinquième.
Voici donc les deux mondes qui ont soutenu Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy. Le premier qui a cru pouvoir espérer, pendant quelques mois, soulever le couvercle de la marmite se voit brutalement repoussé par le résultat de ce vote conservateur. Mais, grâce à la candidate qui a su fédérer toutes ces énergies, ils savent désormais qu’ils ne sont pas seuls. Il n’est pas certain alors que le couvercle ne se soulève pas par le seul effet de l’importance du bouillonnement du chaudron.

Peut-être cette nouvelle marche pour la liberté et le dialogue a-t-elle commencé.

DSK ou l’impudeur faite homme

 

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Judas !

Il était à peine 20H10 quand Dominique Strauss-Kahn s’est déclaré « disponible ». Ce qu’il a oublié, cet idiot, c’est que devant Sarkozy, il aurait fait à peine 30%. Rien compris. Rien compris à rien. Les éléphants sont gros, mais leur cerveau est petit.

Présidentielles: le résultat

crs-6mai.1178464367.jpgDans ce pays, on aime les inégalités.

A cette heure (17 heures), certains connaissent déjà le résultat. Mais n’ont pas droit de le dire. Mon cul !

Et, en plus, on emmerde les sites web des journaux des pays voisins qui sont obligés d’alléger leur site, de le réduire à une page d’accueil, avec quelques lignes et quelques chiffres. Mais pourquoi tout ce bordel ?

 

La vraie réforme serait d’interdire les sondages à la sortie des urnes. Et d’attendre, comme il se devrait dans une démocratie respectueuse des électeurs, le résultat des dépouillements.

18H25: Tous les blogs donnent les résultats. Pas moi, parce que maintenant il faut craindre pour ses fesses. Tiens, à propos, on dit que Jauni chantera ce soir. Est-ce un signe ?

Sarkozy va gagner – Ceci est mon testament

corbillard-28k.1178323563.jpgJ’écris cela aujourd’hui. Et pas demain. Comme cela on ne pourra pas dire que la défaite me rend amer, puique cette dernière n’est pas tout à fait certaine.
Dure journée que celle d’hier. Voici que les sondages qui donnent Sarkozy gagnant s’ajoutent les uns aux autres ! D’abord incrédule puis, petit à petit le sentiment qu’un rêve est en train de prendre fin. Voilà 41 ans que j’ai le droit de vote et, dans toute ma vie, si peu de temps pour un vrai régime de gauche. Même sous Mitterrand ! Quoi, les premières années, peut-être. Car Mitterrand n’est pas vraiment un homme de gauche, on le sait bien. Si, peut-être, quelques belles et rares rencontres. Bergovoy, sans aucun dote. Pierre Mauroy probablement. Mais tant d’autres faux et faux culs que je ne nommerai pas et qui se pavanent encore. J’ai peut-être rêvé. Je ne le saurai jamais. Mais Ségolène donnait l’impression d’une ou deux pointures de sincérité en plus. Ce n’était pourtant pas le grand soir !
Et puis aussi le sentiment que de décennie en décennie, ça va de mal en pis. De Gaulle c’était de Gaulle avec toute son histoire et malgré toutes les critiques qu’on peut faire à son monde bourgeois militaire bien-pensant et réac, ce n’était pas le CAC 40. Pompidou était plus près de la banque, mais quel humaniste ! Giscard aussi était humaniste. Social un peu cul-cul, un peu raide de sa particule et de son milieu en contradiction avec les petits-déjeuners qu’il voulait avec le peuple et son goût pour l’accordéon. Même Chirac. Un homme qui a eu pendant quelques mois dans sa jeunesse des penchants communistes ne peut être tout à fait mauvais. Malhonnête sans doute, mais pas vraiment mauvais. C’est comme son côté peuple paté saucisson et tête de veau sauce gribiche. Ce type-là n’enverrait pas l’armée tirer sur une manif ouvrière.
Sarko est capable de le faire. Et il le fera sans doute. Chez lui, rien. Tout est froid, glacé, tendu vers l’objectif. Pas d’anthologie de la poésie française, pas d’accordéon, pas de tête de veau. Un mec qui ne boit même pas un verre de vin. Il ne doit pas jouir d’autre chose que de l’exercice du pouvoir. A 20 ans, disent des témoins, il s’était programmé pour être président et pendant trente ans, il a menti et trahi tout le monde pour le devenir. Et maintenant, parvenu au terme de sa course insensée, entouré de vassaux et sans vrais amis, citant Jaurès sans rien en connaître, ignorant tout de la vie parce qu’il a passé la sienne dans son idée fixe, il ne lui reste plus qu’à disjoncter dans l’exercice de son pouvoir absolu. Un homme qui a tant trahi et tant menti ne peut pas être bon.
Et voici que me vient aussi une pensée terrible pour tous ceux qu’on a convaincus de voter alors qu’ils n’étaient pas prédisposés à le faire et dont on dit qu’ils vont gronder demain soir et peut-être aussi s’émouvoir dans l’affrontement. Quel déception, quel outrage pour ces jeunes marginalisés qu’on tentait de remettre dans le droit chemin de la citoyenneté que de voir insolemment être élu celui qui les a traité de racailles. Et tous ceux qui de toute leurs forces tendaient à rester dans les limites de la république. Comment ne pourront-ils pas vivre cet évènement comme le témoignage effrayant du rejet d’une majorité des français vers lesquels ils pourront cristalliser leur haine. Quel renforcement de la « fracture sociale » ! Sans compter que cet échec électoral n’est jamais que le produit d’un vieillissement d’une population qui se recroqueville de plus en plus dans des peurs stupides et des rejets imbéciles.
Et enfin, pour clore le débat, voici que l’impétrant déclare que c’est la fin de la culture de 1968. Et comme il ne sait pas que l’essentiel de la culture de 1968 était un peu de chaleur et de respects humains, il sonne le glas de ce qui reste, si peu, si peu, de ces évènements déjà si lointains.
Une seule touche positive dans la journée: la prise de connaissance de l’éditorial de Jean Marie Colombani en faveur de Ségolène Royal. Au moment où la cause est entendue, cela a quelque chose de pathétique. Au moment où les français s’apprêtent à rejeter celle qui s’était engagée pour une « France juste », il y a de quoi désespérer de l’homme.
C’est fini. La cause est entendue. Dans cinq ans, nous serons encore plus de vieux à n’être pas morts et Sarkozy sera élu par 60% des Français. A quand Pinochet ?

