Ne voulant pas mourir idiot, je suis allé, ce mercredi, contempler les Nymphéas à l’Orangerie.
Je dois bien reconnaître que j’avais, peut-être, la perception pervertie par une visite récente des Impressionnistes à Orsay. J’avais gardé le souvenir lointain de l’empilement du Jeu de Paume. C’est dire combien je fus estomaqué : les œuvres présentées sur des murs de couleur les mettant en relief ; les éclairages étudiés pour mettre en valeur la totalité de la toile, tout en soulignant discrètement, tel ou tel détail. La plus belle réussite étant, de mon point de vue, Le Déjeuner sur l’Herbe qui comble et estomaque la vision, placé là ou il est, présenté comme il l’est, éclairé comme il l’est.
En entrant dans la première salle des Nymphéas, j’espérais donc la même émotion, multipliée par la dimension des œuvres. Mais voici, qu’ayant fait quelques pas, je me dis « non, ce n’est pas possible ».
Et pourtant, c’était possible.
De grands tableaux qui auraient pu être majestueux avaient été accrochés sur des murs couleur urine diluée ! Du ciel, tombait une lumière faiblarde, voire blafarde, qui n’arrosait pas grand-chose. Peut-être les visiteurs au milieu de la salle. En tout cas, pas les œuvres dont j’aurais aimé voir quelque chose d’autre que ces variations incertaines sur des nuances de vert et de bleu sans qu’on puisse distinguer la végétation de son reflet. Naturellement, impossible de s’attarder sur tel ou tel détail.
Je me pris à me demander si les œuvres étaient destinées à être regardées à la loupe ou à la bougie.
Sur les bancs siégeaient des visiteurs déprimés dont l’œil bovidé témoignait du profond désespoir.
Dans la deuxième salle, c’était pire. Peut-être était-ce un funérarium ? Il ne manquait plus que le cercueil et les cierges…
Sur les bancs siégeait des visiteurs dont l’œil n’était même pas bovidé : il était désespérément éteint. Ils venaient de comprendre que les œuvres n’étaient pas destinées à être regardées et que c’était vraiment par générosité que les Musées Nationaux consentaient à leur en laisser percevoir quelques ombres pour les préparer à l’entrée dans l’antichambre de la mort.
Ce serait une œuvre de grande salubrité publique que de fermer cette partie du musée, car l’autre est superbe.
On a dépensé 30 millions d’euros pour ça !
Bakounine
BOGATKO Publié le2h40 - 23 décembre 2011
C’est la vérité vraie.
Ce sont les Nymphéas qu’on a assassinées.
La magie de la représentation de Monet, celle où l’on doit distinguer ce qui se trouve à la surface de l’eau, ce qui s’y reflète ou bien ce qui est en dessous de cette surface, on n’en distingue plus rien.
L’éclairage « zénithal » est détestable et s’il fait un tant soit peu sombre dehors, les Nymphéas ne sont plus que des a-plats bleus et verts.
Vite !
Pour sauver ce chef d’oeuvre, patrimoine du génie français, que viennent de nouveaux concepteurs qui le présenteront dans l’esprit de l’éclairage et de coloris des mur qui a animé les transformations du musée d’Orsay.
Pour l’Orangerie, on a mis 7 ans et 30 millions pour cette « exécution ».
Qu’on ne tarde plus à révéler les Nymphéas, et comme il n’y a plus lieu de reprendre toute l’architecture du pavillon, la note sera-t-elle moins moins salée.
P.S. La position des bancs au centre des salles fait que si l’on veut prendre du recul pour voir les tableaux d’un mur, on se place à un endroit où l’on gène ceux qui, sur les bancs, regardent le tableau du mur opposé. Dont acte pour le futur.
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