Politique de sécurité : Echec et lourd héritage annoncé

Politique de sécurité : Echec et lourd héritage annoncé

Voici bientôt dix ans que Nicolas Sarkozy est à la manœuvre sur les questions de sécurité, soit comme Ministre de l’Intérieur, soit comme Président de la République. Et les résultats ne sont pas là. Malgré les promesses de débarrasser certaines cités de leurs « voyous ». On observe, apparemment, une légère baisse des atteintes aux biens (cambriolages, vols de voiture), mais une augmentation des atteintes aux personnes. Donc rien de bien significatif.

Cet échec s’explique par une approche dogmatique de la question et non pragmatique comme cela aurait dû être.

D’abord, on a diminué le nombre de « médiateurs » au motif qu’ils pouvaient être trop près des délinquants voire délinquants eux-mêmes. Ce qui , pourtant, ne met pas leur rôle en cause, mais la manière selon laquelle ils pouvaient être recrutés. Il existe pourtant bien partout, des seniors qui ne partagent pas les positions des jeunes délinquants et qui peuvent apporter du lien social et des ouvertures de dialogues. Mais la théorie en vigueur est d’implanter des caméras vidéo. Voilà des décennies qu’on a installé des caméras dans beaucoup de pays et en France. La délinquance a-t-elle diminué pour autant ? La réponse est évidemment non. Tout au plus les enregistrements permettent-ils, avec un peu de chance, d’identifier les auteurs de délits. En tout cas, pas de rôle dissuasif. Et, très vite, les populations visées déplacent leurs activités hors de vue.

police-enfant.1285373114.jpgEn même temps, on diminue le nombre des policiers. Pour des motifs économiques à courte vue. La productivité des membres de la corporation peut, sans aucun doute, être améliorée. Mais, de là à de telles diminutions ! Peut-être imagine-t-on que les yeux stupides des caméras produisant des images devant lesquelles les opérateurs s’endorment tant elles sont monotones sont aussi performantes qu’une des paires d’yeux humains. Pas besoin d’une longue démonstration pour démontrer que cette opinion est stupide.

Ensuite, on s’intéressera à la politique du chiffre. Personne n’en nie l’existence. Là une arrestation d’un petit délinquant compte autant qu’un gros bonnet. Mais le petit est plus facile à prendre. L’enquête sera plus rapide et moins coûteuse. Alors, pourquoi s’en priver ? Mais il n’est pas rare que les dossiers communiqués aux juges ou au Parquet sont si insuffisants ou mal fichus que les intéressés sont aussitôt remis en liberté. Mais qu’importe ! L’arrestation aura compté pour un ! Même quand on compte des pommes de terre pour les frites, on ne donne pas la même valeur aux grosses et aux petites.

Il y a aussi la question récurrente de l’importance du commerce de la drogue qui prend une importance économique de plus en plus grande. A tel point qu’il est probable que les fruits de cet activité constitue une source non négligeable de revenus. Et, en période de récession économique et de chômage, ce n’est probablement pas marginal. Du coup, il est plus difficile d’obtenir des renseignements de personnes indirectement impliquées de cette façon. Mettre la police sur une piste, c’est risquer de perdre une source de revenus. Et la drogue apporte avec elle son cortège de délits, voire de crimes. Du point de vue des vendeurs pour se partager les produits et les territoires de vente. Du point de vue des consommateurs qui ont besoin d’argent pour acheter leur dose quotidienne (vols à la tire, à l’arraché ou à l’étalage, autos-radios, etc.).L’éradication du commerce de la drogue devrait être un objectif de premier ordre.

Pire encore : le commerce des armes est en pleine floraison. Celles-ci sont importées d’Europe de l’Est en provenance de stocks mal contrôlés, comme en Serbie, par exemple. Ce commerce est entre les mains de responsables puissants alimentant des revendeurs. C’est ainsi que les tirs contre la police lors d’opérations sont signalés de plus en plus souvent. Et les moyens mis en œuvre pour démanteler de tels réseaux doivent être considérables, adaptés et gérés par des enquêteurs chevronnées. Et là reviennent les questions d’effectifs et d’expériences des enquêteurs.

En matière de drogue et de trafic d’armes, il semble bien que les responsables de la police ou ceux qui les gouvernent n’ont rien vu venir. Ils étaient trop occupés avec les racailles, les voyous et le « karcher », l’esprit rivé sur la politique du chiffre et la pose des caméras.

Cet aveuglement, par esprit de système, est d’autant plus regrettable que les évènements de certains quartiers de France ressemblent à ceux qu’ont connu des quartiers d’autres pays d’Europe ou d’Amérique. De nombreuses méthodes et expérimentations ont été essayées avec plus ou moins de bonheur. Mais ceux qui nous gouvernent, trop imbus de leur pseudo savoir, ignorent totalement ces essais et ces recherches. Cette connaissance des observations venues d’ailleurs n’est certes pas une clé de la réussite. Mais l’ignorance est, à coup sûr, la voie garantie de l’échec.

Après toutes ces années d’impéritie, l’héritage sera pesant.

Bakounine