Voilà 40 ans que je vote… en vain

 

 

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Le tyran

Les gens regardent passer dans le char bariolé la grandeur du très haut personnage
Lui leur rit au nez
La foule applaudit le grand homme riche qui roule dans le carrosse d’or et se nourrit de viande alors qu’elle, elle bouffe des pommes de terre
Le ciel est au dessus de tout cela et dispense aux hommes sa chaleur qui lui fait oublier son malheur
Et le tyran roule toujours sous les applaudissements des foules
Sauf de ceux qui vomissent par trop d’écoeurement sur le bord du chemin
Ce sont ceux-là qui demain matin iront sur l’échafaud de la démocratie mourir pour la liberté des hommes contraints
Et les hommes siffleront et les montreront du doigt comme des prostituées
Oubliant que ceux qu’ils doigtent que ceux-là même dont ils encouragent le supplice sont leurs frères
Ou leurs petits cousins

1962

Pendant ce temps-là…

placebourse.1178218388.jpgPendant qu’on se mobilisait pour le débat entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, deux évènements sont venus s’intercaler et sont passés presque inaperçus.

 

Le CAC 40 a franchi la barre des 6000 points. Pendant ce temps, les salaires n’augmentaient pas, le chômage ne diminuait pas. La spéculation n’a pas peur des élections. Du moment qu’il n’y avait plus aucune chance que Besancenot ou qu’Arlette devienne président, tout va bien. Les puissances de l’argent dorment sur leurs oreilles.

 

perquiselysee.1178218442.jpgUn autre évènement est aussi survenu: deux juges d’instruction se sont présentés à l’Elysée pour effectuer une perquisition concernant la mort suspecte de ce magistrat français à Djibouti, Monsieur Borrel. Il ne s’agissait pas de perquisitionner Chirac qui est, pour quelques jours encore, sous le coup de son immunité diplomatique, mais des services qui pourraient être en relation avec cette affaire.

 

L’accès leur a été interdit. Comme quoi, la séparation des pouvoirs en France est un mythe. Un communiqué indigné du Syndicat de la Magistrature est passé presque inaperçu. Comme on pressent que Sarko a encore moins à faire de la séparation des pouvoirs, on peut craindre le pire du pire s’il était élu.

Bayrou n’a plus le choix: il doit dire qu’il vote Ségo !

bayrou-portrait-small.1178217822.jpgBonjour, Monsieur Bayrou,

Disons-le tout de suite: je n’ai pas voté pour vous. Certains m’avaient dit que j’aurais peut-être dû le faire, car les sondages annonçaient, que, si vous étiez au deuxième tour, Sarkozy aurait été assurément battu. Mais c’est vrai aussi que, si l’on vote au deuxième tour en fonction du second, c’est qu’on n’est plus vraiment en train de voter. C’est pourquoi, au final, Ségolène affronte Sarkozy.

Entre les deux, il semble que vous tentez de survivre et même de cristalliser un Parti Démocrate. Au centre. Quand on a obtenu 18% des voix, voici qui est assurément légitime. Et pourtant cela ne marche pas: la quasi-totalité des députés UDF qui ne considéraient leur parti que comme une soupière tournent leur veste du côté droit. Au passage, ils crachent au visage de tous ceux qui ont voté pour vous. Ils n’en ont que faire, ils n’en ont cure, tant l’idée de perdre leur siège de député leur est insupportable. Vous avez eu beau organiser un très intéressant débat avec Madame Royal, rien n’y a fait. Remarquez que Jean Lecanuet, qui était pourtant bel homme, ceci dit sans vouloir vous offenser, s’est aussi planté.

D’aucuns disent aussi, qu’en vérité, tout cela est manipulation de votre part pour reconstruire un vrai parti du centre après la défaite de Ségolène. Je pense que c’est une mauvaise hypothèse.Si Ségolène perd, on verra se reconstruire un état RPR, comme nous l’avons connu, et sans doute pire. Et là, si vous ne voulez pas perdre votre siège de député, il vous faudra faire la pute avec Sarkozy. Et le connaissant, je crains que ce client ne soit très exigeant.

Vous avez brûlé vos vaisseaux. C’était courageux, mais, malheureusement, vous voici pris au piège. Il ne vous reste plus qu’une seule issue: Vous rendre à Canossa et déclarer haut et fort qu’avec vos quelques vrais fidèles vous allez voter pour Ségolène. Vite. Il n’est peut être pas trop tard.

J’ignore si Ségolène vous en sera reconnaissante. La vie politique est cruelle. Mais vous n’avez plus le choix.

J’espère que ces couleuvres ne seront pas trop dures à avaler.