Les « infiltrés » ou les dérives du journalisme à la recherche de scoop

Les « infiltrés » ou les dérives du journalisme à la recherche de scoop

On me dira ce qu’on voudra. Que c’étaient des pervers. Que c’étaient d’immondes pédophiles prêts à violer des touts petits. Et pire encore. Je ne peux être satisfait de la dénonciation à la police des sujets complaisamment filmés pour une émission de France 2.

Déjà, en soi, l’idée de la dénonciation me fait froid dans le dos. Surtout quand on n’est pas soi-même victime. Cela rappelle des moments peu reluisants de l’occupation.

Et le journaliste ne peut s’avancer masqué. S’il le fait, il est « off », comme on dit. Il ne peut pas nommément citer ses sources. C’est comme le secret de la confession. Oui, je sais qu’on y dit bien des choses à la confession quand des prêtres pédophiles y vont pour libérer leur conscience.

C’est comme le secret « médical ». Le psychologue que je suis y est tenu. Aurais-je révélé à la police les confidences d’un patient pédophile ? Assurément pas. Je serais probablement sorti de ma neutralité bienveillante pour l’inciter fortement à se présenter devant la justice. Mais jamais je ne l’aurais dénoncé.

Si jamais un seul psychologue (j’entends un authentique, pas un gourou) se permettait une dénonciation de ce genre, il n’y aurait plus un patient pour oser parler. Car ces petits journalistes qui se disent choqués parce qu’ils ont découvert, n’imaginent pas ce qu’on peut entendre en psychothérapie ou en analyse lorsque le climat de confiance s’est établi. Désolé pour les curieux malsains, mais cela restera enfoui. Circulez, il n’y a rien à révéler.

Si jamais un seul médecin (j’entends un authentique, pas un gourou, se permettait une dénonciation de ce genre, il n’y aurait plus un patient pour oser parler…

Que croyaient-ils ces petits journalistes en s’engageant dans une telle enquête ? Qu’ils allaient trouver des cas gentils de masturbation devant des photos ? Étaient-ils assez naïfs ? On ne me le fera pas croire. Il y a quelque chose de pervers dans une recherche de ce genre. Et qui sait si les dénonciateurs ne se sont pas libérés ainsi du poids de la révélation qu’ils ont eu de leurs propres tendances refoulées profondément enfouies au fond de leur inconscient.

J’apprends qu’un certain nombre de journalistes se sont prononcés contre ce qu’ils appellent une dérive du journalisme . Cela me rassure.

Bakounine