Sarkozy candidat : c’était une blague

Sarkozy candidat : c’était une blague

Quand je me suis vu Président de la République, je me suis dit que ça serait super. Et ça avait bien commencé : une bonne petite fiesta au Fouquet’s, une petite ballade dans le yacht d’un copain. Et puis l’Elysée, le grand Elysée où avait pioncé de Gaulle. Chirac aussi, c’était fâcheux. Mais enfin, je lui rendais bien sa monnaie, au Chirac.
Pendant un temps, disons une année, ce fut encore assez bon. Quoique déjà, pour Noël, il avait fallu embrasser des mémés qui postillonnaient et qui sentaient l’ail. Et s’il y a bien quelque chose que je déteste, c’est qu’on sente l’ail. Et puis, il y avait des mecs qui se mettaient à m’insulter, moi, le sauveur de la France. C’est pourquoi, j’ai vite compris qu’il fallait que, pour mes déplacements, on soit entouré de CRS pour qu’on ne vienne pas me faire chier. Mais alors, je me suis mis à me faire chier : des discours, des discours. Au fond, j’aurais préféré faire le coup de poing avec un pêcheur.
Et puis le pire est arrivé. Dans tous ces bleds, on tenait à me faire goûter le vin local : une piquette acide comme une réplique de Jean Luc Mélenchon. Déjà que je n’aime pas le vin. Et puis les pâtés, les tourtes, les ragoûts… Une fois, on a même voulu me faire manger de la Tête de Veau sauce Gribiche ! C’était bon pour Chirac ça.
Heureusement, je pouvais claquer tout le fric que je voulais : les Rolex, Air Sarko One, etc.. Mais ça n’a pas duré. Est venu cette putain de crise qui a plongé la Cour des Comptes dans mes dépenses. Et les mecs qui ne tenaient pas parole. Quand je suis allé à Gandrange, Lakshmi Narayan Mittal m’avait promis de relancer l’usine. Après j’ai eu l’air d’un con ! Et puis Kadhafi avec sa tente à se foutre de ma gueule. N’empêche, celui-là, je me suis bien vengé.
Et puis obligé de mentir tout le temps. Essayer de faire croire aux français qu’on leur faisait une politique super géniale pour qu’ils ne se rendent pas compte qu’on les plumait. Un peu, ça va. Mais à la longue c’est chiant de mentir tout le temps. Il ne m’en reste pas beaucoup, mais l’ai encore une bribe de morale.
Et puis les riches : tous des salauds. Je leur avais mitonné un bon petit bouclier pour qu’ils n’aillent pas fourrer leur pognon aux îles Caïman. Penses-tu.
Et les ministres ! Tous à vouloir n’en faire qu’à leur tête ! Voyez la Dati, cette peau dont on disait que l’enfant était de moi alors que c’était évident que c’était Jean Luc Mélenchon. Ah, celui-là. Le Mélenchon ! Toujours à me critiquer, à me traiter de tous les noms. Celui-là, je ne peux vraiment pas le blairer !
Je pense, comme cela à un autre truc à la con. Le Plateau des Glières en godasses de ville. Je ne sais plus qui avait manigancé ce truc. Toujours est-il qu’en arrivant dans le coin, le Préfet me dit que tout avait été préparé. Et il me sort des après-ski Moon Boots. J’aurais eu l’air malin avec des Moon Boots en costume de ville ! Alors je me suis tout gelé au point que Carla en fut très étonnée, le soir. Moi qui ait toujours été bondissant ! J’ai quand même muté ce préfet à Mende pour qu’il se fasse bien chier. Muter les préfets, ça c’était sympa. Tu arrives. Y a un connard qui lance une boule de neige, hop, muté préfet. Ou alors un délégué de l’usine de mes deux qui sent l’ail, hop, muté préfet. Ca, c’était très bon : voir les préfets pisser dans leur froc !
Tout le temps, tout le monde inventait des trucs pour me faire chier. Pas moyen de dire un mot. Et tous là, à critiquer, à faire des photos où j’ai l’air con. Je criais « français, je vous aime » et y avait toujours un abruti pour crier « cocu ! ».
C’est pour ces raisons que je n’ai plus du tout envie d’être candidat. Je vais laisser l’Hollande mettre les mains dans la merde, et le reste. Et moi, je vais rester là, dans l’hôtel particulier de ma Carla, bisou, bisou, à le regarder s’enfoncer dans le marécage. Parfois, je mettrai une fausse barbe pour aller lui crier des trucs à la con. Quand il visitera le Salon de l’Agriculture, je dirai : « Vous ne trouvez pas que ça sent le fumier ici ». J’aimerai bien qu’il me réponde « Casse-toi, pauvre con ».

Bakounine