Bernard Pivot : « Mais quand y a-t’il un bon moment pour se moquer de Mahomet ? »

Bernard Pivot : « Mais quand y a-t’il un bon moment pour se moquer de Mahomet ? »

Invité du journal du soir sur France 2 et invité par David Pujadas à donner son opinion sur la publication de caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo et avoir évoqué le contexte, Bernard Pivot a conclu par cette question : « Mais quand y a-t’il un bon moment pour se moquer de Mahomet ? »
Remarquable réponse qui, en quelques mots, met en évidence les différences dans le traitement des religions dans la presse et dans l’opinion françaises. Pourquoi ne peut-on, sans créer polémique, critiquer de la même façon, les chrétiens, les musulmans et les israélites ?
En France, la République laïque a réglé son compte à l’Inquisition et autres institutions malfaisantes. Il ne reste plus guère que quelques catholiques intégristes, amateurs de messes en latin et de processions. Malgré leur probable concubinage avec l’extrême droite, ils ne semblent pas dangereux. On peut dire tout ce qu’on veut sur leur dieu et leur compte sans provoquer de manifestations.
Les israélites ont aussi leur dose de cinglés, tous habillés pareils, qui passent leur existence à étudier la Torah. En Israël, ils montrent leur courage en étant dispensés de service militaire. On peut critiquer et caricaturer comme l’on veut leurs pratiques, leurs règles et leurs prophètes, et les musulmans ne s’en privent pas. Au pire sera-t-on traité de raciste.
Les musulmans ont aussi leurs délirants qui lapident les homosexuels et les femmes adultères, et autres pratiques délicates. Mais toute critique, voire toute caricature sur le prophète se heurte à une menace implicite. On évoque, à propos des caricatures de Mahomet parues dans Charlie Hebdo, les manifestations qui ont déjà eu lieu à propos du film « L’innocence des Musulmans ». On dit qu’il ne faudrait pas aggraver, ajouter. Et voici que l’on sécurise les ambassades et les lycées français sans certains pays à dominante musulmane. C’est-à-dire que l’on craint des manifestations que les autorités locales ne sauraient empêcher.
C’est un autre degré. C’est avouer que l’Islam ou, au moins, qu’un nombre d’individus, au moins une minorité agissante se revendiquant de l’Islam, peut effrayer à ce point les états laïques et démocratiques qu’ils doivent déployer des forces militaires ou policières, y compris sur le territoire national. Voici qu’on fait porter une grave menace sur la liberté d’expression d’une des plus grandes républiques laïques du monde. C’est inquiétant.
Ce faisant, on donne au passage, à tous les racistes, aux xénophobes et au Front National, au peuple travailleur ou chômeur, des sujets de protestation et de jubilation dont on aurait pu se passer.
C’est aussi inquiétant.

Voir: Charia, lapidation et monstruosité
Voir aussi: Une femme mutilée pour avoir quitté son mari
1006 – 20/09/2012

Bakounine