L’effet Bayrou ou quelle chance que la gauche ait Ségolène

L’effet Bayrou ou quelle chance que la gauche ait Ségolène

L’effet Bayrou a beaucoup de points communs avec l’effet Ségolène d’il y a quelques mois. Il se montre à l’écoute. Il dit les choses comme elles doivent être dites. Et surtout, il se démarque de tout extrémisme, prouvant par là, s’il était besoin de le faire, que les français ont envie d’être gouvernés au centre. C’est l’éclatement du paradoxe de la 5ème République, forçant au bipolarisme dont tout le monde sait bien qu’il conduit forcément à l’excès. D’ailleurs aucun président n’a, vraiment et totalement, gouverné à gauche ou à droite.

Si Ségolène n’était pas là, on peut imaginer la pâle figure que ferait dans les sondages l’apparatchik socialiste bon teint qui aurait été choisi à sa place, face à François Bayrou. Pour le coup, nous nous serions probablement acheminés à coup sûr vers un deuxième tour Bayrou-Sarkozy.

Mais même si Bayrou puise ses idées dans ce qu’on a stupidement qualifié de populiste quand il s’agissait de Ségolène Royal, alors qu’il ne s’agit que d’une écoute pragmatique des citoyens, il n’en reste pas moins que de fortes différences doivent être soulignées.

Bayrou n’a pas de programme construit. Certes, il a un certain nombre de mesures, mais rien qui ressemble aux propositions structurées de son adversaire de gauche. Cette dernière a élaboré ce qu’on peut appeler son programme sur la base de celui du parti socialiste et de toute la phase d’écoute participative qui a précédé la publication. Chez Bayrou rien de tel. Rien d’une remontée ou d’une construction structurée par une solide préparation. Ressemblant fort, en cela, à Nicolas Sarkozy, il invente des mesures quand l’actualité amène une question sur le devant de la scène. A gauche rien de tel : La centaine d’objectifs est exprimée, rédigée, a été publiée et on n’y change rien de significatif au fil des jours. Il y a là un argument fort en faveur de la candidate de gauche.

Une autre chose, comme l’a souligné, méchamment, Simone Weil, est l’absence de support politique de François Bayrou. Représente-t-il un courant politique conséquent et construit ? Bien sûr que non, puisqu’il serait prêt, apparemment, à prendre un Premier Ministre de gauche. Et là est une ses faiblesses majeures. Qui acceptera de collaborer à son équipe ? Probablement quelques troisièmes ou cinquièmes couteaux. Comment pourrait-il négocier, s’il était au deuxième tour, même en situation de gagner, avec les partisans de Sarkozy ou de Royal, un projet conséquent et construit ? Quelle Assemblée Nationale pourrait-il espérer ?

L’argument de l’inexpérience supposée de Ségolène tel qu’énoncé à une certaine période de la campagne vaut mille fois plus pour François Bayrou. A-t-il participé de près à un secrétariat de l’Elysée ? Et même s’il est présenté, sur son site Internet, comme ayant été Président de Navarre, ce n’est jamais que le Conseil Général des Pyrénées Atlantiques. On sait aussi que son passage au Ministère de l’Education a consisté à se tenir sage après l’explosion liée à la tentative de révision de la loi Falloux.

A côté, le curriculum de Ségolène Royal est incomparable.

Allons ! Que la candidate de gauche, portée par tant de citoyens qui ne sont pas tous socialistes, continue sur le droit fil du chemin commencé. Ne changeons rien. Certes, on peut imaginer que nous pouvons perdre. Mais ce ne serait pas faire honneur aux citoyens que de croire qu’ils peuvent céder à n’importe quelle aventure. Le passé nous a montré que non.

Et de toute façon, il faudra bien que François Bayrou réponde à cette question : Si vous n’êtes pas au second tour, pour qui voterez-vous ?

Bakounine