Saches, ami lecteur, que celui qui ici même écrit est un fonctionnaire. Et que la notation au mérite, il connaît pour en profité. Car, au moins dans le « corps » qui me concerne cela existe ou a plus ou moins existé. Et c’est le bordel.
Déjà, une petite histoire vraie.
Soit une P.M.E. de 35 salariés, répartis en deux services avec deux cadres pour les « encadrer ». Et puis il y a un patron qui voit bien ce qui se passe, mais pas le détail. C’est un patron pour qui, selon l’expression, « de minimis non curat praetor ». Il se repose donc sur les avis de ses cadres. Et l’un d’entre eux est dynamique et toujours soucieux de valoriser tel ou tel de ses subordonnés. Et l’autre est une couille molle et peureuse. Le premier obtiendra donc plus d’avancées au mérite que le second.
Une autre histoire vraie.
Soit le Ministère de l’Education. Là, quelques petits milliers de maîtres de conférences qui travaillent dans toutes les universités. Comment le patron, le ministre va-t-il faire cette promotion au mérite ? Il va déléguer. A qui ? Aux présidents des universités. Si cela se passe comme dans l’exemple précédent, ce sera évidemment le bordel. mais comment le ministre peut-il avoir une bonne idée ? Il ne peut pas.
Alors, il dit quoi le ministre ? Il regarde son budget et il dit que seuls 5% des maîtres de conférences peuvent être « hors classe ».
Déjà souci: il y a peut-être 8% des intéressés qui le méritent. Ou seulement 3%. Allez savoir ! Mais comment faire pour le savoir ? Il est bien évident que ceci est très compliqué à déterminer avec des critères sérieux. D’autant plus que ceux qui pourraient le mieux avoir un point de vue, les supérieurs hiérarchiques directs, pour autant que cela existe, ne détiennent les cordons de la bourse. D’où la nécessité d’un critère global du genre 5% de l’effectif. Critère très imparfait, c’est le moins qu’on puisse dire.
Et comment trouver ces 5% ? S’il y en a déjà 5% en activité, il faut attendre que certains partent. Soit on les tue, ce qui ne se fait pas habituellement. Soit on profite des départs à la retraite. Alors, sur cette base, on connaît le nombre de promotions qu’on pourra accorder, ce qui n’a rien à voir avec l’activité des promouvables.
Mais comment les répartir entre les université ? Et comment les répartir entre chaque faculté dans chaque université ? Et comment les répartir entre chaque service d’enseignement dans chaque faculté ? Par un grand marchandage dans lequel les qualités des intéressés sont le dernier des critères. Actuellement, tout ceci se traduit par le résultat qui est le nombre de promotions autorisés par faculté. Et là, le meilleur comme le pire sont possibles.
L’auteur de ces lignes pourrait volontiers dire que les critères sont justes, car il a bénéficié ainsi de plusieurs promotions au choix. Pourtant, il connaît des collègues qui n’en n’ont pas tant obtenu et qui n’en étaient pas moins méritants, éventuellement sur d’autres critères. Et dans les groupes ou conseils qui répartissent ces promotions, il y a naturellement des représentants élus des syndicats. Et je connais aussi des collègues qui n’on jamais été syndiqués que pour avoir plus de chances de profiter des promotions.
Depuis que travaille à l’université (40 ans), j’ai vu plutôt le régime des promotions au choix se resteindre plutôt que de s’étendre, simplement à cause de la difficulté, dans une aussi grosse structure, d’user de critères vraiment objectifs à la fois localement, mais aussi transversalement entre tous les établissements. Ce système produit beaucoup d’injustices.
Une solution serait d’appliquer « small is beautiful ». Avec de vrais managers dans chaque faculté. Et non pas des directeurs élus, redevables envers leurs électeurs. Si cette piste était exploitée, pourquoi pas, elle impliquerait un changement profond des règles de fonctionnement. Mais la monumentale ADMINISTRATION CENTRALE accepterait-elle que la gouvernance des établissements lui échappe ? Voilà qui est fort peu probable.
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