La lutte pour la vie… dans le métro

La lutte pour la vie… dans le métro

sarko.1195739243.jpgompant par nécessité avec mes habitudes de ces derniers jours, il m’a bien fallu me rendre à Paris. Ou plutôt à Boulogne-Billancourt. Ce qui est pire car il me faut emprunter la ligne 9 du métro, réputée la plus pourrie du réseau.
D’ailleurs, comme me disait un ancien collègue (ancien parce que plus jeune que moi et pourtant décédé) et qui fut, de surcroît un de mes touts premiers élèves, je me déplace en suivant la règle de l’emmerdement maximum. J’emprunte le TER Picardie (pas joli-joli), puis la ligne E entre Magenta et Haussman-St Lazare (pas terrible) et enfin la ligne demétro n°9 qui est donc ce que je vous disais ci-dessus.
Courageux, mais pas téméraire, prudent donc, je quittai mon domicile quelques 6 heures avant le début de mon premier cours. A ma grande surprise, le train de 7H27 qui avait été spontanément supprimé hier, d’après ce qu’on me dit, vint à l’heure. Oui à la très précise heure de 7H27, ce qui n’était jamais arrivé depuis la création du monde. Mais, les choses se détériorèrent un peu, en raison d’arrêts inhabituels à des stations où personne ne descendit ni ne montât et en quelques emplacements de rase campagne, comme il sied à tout bon TER de Picardie. Enfin, le retard ne dépassa pas un quart d’heure, ce qui, pour un jour de grève, est une performance.
Vint alors l’épreuve numéro 2: le RER E. Le RER E est une ligne très capricieuse. Les mécaniciens m’y semblent très ombrageux, les suppressions de trains sans autre excuse que l’affichage du terrible « supprimé » sur le panneau d’affichage ne sont pas rares. Je m’attendais donc à de graves embûches. Pourtant, il n’en fût rien ou presque rien. En entrant sur le quai, j’y vis une certaine affluence, mais quand le train arriva quatre minutes plus tard (o merveilleux horaire !), il descendit assez de gens pour que ceux qui montaient trouvent une place convenable. J’étais dans un escalier, certes, mais pour un parcours de quatre minutes, rien d’inhumain.
Je commençais à jubiler en mon for intérieur. Mais la jubilation prit fin en pénétrant sur le quai de la station Havre-Caumartin, ligne 9, direction Pont de Sèvres. Le quai n’était que modérément chargé, mais l’annonce de la rame suivante pour 10 minutes plus tard laissait le temps à plein d’importuns de venir disputer les centimètres carrés au sol d’un matériel roulant dont j’espèrais, comme tout un chacun, devenir locataire, sinon propriétaire, dans la rame annoncée.
Et la rame n’arriva effectivement que 10 minutes, voire 11, plus tard.
Là commença un spectacle pire qu’affligeant.
Quand la porte s’ouvrit, il se produisit un vomissement. Non, le mot n’est pas exagéré. Et même pas un vomissement d’adulte qui s’efforce de se contenir un peu, en raison de convenances sociales, pour aller s’épandre un en coin retiré. Non ! Un vomissement d’enfant, comme ces nourrissons qui vous regardent impavides et qui, d’un seul trait, vous rejettent tout un biberon sur votre pull-over. Certains tentaient de sortir. D’autres cherchaient à entrer au plus vite par peur d’être abandonnés sur le quai. Déjà, il m’apparût que le minimum de règles de bienséance avait été oublié.
Ne m’étant pas précipité, je me trouvais à la fin du troupeau qui n’avait pas renoncé. Le machiniste faisait sonner comme un dératé sa sonnerie pour indiquer que les portes allaient se refermer. Là me vint une image terrible: les portes n’étaient pas des portes, mais d’immenses lames qui allaient me couper en deux dans le sens de la largeur. Comme je ne suis pas d’une nature qui abandonne vite, je décidais de pousser la masse des corps entre lesquels il y avaient bien encore quelques centimètres à récupérer. Et là, je sentis toute la puissance des nantis contres les pauvres. La pression qui m’empêchait de pénétrer devint active notamment de la part d’un grand et fort qui s’efforça de m’éjecter. mais je tins bon et il s’écria:
– Vraiment, ce n’est pas possible !
Alors me revint cette phrase de la campagne, vous savez, cette affiche de ce candidat qui disait: « Ensemble tout devient possible ». Et là je trouvai la force de m’infiltrer. La porte finit pas se refermer. Et je ne puis m’empêcher de dire à voix forte:
– Mais si. Tout est possible. Il ne fallait pas voter Sarkozy ! Que ceux qui ont voté Sarkozy ne se plaignent pas. Les autres, encore…
Cette sortie eut au moins l’effet de faire rire quelques uns. Pas tous. Il y en avait beaucoup de raides comme s’ils serraient les fesses pour éviter la diarrhée. En tous cas, ces quelques rires ajoutés aux secouages du départ de la rame fit qu’on finit bien pas trouver son espace (minimum).
A la station suivante, le grand fort, au motif de laisser passer un voyageur qui descendait, s’arrangea pour me contraindre à sortir de la voiture. Un autre (sans doute avait-il voté pour qui vous savez et tentait-il de me faire payer mes propos inconvenants) me bouscula avec une certaine force, je dirai même, une force certaine.
Le voyage reprit avec son cortège d’arrêts qui se prolongeaient en raison des difficultés à faire entendre raison à ceux qui, comme moi, persévéraient dans leur intention de s’infiltrer. Puis vint l’arrêt au cours duquel le courant électrique s’interrompit. Et nous restâmes là, à attendre, dans nos poses figées, sans dire un seul mot en éclairage réduit. Mon Dieu, quelle triste réalité sociale. J’en profitai pour regarder l’épaule de ma voisine qui portait un corsage transparent (je découvris plus tard qu’elle portait une veste repliée contre son bras gauche). Cette épaule m’occupa un moment. Sous le corsage, on voyait trois bretelles. Que pouvait-elle donc bien porter en dessous ? Une bretelle pour le soutien-gorge, une autre pour une petite combinaison. Mais la troisième. En plus, l’une des bretelles était mal disposée, légèrement tortillée, et je mis à brûler de l’envie de la remettre bien à plat. Et de fil en aiguille, si j’ose ainsi m’exprimer, je me dis que notre problème d’espace s’améliorerait si nous formions des couples enlacés. Ce serait moins con que d’être là, aussi droits que notre colonne vertébrale nous le promettait. Je ne voyais que le profil du visage de la dame. Elle était très légèrement parfumée. Au fond, juste une petit câlin de quelques minutes dans la foule d la grève.
Le grand brutal me rappela à la réalité. Constatant que la rame ne partait pas, il entreprit de sortir pour s’apercevoir qu’au moment même où il posait le pied sur le quai, la lumière revint. Comme j’aurais voulu qu’on le plante là. Mais hélas, mon rêve vengeur ne fut point exaucé.
En me trémoussant un peu, comme au motif de remettre mon corps en place, je parvins à voir le visage de ma voisine. Elle était assez jolie. J’eus, cependant, la tristesse de découvrir dans des yeux, une forme de lassitude. Mon imagination n’était pas allée lusqu’à elle….

Bakounine

1 commentaire pour l’instant

raymonde Publié le10h30 - 2 décembre 2007

Ahlala! Qu’est- ce que vous avez tous donc contre M. Sarkozy? Il fait de son mieux pour que la France retrouve ou plutôt trouve sa bone ambiance, car n’oublions pas que ce pays est loin d’être enviable…
Et on ne regarde pas le corsage des femmes, non mais oh! 🙂