Tous ceux qui parlent de la constitution d’un parti social-démocrate, d’une ouverture au centre, semblent oublier qu’il faut quand même rester à gauche. Si l’objectif n’est que la recherche du pouvoir, on peut faire alliance avec qui l’on voudra. Mais il y a peu de chances que les tenants de la démocratie participative soient enthousiasmés par cette perspective. Alors, ceux qui sont revenus aux urnes pourraient bien les bouder de nouveau.
Car, il faut quand même savoir où se place le point de rupture. On a vu, lors du débat Bayrou-Royal, que les désaccords portaient surtout sur certains aspects, pas tous, de la politique économique. Une chose est claire : Bayrou ne remet pas en question l’ordre libéral économique mondial. Et l’on sait que les effets de cet ordre (actionnariat intéressé par les profits à court terme, délocalisations) sont les plus nocifs pour le maintien de l’emploi. Peut-on dire que les électeurs qui ont voté pour Bayrou au premier tour et pour Royal au second on la même vision de l’ordre économique mondial que les électeurs de Besancenot ? Assurément non. Et de même pour les « bons » électeurs classiques de la gauche ouvrière et socialiste. On ne peut donc faire alliance, comme cela, à tout va comme semble le dire, par exemple, Kouchner. On ne peut gagner à n’importe quel prix. Si la gauche avait voté au premier tour pour Bayrou, comme beaucoup ont été tentés de le faire, il serait président de la république et Sarkozy ne le serait pas.
Au jour d’aujourd’hui, un seul critère pour les candidats députés : êtes-vous disposé à constituer une opposition raisonnable et raisonnée, mais solide, à un parti tellement servile qu’il risque de conduire le nouveau président sur la voie du pouvoir personnel ? Si la réponse est « oui », alors il y a matière à composer un ensemble, un « front » pour employer un lieu commun du commentaire politique. Et pour ce faire, à la fois dans un souci de clarté démocratique et pour éviter tout souci de concurrence stérile, il faut que toutes les composantes de cette opposition soient représentées. Daniel Cohn-Bendit a proposé qu’après examen des résultats de la présidentielle, on choisisse des circonscriptions pour proposer des candidatures assurant cette représentation et permettant notamment à des « petits » partis d’être représentés. Il ne serait pas scandaleux qu’on trouve une circonscription où Olivier Besancenot ou José Bové pourraient être élus. Il en va de même, évidemment, pour les verts, les communistes et le Parti Démocrate de François Bayrou, si celui voit le jour et décide de se placer dans l’opposition.
Il est à craindre, malheureusement, que cette stratégie pragmatique et productive ne se heurte aux féodalités aux situations acquises, aux fiefs, surtout tant qu’on n’aura pas mis en œuvre la saine proposition de Ségolène Royal d’interdiction de cumul des mandats. Mais, pour ces législatives, il à craindre que la politique redevienne basse et alimentaire, tout ce qu’un grand nombre des électeurs de la candidate de gauche n’a pas souhaité.
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