La représentation dans une structure autogestionnaire. Quelques considérations préliminaires.

La représentation dans une structure autogestionnaire. Quelques considérations préliminaires.

Il est évident qu’une structure autogestionnaire se présente d’abord comme un univers de participation directe des citoyens. Mais il ne serait pas réaliste d’affirmer que toute l’organisation de la vie sociale peut être structurée ainsi. A l’échelle d’une grande ville, a fortiori à celle d’une région, il faut nécessairement procéder par délégation.

Le système électif qui prévaut de nos jours peut être considéré comme une forme de démocratie. mais on en voit bien les limites. Une fois élus, les conseillers ou les députés, a fortiori les ministres ou le président, s’empressent d’oublier ce qu’ils ont promis. Parfois même de bonne foi. Car il se produit des évènements qui n’étaient pas prévus. On y réagit donc avec sa sensibilité personnelle, dans le meilleur des cas, ou en fonction des intérêts qu’on essaie de protéger dans les autres cas. Les élections se font au mieux sur un vague programme ou selon une orientation générale sous le contrôle des autres élus, mais en tout cas pas sous le contrôle du peuple. Les élections terminées, ce dernier se trouve dépossédé et ne pourra qu’attendre les prochaines élections ou réagir sur un mode plus ou moins révolutionnaire. L’histoire de France est remplie d’évènements de ce type, plus ou moins meurtriers, de la Commune de Paris à Mai 1968 en passant par de grandes grèves comme celle des mineurs de 1948. Et dans tous ces cas de figure, les partis de gauche se sont appropriés les revendications populaires pour les appliquer à leur façon. Ce ne fut pas forcément une confiscation, mais on voit toujours un décalage entre les revendications populaire et la situation politique négociée par les partis et les syndicats, qui suivît ces grands évènements.

Ceci ne met pas forcément en doute l’honnèteté des négociateurs. Mais par leur position même, ils sont conduits à co-gérer, à négocier ce qui n’est pas forcément suffisant. On voit au cours de la crise de 2008-2009, des syndicats accepter des plans de restructuration incluant des licenciements, au motif de l’acceptation d’un moindre mal. Ce n’est pas le rôle d’un syndicat d’accepter le moindre licenciement ou de signer un protocole d’accord incluant de telles pratiques.

C’est ici que l’on peut trouver la différence entre l’élection et la délégation ou le mandat. L’élu est souvent propulsé au premier rang en raison de sa personnalité, mais trop souvent sur un programme général et flou. Et il finira presque toujours par accepter de négocier le non négociable comme la perte des emplois. A l’opposé, le mandataire est porteur d’un mandat, avec, éventuellement des marges de négociation connues à l’avance. Il doit revenir devant ses mandants si les circonstances ne lui permettent pas d’éxécuter ce pour quoi il a été choisi.

Quand on réclame « ni dieu, ni état », il ne s’agit pas de vouloir détruire l’organisation sociale. Bien au contraire. Il s’agit de vouloir toutes formes d’organisations sociales, à tous les niveaux ,à la seule réserve près qui est que la structure ne doit pas conduire une politique pour laquelle elle n’a pas été précisément choisie. Ce qui revient à dire, par exemple, qu’on ne peut pas être élu pour lutter contre la délinquance sans avoir énoncé la liste des moyens qui seront mis en oeuvre. Et, en cas d’échec, il faut revenir devant les électeurs pour rendre compte et rechercher d’autres moyens.

Ceci conduit à énoncer quelques règles:
– La règle est la démocratie directe chaque fois que c’est possible : entreprise, école, petite communes, etc.
– Les élus ou les délégués portent un mandat précis et doivent pouvoir à tout moment rendre compte et demander d’autres mandats si nécessaire.
– La politique se construit de bas en haut et non de haut en bas. L’initiative de la base est le seul véritable chemin. On voit ici que la plupart des organisations politiques ne fonctionnent pas dans ce cadre. Au mieux, propose-t-on des méthodes aux citoyens. Au pire, on élit un homme sur sa bonne mine.
– La pratique du référendum est nécessaire, autant de fois qu’il le faut, notamment en groupant les questions, chaque fois que la pratique de la démocratie directe n’est pas possible.
– Les mandataires sont élus sur des objectifs précis et non sur des intentions générales.
– La durée des mandats est brève. Assez longue pour permettre aux délégués d’apprendre. Assez courte pour interdire tout emploi de politicien professionnel. Le cumul des mandats est interdit. Le nombre de ré-élections est strictement limité. En même temps, la société accorde aux délégués le maintien de leur salaire et garantit l’emploi en retour de délégation.
– Les délégations reposent sur la disponibilité et les compétences.
– Les délégations ne sont pas rémunérées. Seuls les remboursements de frais sont admis ainsi que toutes les dépenses permettant aux délégués de remplir leur tâche sans aucun frein.

Bakounine